Cour Suprême : l’exhumation d’un cadavre enterré il y a 24 ans ordonnée

La Cour suprême, à travers un jugement rendu par la juge Véronique Kwok Yin Siong Yen, hier, a ordonné l’exhumation des restes de feu Abdullah Rossan Ally Peer Ally Khan, enterré le 23 décembre 1999, dans la tombe numéro 33 dans la partie réservée à la communauté musulmane du cimetière de Phoenix. Cette décision est basée sur l’article 8(a) de la loi de 2009 sur l’identification par l’ADN.
La juge a ordonné ainsi qu’une analyse médico-légale soit effectuée par le Forensic Science Laboratory à partir d’un échantillon d’ADN qui sera obtenu des restes du défunt et d’un échantillon d’ADN remis par la plaignante, Nushrat Bundhoo, représentée par Me Lajpati Gujadhur (avoué) et Me Antoine Domingue, Senior Counsel, en vue de déterminer des relations de père et fille. Cette affaire a en toile de fond l’action en recherche de paternité entamée depuis plusieurs années par la plaignante avec un jugement datant de 2014 concluant qu’elle avait prouvé avec succès qu’elle était la fille de feu Abdullah Rossan Ally Peer Ally Khan.
Les autres héritiers du défunt allaient contester vainement ce jugement de Nirmala Devat. Un recours au Privy Coucil a par la suite été enclenché. Dans un jugement rendu le 2 novembre 2020 le Judicial Committee of the Privy Council a retenu l’appel et renvoyé le dossier pour une nouvelle audition devant un autre juge afin de trancher la question de paternité en tenant compte non seulement des preuves sociologiques mais également des preuves scientifiques.
Le JCPC a estimé que si une demande d’autopsie, qui est une question délicate, était retenue, elle devrait faire l’objet de conclusions complètes au nouveau juge qui peut statuer non seulement sur le droit, mais aussi sur la question de savoir si des tests post mortem seraient réalisables ou appropriés dans ce cas.
La juge Véronique Kwok Yin Siong Yen fait comprendre qu’à Maurice, la situation est qu’un juge peut ordonner à une personne encore en vie de fournir un échantillon d’ADN dans le but de procéder à une analyse médico-légale pour vérifier la filiation et cela n’est pas soumis au consentement de cette personne.
« Puisqu’il n’est pas nécessaire d’obtenir le consentement d’une personne pour qu’un juge ordonne un test ADN, j’estime qu’il est donc sans importance que feu Abdullah Rossan Ally Peer Ally Khan ait consenti ou non, de son vivant, à fournir son échantillon d’ADN à cette fin de vérifier la filiation », a-t-elle fait ressortir.
Elle a aussi indiqué que des preuves ont été présentées selon lesquelles, la cause du décès défunt a été attribuée à « une insuffisance respiratoire, une cardiopathie ischémique et un diabète ». Donc, il n’y a aucune question de maladie transmissible sur la voie d’une exhumation aux fins d’enquête sur la cause du décès.
« It is to be highlighted that in all cases where no legal remedy is provided by any enactment, the Supreme Court retains the power as a Court of equity to administer justice », a souligné la juge. « Je suis d’avis que la Cour suprême a le pouvoir d’ordonner l’exhumation de la dépouille d’une personne décédée aux fins de procéder à une analyse médico-légale de l’ADN post-mortem », ajoute-t-elle. Elle a aussi pris en considération qu’aucune autre dépouille n’a été enterrée dans la même tombe d’Abdullah Rossan Ally Peer Ally Khan. Elle est d’avis que si la tombe est ouverte maintenant, les restes de feu Abdullah Rossan Ally Peer Ally Khan seront les premiers restes à être exhumés.
Après avoir examiné le témoignage scientifique du Dr Tulsi du FSL sur les tests ADN post-mortem et le témoignage du représentant du ministère de la Santé sur l’aspect sanitaire de l’exhumation, la juge Véronique Kwok Yin Siong Yen a fait comprendre qu’il est possible d’ordonner un test ADN post-mortem afin de vérifier s’il est scientifiquement probable que feu Abdullah Rossan Ally Peer Ally Khan était le père naturel de Nushrat Bundhoo avant d’entendre des preuves sociologiques. « I find that since the Legislator has provided that scientific evidence may assist the Court to ascertain filiation and since the plaintiff has a legitimate interest to know the truth about her biological identity, an order for a paternity test in the present matter is most appropriate and is in the interest of justice », a conclu la juge.
L’affaire a été fixée au 22 mars 2024 pour que les parties se prononcent à la lumière du rapport qui sera soumis par le FSL.

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