Le SP Dawon réitère qu’il n’y a à ce jour aucune image de l’agent du MSM du No 8 à La Louise le 16 octobre dernier, jour de sa disparition
Le Premier ministre, Pravind Jugnauth, ne sera pas convoqué pour déposer en tant que témoin dans l’enquête judiciaire sur le meurtre de l’agent du MSM du No 8, Soopramanien Kistnen, à Telfair le 16 octobre 2020. C’est ce qu’a décidé, hier, la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnauth siégeant au tribunal de Moka suite à une motion de Me Rama Valayden. D’autre part, le surintendant de police (SP) Vijay Kumar Dawon a été appelé de nouveau à la barre des témoins pour satisfaire les exigences de la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnuth quant à toutes les caméras qu’il aurait pu trouver à proximité d’Intermart à La Louise. Ce dernier devait avancer qu’il n’a pu retracer d’enregistrements de caméras privées de vidéosurveillance car les images vidéo sont stockées entre 15 et 30 jours après l’enregistrement. Il devait aussi ajouter que lors de cet exercice effectué par le constable Abeeram du Control Room de Safe City Network, aucune Guest House n’avait été identifiée dans les environs. Un autre point saillant de la séance d’hier a été l’audition du constable Norbert Manoovaloo de la Major Crime Investigation Team au sujet des contrats de plus de Rs 300 millions alloués à Bo Digital Co Ltd pour l’acquisition d’équipements médicaux pendant le confinement sanitaire de COVID-19.
La fameuse ‘Guest House’, qui appartiendrait à Vinay Appanah, connu aussi comme Rudy, avait été mise sous les feux des projecteurs depuis le début de l’enquête judiciaire. Or, le surintendant de police Vijay Kumar Dawon est venu affirmer en Cour que lors de l’exercice de recherche par la police à la requête de la magistrate, aucune Guest House n’avait été identifiée dans les alentours de La-Louise à Quatre-Bornes. Dans un premier temps, le surintendant de police a été interrogé sur les caméras de Safe City Network et autres caméras privées de la région. Il a avancé que treize propriétaires de caméras privées de vidéosurveillance interrogés ont soutenu que les images sont stockées entre 15 et 30 jours après l’enregistrement – et qu’il n’a donc rien pu trouver vu le laps de temps écoulé.
Quant à la Guest House même sur laquelle il devait effectuer des recherches, le surintendant devait répondre qu’aucune n’a été identifiée et qu’il n’était pas au courant qu’il y en avait une dans les alentours. Au sujet des caméras Safe City à proximité du marché de Quatre-Bornes, il a affirmé qu’elles étaient opérationnelles le 16 octobre dernier mais qu’il n’y avait pas d’enregistrements. La magistrate lui a alors demandé de revenir après un nouvel exercice pour identifier et noter le nom de toutes les Guest Houses relevées à La Louise ; aussi, de chercher et essayer de retracer tous les enregistrements vidéo des magasins et boutiques à proximité, dont ceux du supermarché. Le surintendant a aussi été interrogé sur les caméras disponibles sur le trajet qu’avait effectué l’activiste MSM le 16 octobre. Il a répondu que cinq caméras privées se trouvaient près de Telfair, Moka, et même son de cloche du côté des propriétaires ; les images sont stockées pendant pas moins de 30 jours.
Interrogé par Me Roshi Bhadain, le surintendant Dawon a confirmé qu’il n’y avait aucune image du défunt Soopramanien à La-Louise le 16 octobre après avoir été aperçu pour la dernière fois prenant un bus sortant de Rose-Hill pour se diriger vers Quatre-Bornes. Il a ensuite été interrogé sur ses recherches auprès du magasin Jaulim Plaza à La Louise, qui se trouverait vis-à-vis de la Guest House en question. Le SP Dawon devait répondre dans un premier temps qu’un anonyme avait indiqué au constable Abeeram que les caméras du magasin « venaient d’être installées », ne pouvant affirmer s’il s’agit là d’anciennes caméras remplacées par de nouvelles. Me Bhadain faisait aussi état d’une boutique où Soopramanien Kistnen aurait fait un Top-Up de sa connexion internet sur son téléphone portable ce jour-là. Le SP Dawon a été appelé à vérifier s’il y a des caméras à cet endroit précis.
Contrats pour Bo Digital Co Ltd
Le constable Norbert Manoovaloo de la Major Crime Investigation Team (MCIT) avait ensuite été appelé pour soumettre des documents obtenus de la State Trading Corporation (STC). Il devait alors procéder à un historique des contrats perçus par Bo Digital Co Ltd, gérée par Deepak Bonomally. Le témoin a expliqué, documents à l’appui, que la firme Final Cleaning Ltd, dont Soopramanien Kistnen était actionnaire, avait fait une offre pour un contrat de nettoyage de bureaux, le 5 mai 2020. C’est toutefois une autre compagnie qui avait raflé la mise, soit Nitee Select.
Bo Digital Co Ltd entre en scène lors de l’Emergency Procurement pour l’achat d’équipements médicaux lors du confinement sanitaire. Le constable Manoovaloo d’indiquer que Bo Digital Co Ltd, engagée dans la publicité, avait décroché au total cinq contrats, dont deux à Rs 129 millions et Rs 142,5 M, pendant le confinement, pour la fourniture de masques, entre autres. Des contrats d’une valeur totale de Rs 308 495 400. Le constable d’ajouter un autre contrat pour Bo Digital Co Ltd, à Rs 9 853 000, sous l’Emergency Procurement, approuvé le 8 juin 2020, pour l’acquisition d’équipements médicaux.
Me Bhadain a confronté le constable Manoovaloo à des noms proches de l’axe Appanah-Bonomally-Sawmynaden dans le cadre de contrats alloués par la STC à des compagnies gérées par Deepak Bonomally et Rudy Appanah, avec les noms des compagnies tel Mavericks Advertising, gérée par Century Advertising Co Ltd, ou AV Techno-World Co Ltd, voire encore BCA Consulting, qui en ressortent, avec comme actionnaires et directeurs des proches de Rudy Appanah, donc aussi proches du General Manager de la STC, Jonathan Ramasamy. Des compagnies dont l’adresse est enregistrée à La Louise, Quatre-Bornes. Le constable devait répondre que l’enquête n’a pas encore atteint ce stade.
Par ailleurs, interrogé sur l’investigation concernant les allégations d’emploi fictif en relation avec la veuve de Soopramanien Kistnen, le policier a indiqué que selon les rapports de l’Assemblée nationale, « Madame Kistnen était bien enregistrée en tant que Constituency Clerk du ministre Yogida Sawmynaden ». Il a aussi été appelé à divulguer des informations sur les relevés bancaires de Soopramanien Kistnen ainsi que celles de sa compagnie Rainbow Construction. Le constable a pu fournir les relevés bancaires du défunt auprès de cinq banques. Il a indiqué que la compagnie Rainbow Construction n’avait qu’un unique compte bancaire, à la Maubank.
A ce titre, le témoin a promis de revenir en Cour aujourd’hui pour faire état des détails sur ces transactions bancaires suite à une remarque en substance de la magistrate à l’effet que « de gros montants ont été payés à certaines personnes de manière répétitive. Je veux savoir qui sont ces bénéficiaires et pourquoi ».
À noter que la magistrate devait rejeter à ce stade la motion de Me Rama Valayden en vue d’appeler le Premier ministre Pravind Jugnauth pour être entendu dans l’enquête judiciaire. Elle devait rappeler que le DPP est celui qui dresse la liste des témoins et que les avocats « ont pour unique but de protéger les intérêts des personnes qu’ils représentent et non pas de mener une enquête par eux-mêmes ».
En début de séance, la magistrate est intervenue pour souligner que «there is a need to preserve the sanctity of a court in a judicial enquiry. Lawyers have to refrain to do statement to media in premises of court. I invite the media to report responsibly. Recording deposition witnesses is compromised due to extensive reporting by media. Difficult to distinguish witnesses who give their version or what they read in newspapers before deponing.»
« KAYA » VU POUR LA DERNIÈRE FOIS
Un témoin : « Li ti zovial ek li ti paret normal »
La reprise de l’enquête judiciaire a aussi été marquée par l’audition de trois autres témoins, à savoir deux amis de l’activiste orange, Seeneevassen Legrand et Rouben Sooriah. Rajivsingh Pedoo, caissier dans la maison de jeu Tote Lepep, était, lui, une des dernières personnes à avoir vu Soopramanien (« Kaya ») Kistnen dans l’après-midi du 16 octobre 2020.
En cour, il a expliqué que le défunt « était un fidèle client » et qu’ils avaient l’habitude de se voir et de discuter lorsque le défunt venait parier sur des matches de football. Et le témoin d’expliquer ainsi qu’il avait vu Kistnen le 16 octobre « peu avant deux heures » lorsqu’il est venu à la maison de jeu à Quatre-Bornes. Selon lui, le défunt « ti korek, li ti pe koze, rye, pa ti paret ena problem. Li ti mem dir mwa li fek fer operasyon ek ki li sorti lopital ». Le témoin a mis en exergue qu’il n’avait pas vu dans quelle direction le défunt partait lorsqu’il est sorti de la succursale.
L’ami d’enfance de Soopramanien Kistnen, Seeneevassen Legrand, a quant à lui réitéré en cour que le défunt ne lui racontait pas toutes les ‘transactions’ qu’il faisait, même s’il était souvent son chauffeur. « So bann zafer mo pa ti kone, mo ti pe zis amenn li 1-2 plas ».
Interrogé sur le lieu où il se trouvait le 16 octobre 2020, il devait avancer qu’au matin il s’était rendu chez le dénommé Sivom Arian puis avait récupéré son frère à l’hôpital pour l’emmener faire un ‘massage’. Chandranan Sooriah, aussi connu comme Rouben, autre bon ami du défunt, était, lui, peintre de profession et obtenait du travail de temps en temps de l’activiste orange. Il devait expliquer qu’il avait coutume de récupérer Soopramanien chez lui tôt le matin en voiture pour l’emmener à un centre de jeunesse à Helvétia où travaille Seeneevassen Legrand, à la requête de Soopramanien Kistnen. Et d’indiquer que le 16 octobre dernier il avait bien pris « Kaya » chez lui avant 6h30 pour le déposer à Helvétia. Ce jour-là, il explique qu’il s’était rendu à Vallée-des-Prêtres puis à Rose-Belle. Il avait tenté par la suite de contacter le défunt pour lui demander s’il pouvait lui proposer les services d’un maçon pour des travaux mais ne devait obtenir aucune réponse depuis.