BLUEPRINT | Transformation digitale 2025-29 : Un pari audacieux pour transformer les services publics

- Le ministre Ramtohul: « We still see people queuing up at many government counters, and we believe that in Mauritius of 2025, this cannot be allowed anymore » - 4 piliers fondamentaux : la centralisation des données citoyennes dans un Data Hub unique, l’adoption d’un identifiant numérique via la Mobile ID, la généralisation des documents numériques et la mise en place d’une super-application Le président Gokhool : « As we embrace the digital world, we must also defend the rights of every digital citizen »

En 2025, l’exigence citoyenne est claire : plus de simplicité, plus d’efficacité, et surtout, plus de dignité dans l’accès aux services publics. Face à une population de plus en plus connectée et exigeante, l’État se devait de répondre avec ambition, avec le lancement du Blueprint sur la transformation digitale 2025-2029, un document stratégique qui entend faire basculer le pays dans une nouvelle ère numérique. Il esquisse une feuille de route globale pour moderniser les services publics, responsabiliser les citoyens, stimuler l’innovation et promouvoir la durabilité environnementale.

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“We still see people queuing up at many government counters, and we believe that in Mauritius of 2025, this cannot be allowed anymore. We need to move citizens from being in line to getting online”, affirme Avinash Ramtohul, ministre des TIC. L’unanimité se dégage : le statu quo n’est plus tolérable. Reste maintenant à tout mettre en œuvre pour traduire cette vision en actions concrètes durant les cinq prochaines années, et tous les ministères devront s’y mettre.

Le plan directeur a été élaboré entièrement par des ressources locales, sans faire appel à de cabinet de consultants international. Une économie non négligeable de plusieurs millions de roupies pour les contribuables, mais aussi un signal fort pour la confiance placée dans les compétences mauriciennes. Le Blueprint repose sur quatre piliers fondamentaux : la centralisation des données citoyennes dans un data hub unique, l’adoption d’un identifiant numérique via la Mobile ID, la généralisation des documents numériques et la mise en place d’une super-application gouvernementale.

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À cela s’ajoutent cinq catalyseurs prioritaires, allant de la cybersécurité à l’éducation numérique, en passant par l’infrastructure cloud et la gouvernance éthique de l’intelligence artificielle. « We cannot pretend to be doing electronic government when we do not have a single source of truth for all citizens », poursuit Avinash Ramtohul. Actuellement, les données personnelles d’un citoyen sont éparpillées dans une vingtaine de bases différentes. Résultat : lenteurs, redondances, erreurs et manque de transparence. Le Data Hub vise à mettre fin à ce désordre administratif en créant une base unique, fiable et interopérable.

Impératif économique

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Le constat est brutal ; entre 2022 et 2024, Maurice a chuté de 12 places dans le e-Government Development Index de l’ONU. Un recul inquiétant – qui a servi d’électrochoc – dans un monde où la compétitivité numérique est devenue un critère majeur pour attirer les investissements étrangers. « 12 ranks is a lot. Therefore, we need to re-look for that position », s’insurge le ministre. Pire, dans un contexte africain en pleine mutation digitale, Maurice ne peut se permettre de rester à la traîne. Le numérique ne constitue plus un luxe, mais un levier vital de croissance, d’efficience et d’attractivité économique.

La philosophie du Blueprint est claire : simplifier, centraliser et numériser. Cela signifie : fin des formulaires à rallonge, des photocopies multiples et des déplacements inutiles vers les bureaux administratifs, avec l’attente souvent interminable aux guichets. À terme, le but est une administration « zéro papier, zéro file d’attente », accessible à tous depuis un smartphone ou un ordinateur. Un changement de paradigme total, mais aussi un défi colossal.

Inclusion numérique, personne ne sera oublié

Transformer les services publics ne se résume pas à digitaliser les procédures. Encore faut-il que chaque citoyen puisse y accéder et les utiliser. Et c’est là l’un des plus grands défis du projet : l’inclusion numérique. « There are a lot of places in Mauritius where people are unable to use these facilities. Not that they don’t have the device. Simply, they have not been empowered », estime Avinash Ramtohul. Il ne s’agit donc pas seulement de connecter les gens, mais de les former, de les rassurer et de les accompagner dans cette transition. Des campagnes de sensibilisation seront organisées dans les régions rurales et défavorisées, avec l’aide des écoles, des parents, des ONG et des leaders communautaires. L’idée est d’instaurer une culture numérique partagée, fondée sur la pédagogie, la bienveillance et l’inclusion. « Digital for all also means going out to those regions, talking to the parents, talking to the kids about what this blueprint is about », souligne-t-il.

Éthique, sécurité et vie privée

Mais toute révolution numérique s’accompagne de nouveaux risques. Les récents incidents sur les réseaux sociaux – contenus inappropriés, harcèlement, Sextorsion, Revenge Porn – ont montré que l’espace digital peut aussi devenir un terrain de violence. Le Blueprint entend y remédier. « We want a clean digital space for all, just as we want a safe physical space », dit le ministre des TIC. Le Blueprint prévoit un renforcement du cadre juridique autour de la cybersécurité, de la régulation des contenus en ligne, de la protection des données personnelles et de l’intelligence artificielle. Chaque entreprise traitant des données devra désigner un Data Protection Officer en conformité avec la loi, ce qui n’est pas le cas pour beaucoup actuellement.

Par ailleurs, les plateformes numériques devront se plier à des règles éthiques strictes, notamment en matière de modération, de transparence algorithmique et de protection de l’enfance. Il s’agit de bâtir un Internet sûr, éthique et respectueux des droits fondamentaux.

Vigilance

Lors de la cérémonie de lancement du Blueprint, le président de la république, Dharam Gokhool, a salué la vision portée par le gouvernement, tout en appelant à la vigilance : « As we embrace the digital world, we must also defend the rights of every digital citizen ». Les menaces numériques sont multiples : fausses informations, cyberattaques, surveillance abusive. « Digital surveillance must never be used to erode civil liberties », a-t-il averti, plaidant pour une gouvernance numérique fondée sur les droits humains. Consentement, transparence des algorithmes, souveraineté des données : autant de principes que le Blueprint devra intégrer de manière concrète et vérifiable. Il a aussi appelé à un dialogue permanent avec la société civile, les universités, les juristes et les associations citoyennes.

Le Blueprint 2025-29 n’est pas un document rigide, mais un plan évolutif. Il marque le début d’un processus de transformation structurelle qui s’étendra bien au-delà de 2029. « We are probably the second last generation to be living both the analog and digital life. It is our responsibility to create that safe digital space for the next ones », fait comprendre Dharam Gokhool.

Cette transition, qui s’annonce comme l’épine dorsale de la reconstruction économique post-crise, implique l’engagement de tous : pouvoirs publics, entreprises, collectivités locales, chercheurs, citoyens. Il ne s’agit pas simplement d’implémenter des technologies, mais de redéfinir notre rapport à l’État, à l’information et à la citoyenneté. Vu les ambitions exprimées, la transformation digitale ne sera ni instantanée ni facile. Elle exige une grande volonté politique, des investissements massifs, et une attention constante aux questions d’éthique, d’égalité et de souveraineté. Mais si le pari est tenu, le pays pourrait bien devenir un modèle régional.

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