Padma Utchanah : « Aucune élection n’est gagnée d’avance »

Padma Utchanah, présidente du Ralliement Citoyen Pour la Patrie (RCP) qui vit en France, est actuellement à Maurice. Elle a eu l’occasion de participer au pèlerinage de Maha Shivaratree et elle a été choquée comme tant d’autres par les événements d’Arsenal où six pèlerins ont trouvé la mort dans l’incendie d’un kanwar.

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Elle aborde d’autres thèmes qui font la une de l’actualité en ce moment, notamment le combat pour obtenir la souveraineté sur les Chagos, la révocation du ministre Hurdoyal, la situation des femmes en 2024 ou encore l’inauguration de la piste d’atterrissage d’Agalega et ainsi que la commercialisation des macaques.
Seriez-vous candidate dans la circonscription numéro 7 (Piton-Rivière du Rempart), et si oui pourquoi ?

C’est une évidence que ma place est au numéro 7, là où est mo nombril mama. Je suis fière d’être une villageoise. En tant que native de Rivière-du-Rempart, je suis à même de comprendre les doléances des habitants. J’ai vécu et grandi dans « lakaz tabisma » à Camp-Beaulieu, je peux ressentir les peines et la colère des citoyens.
J’ai une vision d’ensemble des villages avoisinants avec comme perspective une transformation moderne de ma circonscription, tout en gardant l’âme d’un village. C’est une chance inouïe d’être une villageoise.

Le pays a été choqué par le drame d’Arsenal. Pensez-vous que nous aurions pu éviter un tel drame?
L’équipe LINION MORIS a une pensée pour la famille des victimes. D’ailleurs, nous avons demandé à travers une lettre adressée au Premier ministre de décréter un jour de deuil national.
En matière de sécurité, on ne plaisante pas. Or, le Premier ministre, responsable de la Task Force, a manqué cruellement de fermeté. La pratique religieuse, toutes religions confondues, ne peut être une zone de non-droit.
Hélas, pour des raisons électoralistes, par pur populisme, nous avons évolué vers la démission de l’État et de l’ordre devant les faits religieux, devenus politico-religieux. Les recommandations sont l’apanage des faibles. Il faut édicter une loi afin de réglementer les kanwars. Les kanwars doivent être à hauteur d’homme, c’est-à-dire 2 mètres (longueur) par 2 mètres (largeur), tout en concertant avec les autorités religieuses, afin de garantir la sécurité publique, la liberté de procession et la liberté des croyances. Il est primordial de protéger les pèlerins et de garantir la vie des citoyens.

Pensez-vous que la diaspora devrait être autorisée à voter ?

Définissons d’abord le mot diaspora. C’est un terme pour décrire la dispersion d’une partie de la population au-delà des frontières nationales. La diaspora doit répondre à trois critères (économique, politique, culture). Les Mauriciens d’ici et d’ailleurs cochent parfaitement toutes les cases. Les partis traditionnels n’ont jamais voulu accorder le droit de vote à la diaspora, de peur de bousculer l’ordre établi.
Le Premier ministre a même eu l’outrecuidance de la qualifier « d’antipatriotique » ou « d’insignifiante ». Et ce, alors que la diaspora contribue financièrement à l’essor de notre pays. La diaspora est la meilleure ambassadrice pour représenter notre pays dans le monde entier. Linion Moris garantit ces Mauriciens, hors territoire national, le droit de vote, ce droit fondamental. Ce ne seront pas paroles vaines, mais bien une réalité.

Qui va remporter les prochaines élections générales, d’après vous  ?

Dans toute élection, et c’est ainsi partout dans le monde, il y a un facteur de dynamisme électoral. Aucune élection n’est gagnée d’avance. Regardons 2014. Ramgoolam et Bérenger avaient arithmétiquement déjà remporté les élections mais électoralement c’était une grosse défaite. Il y a aussi dans toute élection un élément de surprise.
Nous sommes encore à plusieurs mois du scrutin. Tout est encore possible. Comme dans un match de football. Ceci étant, ce que je peux dire, la dynamique électorale est du côté de Linion Moris. C’est le groupement qui progresse de manière continue et certaine. Le temps joue en notre faveur. Rama Valayden est le nouveau poids lourd du paysage politique à Maurice.

Le ministre Hurdoyal a été révoqué mais les raisons inconnues. Que pensez-vous de tout cela ?

Si Vikram Hurdoyal a fait quelque chose d’illégal, qui justifie sa révocation urgente un dimanche dans la nuit, Pravind Jugnauth serait responsable de le couvrir…
L’opacité caractérise le régime sortant de Pravind Jugnauth. Il ne rend publics ni les accords signés par l’État de Maurice, par exemple en ce qu’il s’agit d’Agalega, ni les rapports des commissions sur des dysfonctionnements de son administration, ni permet un débat sain à l’Assemblée, etc. L’accès du public aux documents administratifs est quasiment impossible. Fidèle à lui-même, Pravind Jugnauth estime qu’il n’a de comptes à rendre au peuple.

Qu’attendez-vous du prochain budget ?

L’exercice du budget n’est que de l’esbroufe. Ce sont la plupart du temps, des effets d’annonce avec une concrétisation à minima.
Pravind Jugnauth va très probablement utiliser le prochain budget comme son manifeste électoral. Son programme va être le budget où il arrosera copieusement la population à coup d’espèces sonnantes et trébuchantes. Il fera en sorte de mettre des étoiles dans les yeux du peuple pour mieux l’appâter.

Que pensez-vous des répercussions sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine sur Maurice ? Pensez-vous que Maurice devrait choisir un camp?

Maurice doit choisir clairement son camp lorsqu’il s’agit des questions de principe, par exemple le génocide manifeste en cours à Gaza et en Palestine, la Cisjordanie. Quant à la Russie et l’Ukraine, la question est très complexe sur le plan de la géopolitique. La Russie est l’agresseur mais au regard des relations russo-americaines, elle a été provoquée. J’essaie de dire les choses de manière simple. Les Ukrainiens sont les grands perdants.

La piste d’atterrissage d’Agalega vient d’être inaugurée mais l’accord avec l’Inde n’a pas été rendu public.  Pensez-vous qu’elle deviendra une base militaire ?

Tous les indices qu’une partie importante d’Agalega serait une base ou à tout le moins un appui militaire au bénéfice de l’Inde sont là. Il faut être particulièrement aveugle pour ne pas le voir: la superficie, plus grande que Plaisance où le Concorde de François Mitterrand a atterri, est comparable à la piste de Diego Garcia.
La presse indienne l’affirme de manière systématique sans être démentie; l’incapacité du pouvoir politique de Maurice de poursuivre qui que ce soit qui l’affirme pour propagation de fausse nouvelle ou de convoquer le Haut Commissaire indien pour une mise au point, l’inauguration par Narendra Modi lui-même, ce qui véhicule l’importance de cette piste pour les Indiens, etc.

Le combat pour la souveraineté sur le Chagos se poursuit.  Pensez-vous que Maurice gagnera sa souveraineté sur l’archipel ?

Il ne faut rien lâcher. Comme nous le disons à Linion Moris, il faudrait rallier les anciens pays dits non-alignés et au-delà à notre cause. Il faut continuer à faire pression et multiplier les actions.

Que pensez-vous d’une monnaie unique en Afrique ?

Le principe d’une monnaie unique est d’avoir des Economies, en tant que système et de rigueur, comparables. Les différences sont trop énormes en Afrique.

Quel regard portez-vous sur la Femme mauricienne en 2024?

« Femme, réveille-toi ; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers; reconnais tes droits. » Ce sont les mots d’Olympe de Gouges, une des premières féministes et révolutionnaires. Nous sommes certes en 2024, mais la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne écrite en 1791 est toujours d’actualité. Surtout en politique ! Le rôle des femmes en politique est tellement inexistant. À Maurice, les femmes dans les partis mainstream sont cloisonnées dans un rôle d’invisibilité. La gent masculine ne leur laisse guère la place au leadership.
L’existence même de l’aile féminine dans ces partis est une ségrégation. Ces partis traditionnels les relèguent uniquement à cette place. Les femmes doivent faire sauter le verrou de ce cloisonnement ségrégationniste et réclamer l’égalité au sein de ces partis complètement désuets. Avant de commencer la révolution ailleurs, il faut s’attaquer à la racine, c’est-à-dire au sein de ces partis, d’un autre temps.
Par ailleurs, je tiens à honorer un fait historique. Ce lundi 4 mars à Versailles, le parlement français a approuvé l’inscription dans la Constitution du droit à l’interruption volontaire de grossesse. Une victoire écrasante pour les femmes, avec 780 voix contre 72. La France devient le premier pays au monde à inscrire explicitement dans sa Constitution, un droit ô combien vital pour de nombreuses femmes. Le combat d’Olympe de Gouges n’a pas été vain !!!
La polémique enfle autour de la commercialisation des macaques. Est-ce qu’il faut en interdire l’exportation?

Les atrocités que subissent les macaques sont épouvantables. Nous, à Linion Moris, nous avons manifesté contre l’exportation et l’exploitation des singes. Notre camarade Ivor Tan Yan, son épouse ainsi que d’autres militants ont été arrêtés. Nusd voyons que ce sujet dérange en haut lieu. En cas de victoire électorale, Linion Moris stoppera cette barbarie. Mais d’ici là, nous allons redoubler d’efforts afin de faire pression auprès du Gouvernement et de ces entreprises qui ne jurent que par l’argent !!!

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