L’inflation à la source et la cherté des matières premières continuent de peser sur les prix
La surchauffe des prix semble loin d’être terminée, en cette fin 2022. Si les tarifs de fret ont pris une courbe descendante ces trois derniers mois à l’échelle mondiale, les consommateurs peuvent légitimement espérer une baisse de prix des produits et aliments en rayons. Mais l’affaire n’est pas si simple, et il semble qu’il faudra continuer à manger son pain noir en 2023.
Les tarifs de fret baissent mais les prix restent élevés car les perturbations dans les chaînes logistiques maritimes perdurent à l’échelle mondiale depuis les débuts de la pandémie de Covid-19. Une étude de la CNUCED, qui vient d’ailleurs d’être rendue publique, souligne que le secteur maritime devra investir davantage dans les infrastructures et la durabilité des chaînes logistiques, pour surmonter les crises futures : « Depuis deux ans, la crise des chaînes d’approvisionnement a démontré qu’une inadéquation entre la demande et l’offre de capacités logistiques maritimes entraîne une hausse des taux de fret, une congestion et des ruptures importantes sur les chaînes de valeur mondiales.»
Le chaos maritime entraîné par la pandémie et récemment la guerre Ukraine-Russie, connaît cependant une accalmie depuis les trois derniers mois avec les tarifs de fret qui tendent à partir à la baisse. « Avant le Covid, un conteneur de 40 pieds sur l’Asie coûtait environ USD 1 500. Pendant le Covid, ce prix a grimpé jusqu’à USD 12 000 à 15 000. Et actuellement, il faut compter environ USD 6 000. C’est clair que les prix ont chuté, » explique un logisticien local. Toutefois, les opérateurs font remarquer que les tarifs restent toujours très élevés et sont loin d’avoir atteint le niveau prépandémique.
Comment expliquer cette baisse des prix du fret ; est-ce dû à un semblant de retour à la normale sur le plan maritime ? Non, selon un spécialiste : « Il y a la question de l’offre et de la demande et nous voyons depuis quelques mois que – face aux difficultés persistantes d’acheminement de marchandises par voie maritime et le fret exorbitant – beaucoup de pays utilisent maintenant des modes alternatifs de transport, surtout par voie terrestre. C’est le cas notamment à travers la Route de la Soie, entre l’Asie et l’Europe, qui permet de contourner les problèmes du shipping. »
Quoiqu’il en soit, avec la baisse des tarifs de fret, dans certains milieux logistiques on déclare que cela aura un effet positif sur les prix des produits et que le consommateur en sortira gagnant. Mais Martin Kröger, CEO de German Shipowners’ Association, n’est pas du même avis. Dans Hellenic Shipping News, une publication spécialisée, il expliquait récemment que les coûts de fret ne représentent qu’une petite proportion des prix de produits en rayons : “He even thinks that freight rates are not going to fall any further, as additional expenditures for shippers caused, for example, by higher environmental standards would cost “a lot of money.”
“High prices in grocery stores for some time”
Un point de vue partagé par certains cadres évoluant dans la logistique à Maurice, « il a encore à jongler avec les effets de la guerre et à l’acheminement des matières premières qui posent toujours beaucoup de difficultés sans oublier le coût de ces matières premières qui grimpe avec la hausse de l’inflation dans les pays concernés. »
Par exemple, il n’y a qu’à observer le prix des denrées de base, pour voir que les prix alimentaires sont actuellement toujours 25% plus élevés qu’avant la pandémie, selon le United Nations Food Price Index. Le coût élevé des intrants agricoles ne vient pas arranger les choses pour le consommateur. AgriPulse écrivait récemment que « analysts say consumers are likely to see relatively high prices in grocery stores and restaurants for some time due to strong commodity markets and high agricultural input costs that get passed through the food chain. »
Les importateurs et commerçants locaux ne peuvent que confirmer : « les prix gonflent à cause des matières premières et du fret aussi quand nous achetons un produit dans un pays, nous l’achetons avec l’inflation dans le pays d’origine, et cela veut dire malheureusement que même si le coût du fret part à la baisse actuellement, les prix peuvent rester inchangés dans les supermarchés et magasins.»
La prudence pour les fêtes
Dans les milieux des distributeurs, on affirme que les produits festifs pour les fêtes de Noël et du Nouvel An ont été importés en quantité limitée : « Les consommateurs sont prudents, ils consomment moins, nous n’avons pas les mêmes quantités que les années précédentes. Je dirais une baisse de 15% environ », souligne un commerçant. Mais les commerçants gardent le moral. Si plusieurs facteurs exogènes affectent le prix des produits importés, il faut aussi compter avec des facteurs endogènes comme la valeur de la roupie, « la roupie est redevenue à un taux appréciable et il faudrait la maintenir à un niveau de 45 à 46 euros, qui est un niveau appréciable », explique un commerçant opérant dans un mall et qui importe majoritairement ses produits du continent européen.
Interrogé sur la tendance en matière d’achats, il reconnaît que les gens « dépensent moins qu’avant » mais note certaines « variations » dépendant du type et de la catégorie des produits. « La bonne nouvelle c’est que les gens essayent de trouver les bons deals et pour moi c’est correct en ce moment en termes de ventes. Nous sommes même surpris car nous pensions que cela allait être plus difficile. » Cependant, la valeur moyenne des achats reste en baisse.