Stephan Toussaint (ministre des Sports) : « Un processus continu avec comme objectif Paris 2024 »

Le ministre de la Jeunesse et des Sports, Stephan Toussaint, a présenté, il y a une semaine, le bilan de son ministère pour l’année 2018. Certes, celui qui s’est vu attribuer un marocain depuis moins de deux ans a parcouru du chemin. Dans l’entretien qui suit, il parle des JIOI, des JO de Paris 2024, et de la National Sports and Physical Activity Policy (NSPAP). Des réalisations qui traduisent la volonté du MJS de démocratiser le sport à Maurice.

- Publicité -

Stephan Toussaint, vous avez présenté il y a quelques jours le bilan de l’année. Vous avez par la même occasion cassé les codes. Quelles en sont les raisons ?

L’idée est de donner à la population mauricienne une autre vision du MJS. Gérer un ministère n’est pas un one-man show. Au contraire ! Le ministre est là, il apporte des idées. Mais derrière, c’est toute une équipe qui travaille. C’est leur retourner l’honneur de venir présenter les bilans des différents départements. C’est une façon de les valoriser et de leur faire confiance aussi.

Pourtant, certains ne semblaient pas à l’aise dans cet exercice…

Oui, il faut l’admettre. Ils sont très bons en gestion. Mais cet exercice est nouveau pour eux. Mais c’est aussi ça le travail. C’est d’interagir avec le public, sortir de leur zone de confort. C’est important.

En parlant d’interaction, il existe cette perception que les fonctionnaires sont un peu lents, avec le cas des Mahebourg Flippers récemment. Quelles sont les mesures prises au niveau du MJS pour effacer cette perception ?

Cette perception existe, en effet. Mais les fonctionnaires doivent respecter tout une procédure. Personnellement, je pensais la même chose. Mais maintenant que j’y suis, je comprends que ce système de dossier est très important. Tout le monde doit justifier chaque sou dépensé à travers le bureau de l’Audit. Mais il faut aussi reconnaître que très souvent, les athlètes, les clubs ou les autres entités ne donnent pas tous les renseignements à temps. C’est ce qui retarde la procédure.
Avez-vous des exemples à citer ?

Oui. A l’heure où je vous parle, il existe un comité régional de football qui n’a pas encore soumis ses documents. Résultat : tous les autres ont reçu, eux non. Quand on demande des documents, ce sont, en fait, les comptes audités. Si c’est un club de sport, ses dirigeants doivent prouver qu’ils sont dûment enregistrés. Tout cela fait partie de la bonne gouvernance.

Justement, à ce chapître, existe-t-il des paramètres pour que la bonne gouvernance ne soit pas que des mots ?

Il y a des réunions d’explications avec les dirigeants de fédérations, où les officiers expliquent les procédures pour pouvoir bénéficier de l’aide du MJS. Les officiers appellent les représentants fédéraux, et aident les fédérations à travailler leurs plans. Récemment, les fédérations ont été appelées à présenter un plan sur quatre ans. Les deux parties collaborent, et c’est dans ce sens que les fédérations, les clubs et même les athlètes sont appelés à travailler sur la bonne gouvernance.

Venons-en au football. L’un des faits marquants aura été la nomination d’Ackbar Patel à la tête du Club M. Est-ce une décision unilatérale du MJS ?

Le MJS n’a pas pris cette décision seul. Il y a eu des consultations faites avec la Mauritius Football Association (MFA). Depuis le temps, je pense que ma façon de fonctionner est claire : je demande toujours aux parties concernées de s’asseoir autour d’une table afin de voir quelles sont les meilleures options pour les sportifs.

Donc, le cas du football n’échappe pas à la règle ?

Dans ce cas précis, je crois que l’annonce de la nomination de M. Patel a été bien accueillie. J’ai vu des choses positives dans ce sens. M. Patel est un fils du sol, on connaît sa passion pour le football. Si on prend le temps de suivre son parcours, on ressent sa passion pour son métier. C’est très important d’avoir cette étincelle.

Pourtant, cela pourrait ressembler à de l’ingérence…


Il y a beaucoup de journalistes qui m’ont posé la question. Mais il y a eu beaucoup de réunions et de discussions pour arriver à ce résultat. Je suis aussi tenté de dire qu’on me reproche parfois de ne pas prendre des mesures. Finalement, quand j’en prends, ça devient de l’ingérence. Which is which ?

Mais comment est venue l’idée de nommer Ackbar Patel ?

Elle est venue de brainstorming avec les officiers. Nous en faisons beaucoup. Parfois autour d’une tasse de thé, dans le couloir, ou dans les activités. Maintenant, pour la décision de nommer M. Patel. Il a été unanime qu’il fallait avoir l’avis de la MFA pour sa nomination.

Le timing est-il le bon, surtout prenant en considération qu’en 2011, Ackbar Patel avait eu plus de temps pour travailler avec le Club M ? N’est-ce pas là une pression supplémentaire ?

Le timing est juste, à mon avis. Ni trop loin, ni trop près. Et puis, il n’y a pas que l’entraîneur qui apportera des résultats. Ce sont d’abord et surtout les joueurs. Nous avons des joueurs de qualité, avec des qualités physiques, techniques, intellectuelles. L’entraîneur, c’est celui qui va ramener le tout. Sa responsabilité sera de créer une famille. Donc, à six mois et demi, c’est tout à fait faisable.

Les fédérations se plaignent que la durée de contrat de leurs DTN respectifs est trop courte. Or, pour qu’ils puissent faire leur travail correctement, le minimum devrait être de quatre ans…

Les DTN que nous avons signés n’ont pas pour unique tâche de préparer les JIOI. Un DTN n’est pas un entraîneur national. Il est là pour chapeauter toute la discipline, tout son aspect technique, de la base à l’élite. Il est là pour créer une politique. Mais puisque les DTN que nous avons actuellement des compétences, nous nous servons d’eux pour les JIOI. Maintenant, pour la durée des contrats, c’est le système qui le veut. Mes conseillers ont des contrats de la même durée. A l’approche du terme de leur contrat, on va faire évaluation. Il ne faut pas oublier que nous visons les JO de Paris, en 2024. Et pour le moment, je suis satisfait de ce qu’ils font.

Parlons des JIOI, maintenant. Vous avez effectué une tournée des sites en rénovation. Où en sommes-nous ? Etes-vous satisfaits de ce que vous avez constaté ?


D’abord, je dois dire que le cyclone Cilida est passé loin de nous. Vous imaginez le retard que les choses auraient pu prendre ? Maintenant, d’après les responsables d’entreprises chargées des rénovations, nous sommes dans les temps. Ils sont en train de respecter les délais imposés. Sauf cas de force majeur, comme un cyclone, nous sommes dans les temps.

Même le chantier de Côte d’Or ?


Ce chantier avance très bien. On a décidé de trouver un moment pour faire une tournée à Côte d’Or comme on a fait pour les autres sites. J’ai des rapports réguliers avec MMIL, j’y vais de temps en temps. J’espère que certaines choses seront prêtes pour les JIOI.

Avez-vous un plan B au cas où le complexe de Côte d’Or ne serait pas prêt pour juillet prochain ?


Arrêtez avec vos plans B ! Ce n’est ni plan A, ni plan B. Je ne sais pas comment l’expliquer. Pour comprendre, il faut refaire le timeline. Quand on reçoit les JIOI, je n’étais pas encore ministre. C’était mon ami Yogida Sawmynaden qui a mis toute la machinerie en place. Il y a eu l’Association of Upgrading of IOIG Infrastructure. Tout comme en 2003, tout se met en place. On commence à parler de rénovation des infrastructures.

Entretemps, le Premier ministre, en contact avec la Chine, a l’idée de construire un complexe sportif pour l’avenir du sport de Maurice, pas seulement pour les JIOI. Ce qui veut dire que nous avions déjà nos projets et Côte d’Or est arrivé entretemps. Si le complexe de Côte d’Or est prêt, il sera utilisé pour les Jeux. Mais il a été construit pour faire partie du sports hub de Maurice.

Sports hub, ça rappelle quelque chose qui avait pour nom l’INS (Institut national du Sport), cité il y a quelques années. Même idée, même concept ?


Pour le moment, il y a Portas, qui a travaillé sur notre National Sports and Physical Activity Policy (NSPAP). Cette policy parle de sport pour tous, mais aussi d’élite. Il s’agit de développer le sport d’élite, faire que Maurice puisse briller sur les compétitions internationales, mais aussi abriter des compétitions internationales. Le complexe de Côte d’Or pourrait amener cet aspect.

Après les équipes de football, les clubs des autres disciplines collectives ont touché des chèques du MJS. Rs 100 00, c’est le strict minimum…
 

Je suis entièrement d’accord avec ce que vous avancez. Mais aujourd’hui, je lance un challenge aux fédérations sportives et aux clubs. Faites des efforts, et le MJS en fera aussi.

Parlons des JIOI. Vous avez annoncé un évènement chaque mois en amont des Jeux. Pouvez-vous nous en dire plus ?


Nous voulons célébrer les Jeux chaque mois. De ce fait, autour de chaque 19 de chaque mois, nous organiserons un évènement populaire, où le public pourra découvrir les athlètes, les Jeux, les disciplines. Il n’y a rien de finalisé.

Ressentez-vous l’engouement autour des Jeux ? La population arrive-t-elle à s’approprier les Jeux ?

Il y un éveil. Il n’y a pas un Mauricien qui n’est pas au courant de la tenue des Jeux l’année prochaine. Je pense que nous avons su passer l’info autour. Tout a été une question de timing. Mais à partir de janvier, nous allons faire de sorte que les Mauriciens s’approprient vraiment les Jeux.

Quel serait le nombre de médailles qui vous ferait satisfaction pour les JIOI ?

En règle générale, Maurice a toujours tourné autour de 60 médailles d’or. Chaque fédération travaille pour le maximum de médailles. L’objectif serait de toucher entre 80 et 100 médailles.

Et si l’on devait chiffrer les médailles, on atteindrait quel total ?


C’est assez difficile. Certaines fédérations font preuve d’excès de confiance. D’autres préfèrent être prudentes. Mais avec ce que nous avons fait, avec les repas, les vitamines, les suppléments pour les athlètes depuis ces deux dernières années, le nombre de 80 médailles est parfaitement jouable.

Le tennis de table pourrait être retiré des Jeux l’année prochaine…

C’est une question réglée. Il s’agit d‘une mauvaise communication autour de la marque du flooring. Rien de plus.

2018 a toutefois été terne, avec le scandale aux Jeux du Commonwealth. En tant que ministre, quel a été votre ressenti ?

Dès que j’ai été informé de la situation, j’ai donné tout mon soutien à l’athlète. Je lance un appel à toutes les personnes concernées dans le monde du sport pour que ce genre d’incident ne se reproduise plus. Cela a entaché l’image de Maurice. Veillons à ne pas salir l’image du pays à travers des actes irréfléchis.

2018 a aussi vu la naissance du NSPAP, un projet que vous avez évoqué peu après votre nomination. Quelle est votre appréciation de l’évolution du projet ?

Le but de cette politique est de permettre à tous les Mauriciens de pratiquer un sport. Le rapport de Portas spécifie combien de personne sont touchées par les maladies cardiovasculaires. Pour répondre à votre question, je dirais qu’il fait son petit chemin. Les walking clubs ont connu une certaine popularité. Près de 300 inscrits en deux mois, alors que le Mauritius Sports Council assure la formation de coaches. Les walking clubs vont s’étendre sur le pays après une base pilote. Le plus gros travail sera d’encourager les gens à faire du sport malgré les contraintes quotidiennes.

Abordons maintenant l’année 2019. De quoi sera-t-elle fait ?


A 100% des JIOI ! Ce sera exclusivement consacré aux Jeux ! Mais ce sera aussi le suivi de Paris 2024. C’est clair que nous avons deux potentiels représentants, avec Terence (Saramandif) et Margaux (Koenig). On verra comment les aider, ce sera surtout financier. Je lance d’ailleurs un appel aux fédérations pour qu’elles identifient, chiffres à l’appui, les athlètes.

Et Tokyo 2020 dans tout ça ?


Nous utiliserons les JIOI et tout ce qui se passe autour pour préparer 2024. L’année prochaine, nous aurons les Jeux d’Afrique, ensuite, Tokyo 2020, les Jeux de la CJSOI, le JO de la Jeunesse en 2022. Tout cela ne sera qu’un tremplin pour les JO de 2024 !

Paris 2024 serait donc l’objectif ultime ?

Non ! On ne s’arrête jamais. Il fallait seulement mettre en place une date dans le temps. Pour moi, l’objectif est Paris 2024. Mais c’est un processus continu, qui ne doit s’arrêter sous aucun prétexte.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -