De l’argent public aux petits copains

Avec la tenue des élections municipales le 4 mai, une nouvelle étape a été franchie sur le plan démocratique à Maurice. Voilà des mois, si ce n’est des années, que la tenue de ces élections était réclamée. Si le premier renvoi pour cause de Covid était compréhensible, les deux autres renvois étaient restés en travers de la gorge des électeurs dans les milieux urbains. Beaucoup ne comprenaient pas pourquoi, alors que les élections villageoises ainsi que les régionales à Rodrigues avaient été organisées, elles ne pouvaient l’être à Maurice. Le dernier scrutin municipal a permis de rétablir le fonctionnement démocratique dans les villes et de redonner de la crédibilité aux conseils municipaux qui l’avaient perdue au fil des dernières années.

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Les élections municipales et villageoises constituent un élément essentiel du fonctionnement démocratique. Il est vrai que le taux élevé d’abstention ne doit pas être pris à la légère et mérite réflexion de la part des principaux acteurs politiques. À la Commission électorale, les principaux intéressés ont fait part de leur déception, tenant compte de l’ampleur de l’énergie déployée pour l’organisation de ces élections. D’autant plus que, pour la première fois, le dépouillement des bulletins avait lieu le même jour. Compte tenu du faible taux de participation, les résultats des élections ont été annoncés officiellement dans toutes les villes avant minuit. Il est intéressant de noter que, pour la première fois dans les annales électorales, un candidat de l’opposition a été élu par tirage au sort dans l’arrondissement no 3 à Vacoas-Phoenix, après avoir obtenu le même nombre de voix qu’un candidat d’un parti gouvernemental. De plus, le candidat d’En Avant Maurice, Patrick Belcourt, a été élu en tête de liste dans son arrondissement à Beau-Bassin–Rose-Hill, alors qu’un candidat indépendant, Ajay Teerbhoohan, a été élu à Port-Louis. Mais en fin de compte, la vérité est que l’Alliance du Changement a eu suffisamment de soutien pour faire élire 117 candidats et contrôler les cinq villes du pays sans contestation. Joanna Bérenger a raison de dire qu’au-delà des spéculations, l’Alliance du Changement a consolidé sa position dans les villes. La balle est maintenant dans leur camp pour nettoyer les villes et redonner aux administrations urbaines leurs lettres de noblesse une fois que les maires auront été installés.

À l’Assemblée nationale matin dernier, le voile a été levé sur les pratiques troublantes de l’ancien régime durant ces dix dernières années. Des millions de roupies, si ce n’est des milliards, ont été distribuées à tour de bras à ceux faisant partie d’un cercle privé entourant le pouvoir en place. Ainsi, le public a pris connaissance des contrats juteux, des salaires mirobolants et des détournements de fonds qui ont été enregistrés. On attend avec impatience une réponse écrite qui révélera enfin les salaires jusqu’ici restés secrets de l’ancien directeur de l’ICAC et de la FCC.

Une autre question à ce sujet devrait également figurer sur la liste des interpellations la semaine prochaine. Alors que d’un côté, une catégorie de personnes touchait de l’argent en espèces sonnantes et trébuchantes, argent qui était investi dans des biens immobiliers à Maurice et ailleurs, la population avait droit à une illusion monétaire avec des allocations en roupies dévaluées et une inflation rampante et galopante. Le nouveau gouvernement a refusé jusqu’ici de s’engager dans la voie de l’illusion monétaire même si, selon certains observateurs, cela a contribué en partie aux abstentions lors des élections municipales.
Le ministre délégué, Dhaneshwar Damry, a annoncé cette semaine la présentation prochaine d’un budget responsable. De son côté, le gouverneur de la Banque de Maurice, Rama Sithanen, qui a maintenu le taux directeur à 4,50% à l’issue de la réunion de politique monétaire cette semaine, a observé que les principaux défis auxquels le gouvernement est confronté sont le déficit de la balance commerciale, le coût élevé de la main-d’œuvre, le faible taux de productivité et le déficit du budget courant estimé à -6,4%, avec ses conséquences sur le service de la dette.

Finalement, l’élection de Léon XIV pour succéder au défunt pape François a été accueillie avec joie dans le monde et à Maurice. Il représente un souffle d’espérance pour l’Église catholique et pour le monde.

Jean Marc Poché

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