SQUATTEURS | Drwa A Enn Lakaz — D’une réaction dans l’urgence et la détresse à une prestation professionnelle !

— Père Gérard Mongelard : « La crise du logement prend racine dans l'histoire même de notre pays ! »

En mars 2020, les Mauriciens découvraient le premier confinement dans le sillage de la pandémie de COVID-19. Mais un autre malheur se profilait à l’horizon : celui des Mauriciens en situation de logement précaire dans pas moins de trois régions du pays, à savoir Pointe-aux-Sables, Malherbes et Riambel. Au cri du cœur de ces familles et de leurs enfants, plusieurs citoyens ont répondu positivement en constituant une plateforme commune : Drwa A Enn Lakaz (DAL). Et cela au mépris de la posture officiellement et sans coeur, adoptée par le Deputy Prime Minister et ministre des Terres sans oublier le Tourisme, Steven Obeegadoo. Un an après, cette formation s’articule autour d’un parcours solide et riche, et se pose comme un partenaire incontournable et important pour les agences étatiques œuvrant dans ce secteur.

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À ce jour, DAL accompagne 43 familles et collabore avec la NHDC pour les cas de Hardship. « Deux cas nous ont été référés par la NHDC et nous avons déjà pris en charge le dépôt dans un cas. L’autre est en cours de paiement », explique d’emblée Delphine Ahnee, présidente de la plateforme citoyenne, qu’elle soutient depuis au tout début. Grâce aux efforts conjugués de ce mouvement citoyen et de l’agence d’État, en l’occurrence, la National Housing Development CO (NHDC), quatre familles ont été logées à Baie-du-Tombeau; cinq à Mon-Goût, cinq autres à Cottage; trois à Souillac, deux à Quatre-Cocos et une à Montagne-Blanche.

« Et de ces 20 familles, 11 ont déjà reçu leurs clés du ministère du Logement via la NHDC. À ce jour, sept familles ont emménagé : quatre à Mon-Goût, deux à Quatre-Cocos et une à Cottage. Nous suivons les neuf autres dans leurs démarches et problèmes logistiques afin qu’elles puissent enfin vivre dans une maison décente », explique Delphine Ahnee. De plus, elle indique que « neuf familles ont rendez-vous pour des entrevues à la NHDC, dont trois de Riambel. »

Entre le premier confinement et celui de cette année, DAL s’est érigé « comme un partenaire du secteur public, en même temps que celui des Mauriciens en situation de logement précaire ». Fort de son parcours, émergeant d’une détresse humaine et des appels au secours de ces familles livrées à elles-mêmes, en plein confinement l’an dernier, et dont plusieurs ont vu leurs cases être démolies devant leurs yeux, DAL multiplie les efforts, désormais, pour être ce pont entre les victimes et les autorités concernées.

Retour sur le confinement de 2020. Fin mai dernier, le froid avait déjà commencé à se faire sentir dans plusieurs régions du pays. Le 28 mai, à Cité Tôle, à Malherbes, les agents de la force policière avaient eu fort à faire devant une résistance spontanée constituée de familles de squatteurs et de citoyens venus les soutenir dans leur malheur. Les agents de démolition sur place n’attendaient que le feu vert des autorités pour mettre à exécution leurs machines… Le lendemain, scénario similaire, cette fois à Pointe-aux-Sables, où se trouve un autre groupe de squatteurs.

« DAL était présente aux côtés des familles bien avant que les autorités n’en arrivent là », rappelle Delphine Ahnee. Elle poursuit : « Dès que les officiers de l’État ont commencé à signifier l’intention à l’égard de ces familles, qui se trouvaient sur les terrains de Pointe-aux-Sables, Riambel et Malherbes, un groupe de citoyens, comprenant entre autres l’ancien président de la République Cassam Uteem et le père Gérard Mongelard, représentant le diocèse catholique, s’est constitué en plateforme citoyenne. Nous avons également dans nos rangs de jeunes activistes engagés sur différents plans dans le pays. »

La raison qui pousse notre organisation à militer aux côtés de ces familles en situation de logement précaire, continue Delphine Ahnee, « c’est quand nous avons pris le temps d’étudier chaque cas et que nous nous sommes rendu compte qu’un grand nombre était des cas Genuine, c’est-à-dire, des familles ou des mères célibataires, dans certains cas, qui avaient déjà entamé des procédures et des démarches auprès de la NHDC afin d’obtenir un toit ». Elle ajoute : « Ces personnes ont des parcours individuels, ponctués de difficultés. Mais à la base, aucun ne souhaitait vivre illégalement sur un terrain de l’État ! »

Sauf l’intervention de cette plateforme citoyenne, il était reproché à nombre de familles, se trouvant sur ces terrains, qu’elles étaient dans l’illégalité, qu’elles occupaient des terrains de l’État et qu’elles ne voulaient que profiter de certaines circonstances. « Ce qui n’était pas du tout le cas de ces familles que nous avons pris sous nos ailes, car elles n’avaient nullement  l’intention de “sot lake” ! Des complications étant survenues à un certain moment — perte d’emploi, divorce, entre autres éléments — ont fait que certains ne pouvaient plus s’acquitter de leurs contributions à la NHDC. Mais leurs dossiers étaient bel et bien existants, et on a pu remonter, justement, jusqu’à ceux-ci, prouvant la sincérité de ces familles et leur légitimité à réclamer un toit décent. »

DAL s’est alors investie pleinement à « entamer le dialogue et enclencher des démarches auprès de la NHDC pour rectifier des malentendus et mettre en œuvre les efforts nécessaires pour que des familles éligibles puissent enfin avoir un toit ». Delphine Ahnee souligne : « Le travail est loin d’être fini. Le problème de logement précaire ne date pas d’hier et les pistes de solution ne sont pas légion. DAL s’est renforcée, propose des prestations professionnelles et a établi un partenariat solide avec la NHDC et les agences de l’État. Nombre de familles mauriciennes vivent dans cette précarité extrême. Nous allons faire de notre mieux pour aider le plus grand nombre possible. »

Le père Gérard Mongelard et d’autres membres de DAL, accompagnant des familles qui ont obtenu des maisons de la NHDC…

Des terrains de Pointe-aux-Sables, Malherbes et Riambel à un « chez-soi » digne de ce nom…

Père Mongelard : « Une injustice qui perdure… »

Militant au sein de l’Église catholique et d’Affirmative Action, le père Gérard Mongelard, également membre de DAL a fait remarquer que « la question du logement précaire s’est aggravée, à Maurice, depuis le début des années 2005 ». Actuellement, dit-il, le gouvernement en place se retrouve avec « une crise du logement sans précédent ». Le religieux, qui a été très touché et marqué par les mères célibataires squatteurs, qui ont vu leurs structures démolies, avait œuvré pour qu’elles puissent être relogées temporairement au Foyer Fiat, à Petite-Rivière. Le père Mongelard est très sensible au problème des Mauriciens en situation de logement précaire : « Il y a violation des droits de ces personnes ! Dans la foulée, ces dernières voient leur droit à l’éducation, à l’emploi, à la santé, entre autres, être lésés. » Avec DAL, estime le religieux, « nous sommes dans une mouvance en vue de rectifier ces injustices ». Et d’ajouter : « Nous souhaitons construire un avenir solide et durable pour nos enfants Mauriciens, qui ont tous droit à un logement en sécurité et décent. »

Mauriciens solidaires !

À fin janvier 2021, DAL a pu aider 28 familles à être reconnues par la NHDC comme étant dûment éligibles. Les dépôts de 21 familles ont été payés à ce jour. Ceci touche un total de 52 personnes, dont 30 enfants. La somme contribuée s’élève à Rs 600 500, dont Rs 286 219 reçues du Concert Citoyen. Rappelons que plusieurs artistes locaux s’étaient réunis autour de la cause et qu’un concert gratuit avait été organisé l’an dernier pour lever des fonds afin de venir en aide aux familles en détresse. Et le reste de l’argent a été reçu des Mauriciens solidaires localement et de la diaspora.

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