Le leader de l’opposition accuse L’Alliance du Changement de faire le contraire de ce qu’elle avait promis avant les élections générales
Pas de compromis en ce qui concerne l’éligibilité de la pension de vieillesse à 65 ans
Le coup d’envoi des débats parlementaires sur le budget 2025-26 présenté le 5 juin dernier a été donné par le leader de l’opposition, Joe Lesjongard. Il a axé son intervention sur deux aspects majeurs à savoir que le gouvernement a présenté un budget à la manière du Fonds monétaire international (FMI). De plus, il a accusé L’Alliance du Changement d’avoir fait le contraire de ce qu’elle avait promis avant les élections générales. Comme prévu la décision gouvernementale de porter l’éligibilité de la pension de vieillesse de 60 à 65 ans a occupé une place centrale dans son intervention. Il reproche au gouvernement d’avoir pris cette décision de manière unilatérale et sans consultations. Ce qui l’a amené à dire que le budget marque une rupture entre le gouvernement et la population. L’intervention de Joe Lesjongard d’une durée de plus d’une heure a été marquée par des remarques et des interruptions des membres du gouvernement et des parlementaires de la majorité, ce qui a été amené la Speaker Shirin Aumeeruddy-Cziffra à les rappeler l’ordre en réaffirmant à sa façon que le leader de l’opposition a le droit de critiquer et que chacun aura l’occasion de prendre la parole pour commenter les mesures budgétaires et pour réfuter les arguments du leader de l’opposition.
Pour Joe Lejongard, après un chapelet de promesses électorales et dans le sillage de la victoire aux élections générales, le gouvernement brandit l’état de l’économie comme prétexte pour ne pas tenir ses promesses, après avoir présenté un état de l’économie douteux. Il est d’avis que le gouvernement est à la merci des institutions internationales. Ce que, selon lui, n’aurait jamais fait l’ancien Premier ministre, feu sir Anerood Jugnauth. Il a dit son étonnement que l’argent reçu pour la location de la base militaire de Diego-Garcia sera utilisé pour éponger la dette publique alors que l’obtention de ces fonds est encore incertaine et que de plus, il n’y a rien de prévu pour le développement de l’archipel des Chagos.
Commentant la situation économique, le leader de l’opposition considère la publication de The State of the Economy comme une tentative de la part du gouvernement de créer un chaos économique et social juste après les dernières élections générales. « Ce document non signé a entamé la confiance des investisseurs et a réussi à établir une psychose au sein de la population en prélude à la présentation du budget en faisant croire que les finances sont anémiques et que la dette publique est insoutenable et que le gouvernement ne peut plus continuer à soutenir la population avec l’aide sociale introduite par l’ancien gouvernement », s’acharne-t-il.
« Cela a été un stratagème politique pour justifier la stratégie politique du gouvernement », a-t-il insinué. Il a estimé que le gouvernement s’est appuyé sur Moody’s pour justifier sa politique. « Après la présentation de ce budget, le gouvernement a été mis K.-O par la colère de la population », laisse-t-il entendre en estimant que la note publiée par Moody’s la semaine dernière vient jeter le doute sur ce gouvernement. Il estime que les statistiques et documents publiés par ce gouvernement montrent que l’économie était robuste en 2024 et l’ancien gouvernement a d’ailleurs été félicité par le FMI. Il dénonce par ailleurs qu’en sept mois le gouvernement a emprunté Rs 96 milliards.
Abordant la question de la pension de vieillesse, Joe Lesjongard a estimé que c’est une des mesures les plus controversables de ce quart de siècle. Il trouve que deux comités seront institués pour revoir la pension, comme annoncé par le gouvernement lundi, soit onze jours après la présentation du budget, avec pour objectif de se pencher sur le ciblage.
« Tout comme la majorité de la population, je suis contre le ciblage. La division de la population sur ce sujet ne passera pas cette fois-ci », a-t-il dit. « Si nous devons passer par un examen médical pour être éligible à la pension alors que nous savons comment fonctionnent les boards médicaux à la Sécurité sociale ? Eski pou get figir pou gagn pansion ? » devait-il lâcher.
Il maintient que la suppression de la pension pour ceux âgés entre 60 et 65 ans est une des mesures les plus injustes envers les travailleurs et les femmes au foyer. « L’histoire retiendra que c’est un gouvernement qui contient trois partis, qui ont pris naissance dans la lutte des travailleurs, qui ont fait adopter cette décision dramatique », dénonce-t-il avant de souligner le courage des syndicats qui se sont élevés contre cette mesure. Il a souhaité que le gouvernement fasse machine arrière et rétablisse la pension dans sa forme actuelle.
Le leader de l’opposition a aussi évoqué une autre mesure qui, à son avis, affectera la population. Il considère qu’il n’y a aucun problème si le gouvernement compte réformer certains secteurs. Toutefois, il fait remarquer qu’en 2006, le gouvernement avait voulu enlever les subsides sur le riz et la farine. « Or dans le présent budget, sous une forme déguisée ; le gouvernement annonce la fin des subsides. Par conséquent, la population doit s’attendre à une augmentation des prix de la farine, du riz, du gaz ménager, du pain et de centaines d’autres produits. C’est également la fin des subsides sur les tarifs d’électricité et d’eau pour les familles les plus vulnérables. C’est un gouvernement sans cœur », déclare-t-il.
Cette partie de son intervention a suscité de vives protestations de la part des membres de la majorité dont, le ministre de l’Energie, Patrick Assirvaden, qui affirme que le leader de l’opposition ne dit pas la vérité. « Il est pris en flagrant délit de mentir à l’Assemblée nationale », ajoute-t-il. Après avoir recadré Adrien Duval qui lui faisait des remarques, la Speaker a demandé au leader de l’opposition de poursuivre son intervention, mais en se basant sur les faits.
Joe Lesjongard a également déploré la décision du gouvernement d’abolir la gratuité pour les étudiants inscrits à des cours universitaires à temps partiel. Il a aussi critiqué les mesures touchant l’immobilier, l’industrie de la construction.
Le leader de l’opposition a conclu son intervention en affirmant que le gouvernement a trahi le peuple. « Vous avez fait des promesses pour remporter les élections tout en sachant que vous n’alliez pas les tenir. Vous avez fait fuir les investisseurs, augmenter la dette publique, vous démantelez l’État-Providence et vous avez réduit le pouvoir d’achat des Mauriciens sous prétexte qu’il faut sauver l’économie », s’insurge-t-il.