TIRS CROISÉS : Le rôle des parents dans l’éducation ?

Dans la réussite d’un enfant, il y a toujours les sacrifices des parents derrière. La nouvelle cuvée de lauréats, rendue publique la semaine dernière, a démontré une nouvelle fois que les enfants réussissent mieux, quand ils sont bien encadrés. Nandanee Mulloo et Steven Chung Pin Yong, lauréats 2019, témoignent de leurs expériences. Waheeda Thug, enseignante au collège Royal de Port-Louis, et Kavita Sahye ont des profils différents, mais sont toutes deux parents de lauréats. Amorie Léa Permal, de Residence Vallijee, classée 4e en Arts Side, a pu compter sur l’encadrement de ses parents, enseignante au primaire et employé de banque, pour réussir. Girish Bawoohany, du collège New Eton, classé 6e dans la filière technique, a lui, puisé sa motivation des sacrifices de ses parents, employé d’usine et mère au foyer. Preety Ramjuttun, éducatrice au collège Adolphe de Plevitz SSS à Grand Baie et Preetam Mohitram, vice-président de l’Union of Rectors and Deputy Rectors of State Secondary Schools donnent aussi leurs avis sur le sujet.

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AMORIE LÉA PERMAL (Classée 4e en Arts Side) : « Le soutien émotionnel et moral 
est aussi très important »

Quel a été le rôle de vos parents dans votre succès ?

Ma maman est enseignante au primaire. Depuis que je suis petite, elle m’a toujours accompagnée, en s’assurant, notamment, que je fasse mes devoirs. Elle a toujours insisté sur l’importance de l’éducation. Cela a été un conditionnement depuis le primaire : il fallait travailler dur. Ma mère, dans l’après-midi, quand elle terminait avec ses élèves à l’école, continuait le travail avec moi à la maison. Quand je suis entrée au collège, cela a été un peu différent, étant donné que j’avais de nouvelles matières. Mais ma maman et mon papa, qui, lui, travaille à la banque MCB, m’ont toujours soutenue afin que je donne le meilleur de moi-même. J’ai pu travailler dur parce que c’était déjà inculqué en moi depuis toute petite. Aujourd’hui, je suis très “grateful” envers eux.

Pourquoi le soutien des parents est-il important ?

Comme je l’ai dit, à un certain moment, mes parents ne pouvaient plus me suivre au niveau des devoirs, car c’était un autre niveau. Toutefois, ils ont été présents pour m’encourager, pour m’encadrer. Le soutien émotionnel et moral, c’est aussi très important. Sans oublier qu’ils me donnaient les moyens financiers nécessaires en payant mes leçons. Quand je travaillais jusqu’à tard dans la nuit, ils étaient là, pour m’encourager. Pour les “mock exams”, je n’avais pas eu les résultats auxquels je m’attendais, mais ils m’ont encouragée quand même. Après la proclamation des résultats, quand nous avons appris que j’étais classée tout juste derrière les lauréates, ils m’ont encore encouragée. Ils m’ont dit que ce n’était pas grave et que j’étais leur lauréate.

Quel est votre message aux parents en général ?

Je dirais aux parents d’être présents à chaque étape de l’éducation de leurs enfants. Même quand on est à l’université, on a toujours besoin du soutien de ses parents. Ce n’est pas facile pour un étudiant de se retrouver seul au monde. L’encadrement des parents est important. Et comme je l’ai dit, on a toujours besoin d’un soutien émotionnel et moral.


NANDANEE MULLOO (Lauréate – filière scientifique) : « Toujours croire dans le potentiel 
de ses enfants »

Quel a été le rôle de vos parents dans votre succès ?

Pendant mes études, mes parents m’ont apporté toute l’aide financière nécessaire pour les leçons particulières, et même pour le transport. Étant donné que j’habite à Plaine-Magnien, je devais souvent faire de longs trajets en autobus. Ils m’ont aussi donné tout le soutien émotionnel dont j’avais besoin. Je pouvais leur parler de n’importe quoi, ils étaient toujours à l’écoute et prêts à m’aider. Comme ils étaient très ouverts d’esprit, je pouvais tout leur dire et ils m’ont ainsi permis d’avoir tout le temps dont j’avais besoin pour pouvoir étudier. Mes parents ont été très présents comme soutien émotionnel et matériel. Je n’ai pas à me plaindre.

Pourquoi le soutien des parents est-il important ?

Il est essentiel que les parents soient toujours présents émotionnellement, surtout pendant la période des examens où l’enfant aura besoin de beaucoup de soutien pour surmonter les obstacles. C’est aussi grâce à la pression des parents que, d’une certaine façon, nous voulons toujours nous améliorer et nous démarquer, car si jamais les parents délaissent leurs enfants, ces derniers ont tendance à être plus distraits et ils mettent ainsi leur objectif de côté.

Quel est votre message aux parents en général ?

Mon message pour les parents est de ne jamais perdre confiance en leurs enfants, peu importe le choix de carrière qu’ils décident de faire. Il faut toujours croire en leurs rêves et les soutenir. Il arrive que les enfants échouent quelques fois, mais il faut toujours garder en tête qu’ils vont s’améliorer et donc, ne jamais perdre espoir. L’essentiel est de ne jamais baisser les bras, toujours croire dans le potentiel de ses enfants et leur apporter tout le soutien possible, que ce soit émotionnellement ou financièrement, pour qu’ils ne perdent jamais confiance en eux. Il faut être à l’écoute de ses enfants, de leurs sentiments, car des fois, c’est entre parents et enfants que la communication est plus compliquée.


Kavita Sahye (mère de Nainika, lauréate) : « Ne jamais baisser les bras »

Comment avez-vous accompagné votre fille pendant ses études ?

En fait, depuis qu’elle est petite, ma fille Nainika a toujours tout fait toute seule. Vous savez, je n’ai pas réussi ma sixième et je ne sais pas lire. Son père, Beepin, qui a été au collège jusqu’à la Form 2 l’a accompagné un peu, au primaire. Mais la plupart du temps, elle se débrouillait toute seule. Elle était appliquée. On n’avait pas à être derrière elle pour faire les devoirs, par exemple. En revanche, nous avons été là pour lui donner tous les moyens nécessaires pour qu’elle réussisse. Je travaille comme agent de sécurité. Mon époux, a cumulé deux boulots : à l’Environnement le matin, et gardien de sécurité le soir, afin de pouvoir payer ses leçons particulières.

On dit que les parents les plus aisés donnent les meilleurs moyens à leurs enfants. Qu’en pensez-vous ?

Je ne partage pas cet avis. Tout dépend de l’enfant. Il y a des parents qui peuvent tout donner à leurs enfants, mais ceux-ci ne travaillent pas pour autant. Comme je vous l’ai dit, mon époux et moi nous n’avons pas de grande éducation, mais notre enfant est lauréate. D’autres ont donné tout ce qu’ils pouvaient, mais leurs enfants ne sont pas lauréats pour autant. Après les résultats, il y a beaucoup de personnes qui viennent me demander les coordonnés de ses professeurs de leçons. Mais il faut aussi avoir en tête que tous les enfants ne sont pas pareils. Moi-même j’ai trois filles et elles sont différentes. Nainika était motivée. Elle voulait faire des études à l’étranger et elle savait que le seul moyen d’y parvenir était de décrocher une bourse, car nous n’en avions pas les moyens.

Que conseillez-vous aux parents ?

Encouragez toujours vos enfants dans tout ce qu’ils entreprennent. Ne baissez pas les bras, malgré les difficultés. L’année dernière ma fille avait terminé 21e et elle a décidé, d’elle-même, de refaire. Nous, nous avons été là pour lui donner le soutien nécessaire.


Waheeda Thug (enseignante et mère de Zakeeyah, lauréate) : « Les parents doivent faire leur part du travail »

Comment avez-vous accompagné votre fille Zakeeyah pendant ses études ?

Depuis son jeune âge, j’avais remarqué que ma fille était brillante. Elle arrivait à bien capter les choses. Étant dans l’enseignement, j’ai réalisé qu’elle avait du potentiel. J’ai commencé à lui faire la lecture très tôt. Nous, parents, mettons l’accent sur l’éducation, car cela permet d’avoir une ouverture pour plus tard. Zakeeyah était à l’école primaire Philippe Rivalland. Elle a eu la chance d’avoir de bons profs. En tant que parents, nous avons donné l’encadrement nécessaire derrière. Par exemple, on l’a inscrite à la bibliothèque, on achetait des magazines régulièrement. La lecture est une culture qu’elle a gardée. Elle aime bien les langues jusqu’à maintenant. C’est pour cela que c’est important de donner les bonnes bases.

C’est plus facile d’accompagner son enfant quand on a les moyens ?

Pas nécessairement. Étant enseignante, je connais des enfants venant de familles modestes qui ont eu tout le soutien de leurs parents. J’ai vu aussi des parents donner tous les moyens, mais ils ne faisaient pas le suivi. L’enfant doit aimer étudier de lui-même, peu importe son milieu. Je conseille toujours aux jeunes de faire au mieux de leurs possibilités. L’année dernière, Zakeeyah était classée 8e, mais elle m’a dit qu’elle voulait refaire. Moi, comme parent, je l’ai soutenue, même s’il fallait payer les frais d’examens. Je dois aussi dire que j’ai eu la chance d’avoir mes collègues qui lui ont donné des leçons particulières et l’ont accompagné comme leurs propres enfants. Mais je dois reconnaître que pour d’autres parents, il y a beaucoup de sacrifices à faire, pour payer les leçons notamment.

Quel est votre message aux parents ?

Je leur dirais de ne jamais sous-estimer leurs enfants. Il faut toujours les encourager à faire mieux. Il faut aussi prendre en considération que tous les enfants ne sont pas pareils. Chacun a ses qualités, ses aptitudes. Il fait savoir les apprécier et les valoriser. Les parents doivent faire leur part du travail et ne pas laisser l’enfant seul avec les profs. Les parents doivent aussi être à l’écoute de leurs enfants et comprendre ses petits soucis.


PREETAM MOHITRAM (vice-président, Union des Recteurs) :« L’enfant a besoin de la 
reconnaissance parentale »

Pourquoi les parents doivent-ils accompagner leurs enfants pendant les études ?

La présence parentale est très importante pour un enfant, y compris pendant ses études. Même si les parents ne vont pas aider l’enfant à faire ses devoirs, le fait qu’ils soient là motive les enfants. Les psychologues disent que l’enfant, qui a besoin d’amour, trouve la satisfaction dans la reconnaissance parentale. Souvent, lorsque les enfants deviennent grands, les parents croient qu’ils peuvent se débrouiller seuls. C’est une erreur. Ils ont besoin d’être soutenus en permanence. L’école est un environnement professionnel. Les enseignants ont un programme établi et des horaires définis, même si quelques-uns font plus que cela. On a besoin des parents pour compléter l’encadrement. Cela peut aussi être une sœur, un frère, qui apporte le soutien émotionnel nécessaire au progrès de l’enfant.

On dit que les parents, qui ont le plus de moyens, donnent les meilleures chances à leurs enfants. Partagez-vous cet avis ?

C’est très relatif. Il y a pas mal de contre-exemples où un enfant d’un milieu modeste réussit un parcours exceptionnel. Mais il est aussi vrai que les enfants issus de familles aisées ont une variété de supports pédagogiques à leur disposition. Il en est de même pour le milieu social où il évolue. Ne serait-ce qu’un journal peut faire la différence. Si une famille n’a pas de moyens pour acheter le journal, comment son enfant sera-t-il au courant de l’actualité ou prendra-t-il l’habitude de lire ?

Quels conseils pouvez-vous donner aux parents?

Je dis toujours qu’un enfant, de six à 11 ans, au primaire, a besoin qu’on lui tienne la main. Au secondaire, l’enfant a besoin qu’on marche à côté de lui. Bien sûr, il faut lui donner son espace, mais trop de liberté nuit à son épanouissement. Il ne faut pas oublier que, pendant l’adolescence, les jeunes se cherchent. Ils essayeront de transgresser les règles. Les parents doivent être fermes et surtout ne pas céder au laisser-aller.


Preety Ramjuttun (éducatrice) : « Les parents connaissent mieux leurs enfants que les profs »

Pourquoi les parents doivent-ils accompagner leurs enfants pendant leurs études ?

Le support moral d’un enfant se trouve avant tout à la maison. A l’école, dans une classe de 40 élèves, l’enseignant n’a pas de temps d’accorder une attention particulière à chacun, même s’il fait de son mieux. Les parents connaissent mieux leurs enfants et savent quels sont leurs besoins. Le suivi doit se faire dès le plus jeune âge et aller jusqu’au secondaire. Le parent est le pilier de la famille et l’enfant doit pouvoir compter sur lui. Par exemple, l’enfant a besoin de support émotionnel et, souvent, c’est la maman qui est plus apte à cela. Même quand il a un problème, c’est à elle qu’il se confiera plus facilement. Dès fois, il se peut que l’enfant n’ait pas les motivations qu’il faut à l’école, mais ses parents savent comment le motiver. Ce sont les parents qui inculquent la culture de l’effort.

On dit que les parents les plus aisés donnent plus de moyens à leurs enfants ?

Je partage tout à fait cet avis et j’en vois bien des exemples chaque jour. Voyons les lauréats par exemple. Il n’y en a que quelques-uns venant de familles modestes. Ce sont des exceptions. La plupart viennent de familles aisées et les parents ont mis tous les moyens à leur disposition pour réussir. Bien sûr, les parents avec peu de moyens font de leur mieux également, mais c’est sûr que lorsqu’on est aisé, on peut se permettre plus de choses. Par exemple, si l’enfant est stressé, on l’emmène passer un week-end à l’hôtel. Ce que les autres ne peuvent pas. On peut aussi payer de meilleurs professeurs pour les leçons.


GIRISH BAWOOHANY (classé 6e, filière technique) : « Les parents donnent l’exemple en travaillant dur »

Quel a été le rôle de vos parents dans votre succès ?

Je dois avant tout préciser que je viens d’une famille très modeste. Mon père travaille à l’usine et ma mère est femme au foyer. Mais ils ont tous deux toujours fait de leur mieux pour me donner les moyens nécessaires pendant mes études. Quand je voyais mon père rentrer à la maison très tard le soir, après avoir fait des heures supplémentaires, cela me motivait davantage à faire mieux. Je me disais qu’il était en train de faire des sacrifices et que je devais, à mon tour, me forcer à apprendre. Comme j’ai un petit frère, je devais également donner l’exemple. C’est la deuxième fois que je passe les examens du HSC. L’année dernière, j’étais classé 17e. Ce qui m’a poussé à tenter ma chance, une nouvelle fois. Je suis classé 6e. Il n’y a que trois candidats devant moi pour décrocher le titre. Maintenant, je souhaite avoir l’opportunité de décrocher une bourse.

Pourquoi le soutien des parents est-il important ?

En tant que jeune, je considère que les parents sont des “role models” pour leurs enfants. Ils nous donnent l’exemple en travaillant dur et ils savent que l’éducation est importante pour réussir dans la vie. Moi-même, mes parents nous ont toujours expliqué, mon frère et moi, qu’il est important de prendre ses études au sérieux et que c’était le seul moyen de s’en sortir. C’est une leçon que j’ai retenue et, à mon tour, comme je l’ai dit, je sens que je dois également donner l’exemple à mon petit frère.

Quel est votre message aux parents en général ?

Il faut toujours soutenir vos enfants et croire en leurs capacités, même s’il n’est pas très brillant au départ. Dans mon cas, j’avais eu 19 unités aux examens du CPE et j’ai fréquenté le collège New Eton. J’étais déçu de n’avoir pu faire mieux, mais je n’ai pas baissé les bras pour autant. Aux examens du SC, j’ai décroché 14 unités. C’est là que mes parents et mes professeurs ont réalisé que j’avais du potentiel et ils m’ont donné tout le soutien nécessaire pour atteindre mon objectif. Je dois aussi préciser qu’en Form IV, j’avais eu 30 points en mathématiques… mais l’année dernière, en Upper Six, j’ai remporté les Maths Olympiades, où il y avait également les étudiants des Star Schools. Le collège New Eton a remporté ce concours. Ce que je veux dire, c’est qu’avec un bon encadrement de la part des parents et des enseignants, on peut réussir, même si on n’était pas un enfant brillant au départ.


STEVEN CHUNG PIN YONG (lauréat, filière scientifique) : « C’est la famille qui connaît 
notre potentiel »

Quel a été le rôle de vos parents dans votre succès ?

Les parents ont un très grand rôle à jouer dans la réussite de leurs enfants. Les miens ont fait beaucoup de sacrifices. En plus de me donner les moyens nécessaires pour faire mes études dans de bonnes conditions, ils étaient toujours là pour me déposer ou me récupérer à l’école ou aux leçons. Je ne parle pas uniquement de mon père, Philippe, et de ma mère, Jenny, mais de toute la famille : grand-père, grand-mère et les autres. Ma grand-mère, décédée il y a deux ans, a été celle qui a toujours cru que je pouvais être lauréat un jour. Elle m’a encouragé depuis que j’étais petit.

Pourquoi le soutien des parents est-il important ?

La famille est importante, avant tout, pour le soutien moral. Il y a des choses qu’on ne peut dire à ses profs, mais on peut le faire avec les membres de sa famille. L’année dernière, à ma première tentative, j’étais classé au-delà de 100. Je voulais prendre une “gap year”. Personne ne croyait que j’aurais pu être lauréat cette année, d’autant plus que la compétition est élevée dans la filière scientifique. Mais mon papa y a cru. Il m’a dit de ne pas prendre cette année sabbatique, mais de tenter ma chance, une nouvelle fois. C’est ce que j’ai fait et j’ai réussi. C’est la famille qui connaît notre potentiel et nous guide.

Quel est votre message aux parents en général ?

Je dirais aux parents de ne pas mettre la pression sur leurs enfants. Surtout quand les enfants ne réussissent pas comme il faut à leurs examens. Moi-même, je n’avais pas obtenu six unités au School Certificate. Aux “mock exams”, il y a des enfants qui avaient trois A+ et deux A, mais moi, j’avais même des C. Il n’empêche que mes parents ont continué à m’encourager et à me donner le soutien moral nécessaire. Trop de pression peut nuire à l’enfant. Il y a des étudiants qui font des dépressions parce qu’ils n’arrivent pas à gérer la pression. Ou alors, ils savent que les parents ont de grandes “expectations”, mais pensant qu’ils ne vont pas y arriver, ils craquent.

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