Le Junior Minister aux Finances, Dhaneshwar Damry, a indiqué que les amendements contenus dans le Finance Bill définissent une politique claire et une orientation à long terme pour les finances publiques et pour notre économie. Dorénavant, les finances publiques seront fondées sur un Growth-Led Revenue plutôt que sur un Tax-Led Revenue. « Il s’agit d’une rupture avec ce que le MSM a fait depuis dix ans en imprimant de la monnaie, important l’inflation, appliquant des taxes à la consommation, instaurant une taxe liée à la dévaluation, au détriment des citoyens. C’est cela que nous changeons », a-t-il déclaré.
Selon lui, une politique axée sur la croissance est essentielle, car « c’est la croissance qui garantit la viabilité de notre système social ». Il a précisé que le gouvernement MSM avait prévu de mettre fin à toutes les allocations financées par la CSG (Contribution sociale généralisée) au 30 juin 2025, en citant le paragraphe 13 B (3) de la Social Contributions and Social Benefits Act 2022 : « L’allocation de revenu sera versée à toute personne éligible directement sur son compte bancaire au début de chaque mois, pour la période allant de juillet 2022 à juin 2025 », dit-il.
Dhaneshwar Damry indique que « la stratégie consiste à développer et promouvoir des sources de revenus issues de la croissance, tout en consolidant les recettes issues de la reprise et de la résilience économique ». Il illustre cette stratégie par quatre amendements majeurs contenus dans le Finance Bill : la Banking Act pour un renforcement du processus KYC (Know Your Customer), la Bill of Exchange Act pour l’introduction des lettres de change électroniques, l’Economic Development Board Act pour la mise en place de dispositifs innovants pour Maurice et l’Income Tax Act.
« Pris dans leur ensemble, ces amendements représentent un bond en avant pour notre politique économique. Ils préparent l’avènement d’une économie numérique et fondée sur l’intelligence artificielle », a fait ressortir le Junior Minister, en ajoutant : « nous ne verrons pas les effets immédiats de ces réformes, car le précédent gouvernement n’a rien entrepris pendant dix ans. Mais nous, nous avons une stratégie pour l’ensemble de l’économie. »
Dhaneshwar Damry a cité l’exemple de Singapour, qui estime que l’intelligence artificielle (IA) pourrait représenter jusqu’à 18% de son PIB. « Imaginez que, dans les années à venir, nous réalisions ne serait-ce qu’un gain de productivité de 1% sur notre PIB grâce aux mesures que nous mettons en place aujourd’hui. Ce sont des secteurs destinés à croître de manière exponentielle », a-t-il fait ressortir.
L’intervenant a assuré que le gouvernement entend créer des emplois et attirer des devises étrangères dans le pays. « Tout en développant les nouveaux secteurs économiques, l’objectif est d’atteindre au moins 3 à 4% de croissance, comme prévu dans les perspectives à moyen terme. »
Il a aussi fait comprendre que les amendements fourniront également un environnement économique fondé sur des fondamentaux macroéconomiques tenant compte des risques ESG (environnementaux, sociaux et de gouvernance). « Les institutions internationales continueront à voir en nous un pays très attractif », a-t-il conclu.
JYOTI JEETUN, ministre des Services financiers)
« Une hausse de la taxation
sur les banques est justifiée »
La ministre des Services financiers, Jyoti Jeetun, a déclaré que le gouvernement actuel a reçu pour mandat non seulement de corriger une décennie d’inaction et de rétablir la crédibilité budgétaire, mais aussi de relancer le dynamisme économique et de raviver la confiance et l’espoir dans l’avenir de Maurice. « L’un des objectifs du Finance Bill 2025 est de procéder à une refonte complète de notre modèle économique, en commençant par une consolidation budgétaire. Cela signifie réduire les déficits publics et améliorer l’équilibre des finances publiques », a-t-elle fait ressortir.
Jyoti Jeetun a poursuivi en disant : « nous pouvons soit réduire les dépenses publiques, soit accroître les recettes, soit combiner les deux. En tant que gouvernement responsable, restaurer la confiance des investisseurs est essentiel pour atteindre les ambitieux objectifs de recettes fixés par ce budget. Si nous poussons trop fort sur le volet recettes, la pression fiscale perçue risque de devenir excessive. Nous courons alors le risque de perdre la confiance des investisseurs, ce qui pourrait avoir un impact négatif direct sur la croissance. »
La ministre a plaidé pour une approche inclusive et responsable de la gouvernance. « Nous écoutons la voix du peuple et des entreprises. Nous apportons un certain nombre d’ajustements et de précisions à ce projet de loi », a-t-elle affirmé.
En ce qui concerne l’Income Tax Act et la Fair Share Contribution attendue des entreprises, les entités opérant sous le régime de Global Business demeurent exemptées. En remplaçant le terme Global License par Global Business License , le projet de loi veille que les fondations, les trusts et autres structures fiduciaires similaires soient correctement intégrés dans le Tax and Regulatory Framework. « Ces mesures renforcent la position de Maurice en tant que juridiction fiable et innovante pour la gestion du Wealth Management, la planification successorale (succession planning) et le capital philanthropique, en particulier pour l’Afrique et l’Asie, où ces instruments prennent de l’ampleur », dit-elle. Elle a assuré que le principe de Chargeable Income sera respecté pour les trusts et fondations générant des revenus imposables provenant d’activités domestiques. Ils ne bénéficieront pas d’exemption.
Le Finance Bill intègre également des mesures fiscales importantes issues du budget, notamment l’introduction de la Fair Share Contribution et de la Domestic Top-up Tax dans le cadre de l’engagement du gouvernement à aligner la législation mauricienne sur les règles fiscales minimales mondiales définies par l’OCDE. « Nous comprenons que certains acteurs du secteur aient exprimé des inquiétudes quant à l’impact potentiel de ces mesures sur la compétitivité », a déclaré Jyoti Jeetun qui a reconnu que les dispositions liées à la Qualified Domestic Minimum Top-up Tax ont suscité des inquiétudes et une certaine incertitude, d’autant que plusieurs pays, comme les États-Unis et l’Inde, n’ont pas encore appliqué ces règles. Cependant, des consultations seront menées avec les parties prenantes du secteur, et des règlements viendront « préciser les exclusions et incitations » permettant d’alléger la charge pour les entreprises concernées par la Global Minimum Tax.
Jyoti Jeetun a également précisé les dispositions de la Value Added Tax Act afin d’apporter plus de clarté dans le secteur bancaire. « Nous confirmons que le plafond de 35 % applicable au Chargeable Income concerne uniquement les activités bancaires domestiques, et non le Global Business. » Elle a rappelé que le secteur financier reste le plus grand contributeur à l’impôt dans les recettes nationales, avec environ Rs 15 milliards de recettes.
« Le secteur bancaire continue d’afficher un bon niveau de rentabilité, ce qui justifie la proposition d’augmenter la fiscalité (taxation) sur les banques », a-t-elle indiqué. Toutefois, elle a reconnu la dualité structurelle du secteur bancaire mauricien, qui exige une approche nuancée en matière de politique fiscale. « Le secteur bancaire est dominé par deux grands acteurs. Si nous voulons encourager davantage de concurrence, notamment en attirant des banques internationales sur notre marché domestique, nous devons veiller à ce que la fiscalité ne soit pas un frein à cet objectif. »
Jyoti Jeetun a souligné que le plafonnement à 35 % de l’imposition sur les activités bancaires domestiques se justifie afin de maintenir des conditions concurrentielles attractives pour de nouveaux entrants, tout en assurant une contribution équitable de la part des institutions plus rentables.
Jacques Edouard, député de Rodrigues
« Le PBB appelle à la responsabilité
et à la transparence à l’ARR »
Intervenant sur le Finance Bill 2025, Jacques Edouard, député de Rodrigues, a salué plusieurs des amendements proposés, tout en saluant l’introduction du Programme-Based Budgeting (PBB). Il a d’abord exprimé son soutien aux modifications apportées à diverses lois comme la Consumer Protection Act et la Hire Purchase Act, indiquant qu’elles permettront un meilleur encadrement des abus et une meilleure protection des consommateurs, incluant dans le contexte de la vente en ligne. Ces mesures sont « most welcome ».
Jacques Edouard a commenté la Rodrigues Regional Assembly Act, soulignant qu’une nouvelle dynamique s’installe au sein de la république. « C’est dans l’exercice de la gestion qu’on acquiert la maturité », fait-il ressortir, en déplorant toutefois certains comportements au niveau local.
« Certains à Rodrigues font preuve de démagogie », dénonce-t-il. Mais c’est surtout l’amendement relatif au Programme-Based Budgeting qui a retenu l’attention du député. Il a rappelé que le concept, introduit en 2009 sous l’actuel Premier ministre, avait été abandonné avant d’être remis à l’ordre du jour cette année. Il se félicite des consultations au niveau du Conseil exécutif de l’Assemblée régionale de Rodrigues.
« Je remercie le Premier ministre d’avoir consulté le Conseil exécutif de la Rodrigues Regional Assembly. Il n’avait aucune obligation de le faire », concède Jacques Edouard, qui estime que l’approche du PBB est porteuse de progrès mesurables et de bonne gouvernance. « PBB is the best thing to do. Progress measured to see if goals are being met… It is about transparency, effectiveness, elimination of waste and delivering value for money », poursuit-il. Et ce, avant d’insister sur la nécessité d’inscrire ces réformes dans la durée, et d’aller plus loin pour doter Rodrigues des moyens nécessaires à sa pleine capacité d’action : « Ces amendements en appellent certainement d’autres pour éliminer les obstacles qui sabotent l’implémentation des capacités de Rodrigues », préconise-t-il.
Francisco François, leader de l’OPR
« Le PBB vise à améliorer
l’efficacité administrative »
Francisco François, leader de l’Organisation du Peuple de Rodrigues, a mis l’accent sur la clause 18 du Finance Bill. Celle-ci introduit des amendements visant à rendre obligatoire la préparation des Financial Statements conformément aux normes comptables internationales (International Public Sector Accounting Standards– IPSAS). Il a également salué les modifications apportées à la Statistics Act, instaurant un nouveau système de développement, de production et de diffusion des statistiques officielles.
« La promotion de la recherche, de l’innovation et du développement repose fortement sur des données fiables et précises », déclare le député de Rodrigues. Il indique que le changement climatique est aujourd’hui un domaine majeur, nécessitant la collecte et le partage de données statistiques, précisant qu’il s’agit là d’une opportunité pour moderniser le système de collecte de données à Rodrigues.
L’intervenant a ensuite évoqué les amendements aux sections de la Rodrigues Regional Assembly Act en vue de réintroduire le budget axé sur la performance (Performance-Based Budgeting – PBB). Cette réforme vise à relier l’allocation des fonds aux résultats obtenus, à améliorer l’efficacité administrative, et à consolider la responsabilité, la transparence et la stabilité dans la gouvernance régionale.
Francisco François justifie que le PBB permettrait de passer d’une logique budgétaire traditionnelle basée sur les ressources engagées à une approche axée sur des résultats, améliorant ainsi le cadre juridique, institutionnel et financier pour optimiser les dépenses publiques issues du budget national. Il soutient qu’il n’existe pas d’alternative à une mise en œuvre pragmatique et conforme à la Constitution. L’objectif est que le budget 2026-27 de Rodrigues soit préparé dans le respect de ce nouveau cadre.
Francisco François a qualifié ces amendements de « mesures législatives responsables, productives et favorisant la bonne gouvernance. » Il a illustré ses propos avec un exemple parlant : celui d’une personne vulnérable en attente d’un logement social depuis plusieurs années, alors que le gouvernement régional a choisi de prioriser l’achat de véhicules pour un montant de Rs 147 millions, aujourd’hui inutilisés. Cette situation, selon lui, reflète un gaspillage et une mauvaise allocation des ressources. « Le PBB permettrait également de corriger les dysfonctionnements dans les procédures de Procurement et de limiter les collusions entre responsables politiques et fonctionnaires », dit-il.
Enfin, le leader de l’OPR a dénoncé des pratiques administratives où, « sous la pression politique, l’administration publique exécute des instructions sans respecter les règles et procédures établies. » Il a cité en exemple un projet de construction à Rodrigues comprenant 36 places de stationnement, 200 mètres de protection côtière et une jetée de 15 mètres. « Ce projet n’avait pas été budgétisé l’année précédente, n’a fait l’objet d’aucun appel à propositions, n’a pas reçu l’aval du ministère des Finances, et a été attribué à un entrepreneur par simple ordre de travaux sous l’item budgétaire prévu pour des travaux routiers, pour un coût supérieur à Rs 40 millions, au détriment de projets routiers prioritaires tels que celui de Montagne-Cabri », dénonce-t-il.