TELFAIR SAGA | Décès de Soopramanien Kistnen – Sawmynaden navigue entre « jamais » et « faux » lors de son audition d’hier

  • L’ex-ministre avance avoir pris ses distances de Kaya Kistnen depuis juillet 2020, quand il a su qu’il fréquentait son frère, Khoumada Sawmynaden
  • Le colistier du PM au No 8 nie toute interférence dans l’allocation de contrats à Neetee Selec, compagnie de son amie d’enfance, Neeta Nuckchedd

L’ancien ministre du Commerce et colistier de Pravind Jugnauth au No 8 a navigué entre « jamais » et « faux » lors de son audition d’hier. Il a ainsi nié toute détérioration de ses relations avec Soopramanien Kistnen, aussi connu sous le nom de Kaya, avec qui il affirme avoir toujours été en bons termes, en plus de le dépanner financièrement quand il avait besoin d’argent. Il devait aussi démentir être derrière le décès suspect de l’agent du MSM au No 8 ou encore que son garde du corps avait eu une altercation avec Kaya Kistnen à son bureau deux mois avant ce fatidique vendredi 16 octobre 2020. L’ex-ministre devait toutefois tourner autour du pot concernant la dernière fois où il a rencontré son amie d’enfance, Neeta Nuckchedd, directrice de Neetee Selec, qui avait décroché un contrat pour la décontamination de son bureau, au ministère du Commerce.

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Yogida Sawmynaden a été catégorique lorsque le représentant du Directeur des poursuites publiques, Me Azam Neerooa, lui a demandé s’ils s’étaient déjà disputés, avec en réponse un : « Non, jamais ! ». À la question portant sur des menaces de dénonciations à l’Independent Commission Against Corruption (ICAC), il devait faire état des relations entre Kaya Kistnen et Khoumada Sawmynaden. « Au fait, une fois, Kistnen m’avait appelé pour me dire que Khoumada le cherchait près de mon bâtiment, à Port-Louis. Kistnen avait appris que Khoumada avait discuté avec un des locataires, qui lui avait répondu que Kistnen n’était pas ici. Khoumada avait alors, selon les dires de Kistnen, insisté sur le fait qu’il le cherchait, car il lui devait de l’argent. Puis Khoumada avait appelé un inconnu pour lui dire : “To mars ar minis, to pou kone” », dit-il.

Il devait aussi faire part d’une conversation avec Kistnen, où ce dernier lui aurait lancé « Khoumada so problem zis twa » ou encore « ce qu’il veut, c’est m’utiliser pour t’avoir ». Kaya Kistnen aurait aussi dit à Yogida Sawmynaden qu’il avait emprunté de l’argent à Khoumada Sawmynaden, soit Rs 250 000, et qu’il devait lui rembourser Rs 200 000, « mais qu’il n’avait pas l’intention de lui rendre l’argent ».

L’ancien ministre du Commerce a aussi avancé qu’il savait que Kistnen avait une compagnie de construction, mais qu’il ne faisait que de le mettre en contact avec des proches qui avaient des travaux à entreprendre. Idem pour Neeta Nuckchedd et ses parents, chez qui Kistnen avait effectué des travaux. Pour Yogida Sawmynaden, « il n’a jamais été question de dire à ces personnes de prendre Kistnen pour les travaux ».

Proximité avec l’hôtesse de l’air

Les relations de Yogida Sawmynaden avec son amie d’enfance, Neeta Nuckchedd, ont aussi été évoquées. Confronté au témoignage de l’hôtesse de l’air sur la dernière fois où ils s’étaient rencontrés en personne, Yogida Sawmynaden s’est montré peu catégorique. Si Neeta Nuckhedd avait expliqué que leur dernière rencontre datait du jour des funérailles du père de Sawmynaden, soit depuis 2013, l’ex-ministre devait, lui, d’emblée s’adresser à la cour pour s’interroger sur la pertinence de cette question, demandant ainsi si ce n’est pas plutôt étaler sa vie privée devant une enquête judiciaire. La magistrate lui a toutefois demandé de répondre aux questions de Me Neerooa. Après avoir tergiversé sur ce que l’hôtesse de l’air comprend par le mot « rencontrer », Yogida Sawmynaden a fini par répondre qu’il se peut qu’il ait rencontré Neeta Nuckchedd à l’aéroport ou lors d’un vol. Il a toutefois admis qu’ils se parlaient souvent au téléphone.

Me Neerooa devait alors présenter des documents du Passeport and Immigration Office pour confirmer que les deux amis d’enfance étaient sur le même vol en provenance de l’aéroport de Paris-Charles de Gaulle vers Maurice le 15 décembre 2019. Yogida Sawmynaden a confirmé ce fait, avançant qu’il était en mission officielle en France et qu’il ne savait pas que Neeta Nuckhedd y était. Il a aussi affirmé qu’il l’avait aperçue à bord du vol, car elle y travaillait.

À la question de savoir ce qu’il sait de Neetee Selec, Yogida Sawmynaden ajoute qu’il ne connaît pas la compagnie, car « nous ne parlons pas business ». Au sujet du contrat alloué à Neetee Selec pour la désinfection des bureaux du ministère du Commerce à Port-Louis pendant la crise sanitaire, en 2020, l’ancien ministre devait répondre : « C’est le management qui s’occupe des procédures pour le nettoyage ou le besoin de revoir des infrastructures, et non le ministère. Je n’ai pas mon mot à dire sur cela. » Il a aussi avancé qu’il n’avait aucune implication dans l’allocation du contrat par la State Trading Corporation pour désinfecter les bureaux et véhicules.

Yogida Sawmynaden a également soutenu qu’il ne savait pas que Neetee Selec avait décroché un contrat avec Mammouth pour la désinfection de ses locaux à travers l’île, même s’il a confirmé à Me Neerooa qu’il a bien un terrain à Bambous qu’il loue à cette même compagnie pour opérer un salon d’exposition.

Le colistier du Premier ministre a alors été confronté aux témoignages de Simla Kistnen au sujet des contrats qu’il avait promis à Kaya Kistnen, mais en vain.

Azam Neerooa (AN) : Mme Kistnen a évoqué que vous aviez promis à son mari un contrat de nettoyage ? Est-ce vrai ?

Sawmynaden (YS) : Je ne suis pas au courant.

AN : D’après elle, une dispute a éclaté entre vous et Kistnen à propos de ce contrat de nettoyage ?

YS : Jamais.

AN : Avez-vous déjà eu des problèmes avec Kistnen à votre bureau ?

YS : Jamais eu de problème, que ce soit à mon bureau ou ailleurs.

AN : Est-ce que Kistnen, après une dispute à votre bureau, a déjà adressé ces mots : « Prie mo mor, sinon to pou grene kouma zanbalak ? »

YS : Jamais aucune dispute, vous pouvez aller vérifier avec ceux qui travaillaient avec moi.

AN : D’après Mme Kistnen, vous vous êtes disputés en juillet 2020, et aussi deux semaines avant sa mort concernant ledit contrat…

YS : Ce dont je me souviens, c’est qu’il m’avait dit qu’il avait eu une dispute avec son épouse à cause de quelque chose que Khoumada Sawmynaden aurait dit à son épouse et qu’elle n’aurait pas apprécié, mais qu’elle n’a pas voulu lui révéler.

AN : Et si Simla Kistnen a dit dans son témoignage qu’elle soupçonne que vous êtes derrière la mort de son époux ?

YS : Cette déclaration est fausse.

Yogida Sawmynaden devait par la suite réfuter les déclarations des témoins Parsuramen Arian et Govinden Kistnen, respectivement l’ami et le frère de la victime, du fait que ses relations avec Kistnen s’étaient détériorées. Il devait plutôt ajouter qu’il avait pris ses distances avec Kistnen depuis juillet 2020 quand il avait appris que ce dernier fréquentait Khoumada Sawmynaden, mais qu’ils continuaient à se parler et à se rencontrer.

Au sujet de l’épisode relaté par le neveu de Kistnen, Nishaye Boodhooa, à l’effet que son garde du corps avait eu une altercation avec Kistnen deux mois avant sa mort, en le poussant hors de son bureau, Yogida Sawmynaden a répondu que « c’est complètement faux ». Il devait aussi nier avoir été au centre des négociations pour remettre la somme de Rs 14 M en trois parties à Kistnen, à partir du 16 octobre 2020. Il a également nié avoir interféré pour que Kistnen décroche un contrat avec la compagnie Clear Ocean Hotel and Resort Ltd, dirigée par Rocky Boodhoo, pour placer des barrages. Et d’ajouter que Kistnen ne lui avait jamais parlé de Nishaye Boodhooa et qu’il lui disait tout à propos de ces contrats.

L’ancien ministre du Commerce a aussi préféré jeter le doute sur la crédibilité du témoignage de Nasoorlakhan Jhumon, ami de longue date de Kistnen. Si ce dernier avait soutenu que Yogida Sawmynaden se moquait de Kistnen, il se dit « surpris », car « Kistnen me disait tout le temps que cet homme était la dernière personne à écouter et à qui faire confiance » .

Yogida Sawmynaden a aussi démenti les propos de Nasoorlakhan Jhumon à l’effet que c’était lui qui avait demandé à Kistnen de faire une offre bien au-dessus de ce qui était recommandé pour un contrat offert par la STC, que Neetee Selec avait alors décroché. Si Yogida Sawmynaden a admis connaître Jonathan Ramasamy, ex-general manager de la STC, et que Vinay Appanna était son ami d’enfance, avec qui il a toujours de bonnes relations, il a soutenu qu’il n’avait su que Jonathan Ramasamy était le beau-frère de Vinay Appanna que bien après sa nomination à ces fonctions.

Il a aussi été confronté au témoignage de Pooveden Subbaroyan, partenaire d’affaires de Soopramanien Kistnen.

AN : Pooveden Subbaroyan a dit que c’est vous qui avez introduit Kistnen auprès de Vinay Appanna et Deepak Bonomally, celui avec qui il allait obtenir de l’emploi comme sous-contracteur. Est-ce vrai ?

YS : C’est faux.

AN : Ce témoin est venu dire que Kistnen lui avait confié que vous l’utilisiez et qu’il allait vous dénoncer à l’ICAC. Qu’avez-vous à dire ?

YS : C’est faux.

AN : Ce témoin a dit que Kistnen était proche de vous et que vous le financiez…

YS : Oui, je l’aidais. Toutefois, je tiens à dire que Kistnen ne m’avait jamais informé qu’il avait un ami ou un partenaire en affaires qui s’appelait Pooveden Subbaroyan.

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