GIOVANNY COTTE
« La seule règle de l’univers qui ne soit pas soumise au changement est que tout change et tout est impermanent. » Un constat effectué par Bouddha il y a des millénaires. En soumettant cette citation à une réflexion sur le caractère anxiogène de notre monde actuel, en pleine situation Covid, d’économie morose et crise russo-ukrainienne, je me suis posé la question si tout cela n’est pas en fait dans l’ordre des choses.
Le Larousse donne pour définition au mot impermanence « un état de ce qui n’est pas permanent, ne dure pas et change sans cesse ». La signification ayant été entendue, l’équation à résoudre ici n’est pas tant de savoir ce qui a vocation à changer mais plutôt de pouvoir relever tout ce qui n’est pas influé par une altération. Métamorphose ou transfiguration. Vaste programme !
Tout, mis à part la seule certitude du trépas – qui, encore, occasionne un passage de la vie à l’Orient Eternel –, est conditionné par un changement. Dans notre rapport aux phénomènes modifiants, on peut se demander où nous nous situons par rapport à tout cela et quelle est notre part de responsabilité ?
Il n’y a pas forcément deux entités. Soit, une impermanence et nous. Nous sommes l’impermanence. C’est un aspect endogène de l’homme. De par sa constitution, l’Homme est appelé à évoluer. Il nait, grandit et meurt. De façon organique, un être en perpétuel mouvement. Il fut Homo Habilis, Neandertal puis Sapiens. Chasseur-cueilleur, aujourd’hui travailleur.
Son caractère changeant l’oblige à s’adapter en permanence aux transformations de son environnement et aux mutations sociétales dont il s’impose lui-même. Parfois de manière véhémente ou hostile.
En dépit de notre faculté d’adaptation, le paradoxe, c’est que si nous acceptons le changement, on est moins enclin à apprécier ce qui est d’ordre négatif. Nous aimons ce qui tend vers le progrès et n’admettons pas la régression. Au point où cela nous afflige même. Cela relève sans doute d’un conditionnement au niveau de la société où l’amélioration doit être une constante. Pourtant, toute situation de rétropédalage est également constituante d’un changement.
Notre plus grande souffrance pourrait résider dans la frustration que créerait tout changement qui penche vers le sens opposé de ce que nous visons. L’enseignement qu’on pourrait tirer de l’impermanence dans ce genre de cas, c’est de prendre conscience que ce que nous prenions pour acquis n’était en fait qu’une vision erronée. Une illusion éphémère. Qu’in fine, rien n’est définitif.
Loin de moi l’idée de dire ici qu’il faut aller vers une régression, mais réussir à concilier cette antinomie et accepter que les choses varient et ne durent pas pourraient alléger le poids qui pèse sur le cœur de tant de personnes en ce moment (décès, perte d’emploi, chiffres d’affaires en berne, entre autres). En acceptant tout changement, vous serez certainement plus en paix avec vous-même. Et se dire que c’est temporaire et que l’impermanence du cycle de la vie fera qu’un nouveau jour succède à un autre.