Sur les traces du dodo : Mare La Chaux au cœur de recherches archéologiques

  • Des marais, datant avant de ceux de Mare-aux-Songes, dont le plus vieux site fossilifère de l’ouest de l’OI, contiennent de nouveaux ossements, notamment du dodo, de tortues
    et de lézards géants
  • Des scientifiques de réputation internationale, dont Julian Hume du Natural History Museum de Londres, Delphine Angst, paléontologue française, Julia Heinen du Centre for Macroecology et Evolution du Danemark, devront approfondir l’analyse des ossements prélevés depuis une semaine
  •  Ces travaux archéologiques se déroulent sous la supervision de la National Heritage Fund

Le village de Mare La Chaux, plus particulièrement un terrain appartenant à la compagnie sucrière de Constance La Gaieté, est projeté au centre d’importantes recherches archéologiques. Les conclusions des analyses des ossements d’animaux disparus, dont le fameux dodo, découverts sur ce site, devront lancer une nouvelle perspective, voire même une reconstruction de l’environnement où évoluait toute cette faune avant l’arrivée des premiers habitants sur l’île.

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Depuis plus d’une semaine déjà, une équipe de scientifiques et de chercheurs de réputation internationale, venant de France, du Danemark, de Grande-Bretagne et d’Espagne, était à pied d’œuvre à côté du terrain de football de ce village de l’Est pour recueillir des prélèvements sous la supervision des représentants du National Heritage Fund. À ce jour, les travaux de prélèvements ont été stoppés car les archéologues affirment disposer de suffisamment d’ossements à des fins d’analyses, et le site a été placé sous haute surveillance pour éviter tout pillage ou autre atteinte à l’intégrité des objets archéologiques d’une valeur inestimable.

Mine d’informations

Ce matin, Le Mauricien s’est rendu sur les lieux en compagnie d’Owen Griffiths, scientifique, pour une visite de ces marais, considérés comme « le plus vieux site fossilifère de l’ouest de l’océan Indien, après ceux de Madagascar et d’Aldabra ». Sur le site, l’on pouvait voir des ossements, notamment du dodo, de tortues géantes et de lézards géants d’une grande densité et diversité, de même que des graines de plantes fossilisées et des pollens, soit des éléments qui permettront aux chercheurs de reconstruire les forêts où habitaient ces animaux.

Dans les premières explications recueillies par Le Mauricien sur place, ces ossements constituent une « mine d’informations et de trouvailles de près de 12 000 ans qui permettra aux chercheurs d’étudier l’évolution des forêts au cours de toutes ces années, et d’étudier l’impact du changement climatique et de l’activité cyclonique ».

Parmi les scientifiques sur place se préparant pour la prochaine étape des analyses approfondies, l’on retrouve Delphine Angst, paléontologue renommée de France, Julia Heinen du Centre for Macroecology and Evolution du Danemark, Julian Hume du Natural History Museum de Londres, Erik de Boer du Spanish International Research Council de même que Jayshree Mungur-Medhi, Manager Technical Section du National Heritage Fund.

D’abord, comment le site de Mare La Chaux a-t-il été identifié? « C’est en se basant sur le descriptif de Dujardin en 1832 qui parlait d’un marais tellement rempli d’os d’animaux éteints qu’il suffisait de tremper la main dans l’eau pour les récupérer que ce groupe de chercheurs locaux et internationaux a fini par redécouvrir ce site en 2015. Une découverte qui a permis les premières fouilles. Un premier exercice d’une longue série », fait-on comprendre au Mauricien en guise de préambule.

À partir de là, des fouilles plus systématiques sur ce terrain couvrant un demi-arpent, faisant partie de la propriété de Constance furent entamées depuis 2016 avec des premiers ossements effectivement prélevés. La collaboration de scientifiques émérite fut sollicitée pour cette étape, qui a débuté au début de ce mois. À la question de savoir pourquoi autant d’ossements d’espèces disparues se trouvent dans cet endroit, Julian Hume, Head du Natural History Museum de Londres, apporte un premier élément de réponse. « Nous avons compris pourquoi il y a tous ces ossements. Car il y avait des marais où les animaux venaient s’abreuver », dira-t-il en s’appesantissant sur le fait que « ces marais de 12 000 ans représentent une plus grande découverte que Mare-aux-Songes ».

Julian Hume poursuivra que les travaux de fouille à Mare La Chaux ont permis de découvrir 600 ossements de deux espèces de tortues géantes, qui vivaient uniquement à Maurice. « Vous comprendrez que c’est une découverte des plus importantes. »

De son côté, Erik de Boer, paléo-écologiste du Spanish International Research Council de Barcelone, avance que « ces découvertes archéologiques vont aider à mieux comprendre et appréhender les Forest Dynamics de ces 12 000 ans ».

Mare-aux-Songes, le premier site de découverte des restes du Dodo

Depuis 2005, des fouilles effectuées à Mare-aux-Songes, à Maurice, ont révélé la présence d’un lit d’os fossile très riche, vieux de 4200 ans, comprenant des os et des fragments d’os de Dodo (Raphus cucullatus).  Mare-aux-Songes est situé dans le district de Grand Port, au sud-est de Maurice dans les environs de l’aéroport SSR.

Lors de la campagne d’extraction d’août 2010, des chercheurs mauriciens et étrangers ont recensé à Mare-aux-Songes (MAS) la présence d’ossements d’environ un demi-million d’animaux à un mètre en dessous du niveau de la terre. Cet assemblage de fossiles est dominé par deux espèces de tortues géantes (Cylindraspis triserrata et C. inepta), par le dodo Raphus cucullatus (environ 10 % des squelettes retrouvés), et 20 autres espèces de vertébrés. Les fruits, les insectes, les graines et végétaux fossilisés retrouvés permettent de reconstituer l’écosystème dans lequel vivaient ces vertébrés, et sa biodiversité avant la présence de l’homme. Au total, le site comporte les ossements de 500 000 vertébrés morts à la même période autour de -4000 ans, durant la période géologique de l’Holocène.

L’hydrologie de la région suggère que les dodos, comme beaucoup d’autres espèces, ont probablement été attirés à Mare-aux-Songes par la présence d’eau douce pendant les périodes de sécheresse. Cette diminution massive d’espèces serait, d’après les scientifiques, le résultat d’une sécheresse extrême.

Le paléontologue du Muséum d’histoire naturelle de Londres, Julian Hume a représenté cet écosystème de Mare-aux-Songes sous la forme d’un tableau.

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