Port-Louis : Entre renouveau politique et défis municipaux

À partir de la semaine prochaine, une nouvelle équipe municipale prendra les rênes de la mairie de Port-Louis. Tous les regards sont tournés vers l’Alliance du Changement, donnée grande favorite pour cette élection. Forte d’une campagne structurée et d’un terrain favorable, l’Alliance s’avance vers les urnes avec pour ambition de « balye karo », c’est-à-dire d’instaurer une gestion nouvelle et plus rigoureuse de la capitale. En face, les adversaires, lucides quant à leurs chances, se battent pour faire élire quelques conseillers qui pourraient servir de contre-pouvoir au sein de la municipalité.
Au Ward 6, l’Alliance du Changement est déjà assurée d’un élu puisque seulement 7 candidats sont en lice pour 4 sièges. Une situation qui illustre bien l’absence de suspense autour de l’issue du scrutin dans plusieurs quartiers. Face à ce constat, les partis misent sur un message simple : « bizin ena lopozision dan minisipalite », appelant à la vigilance démocratique dans la gestion municipale.
La campagne électorale, elle, s’est déroulée dans une ambiance particulièrement tiède. Peu de réunions nocturnes, peu de rassemblements bruyants avec les candidats qui ont privilégié le porte-à-porte et les messages diffusés via les réseaux sociaux. Plusieurs parlementaires ont dû prêter main-forte aux candidats sur le terrain pour renforcer une campagne qui manquait cruellement de dynamisme.
Un autre facteur d’incertitude demeure le taux de participation. Dix ans après le dernier scrutin municipal, les électeurs sont appelés aux urnes ce dimanche. Pourtant, les candidats eux-mêmes redoutent un fort taux d’abstention. En 2015, seuls 33,6% des Portlouisiens s’étaient déplacés. Cette année encore, un sentiment de désintérêt plane, alimenté par l’absence de figures issues des partis traditionnels de l’opposition. « Mo pa tann bann kandida dir ki proze zot ena pou Porlwi. Monn zis tann zot pe kritik ansien lekip », déplore un habitant de Vallée-des-Prêtres, pointant du doigt le manque de propositions concrètes. Ce désintérêt s’est aussi manifesté lors du Nomination Day, où les centres d’enregistrement sont restés quasiment vides. L’ambiance y était morne, à l’image d’une campagne sans véritable effervescence.
Les profils des candidats reflètent également cette dynamique nouvelle où de nombreux novices en politique sont souvent issus du milieu social ou choisis pour leur proximité avec des parlementaires. Toutefois, quelques figures bien connues font exception : Aslam Hossenally, ancien lord-maire et candidat de l’Alliance du Changement ; Cehl Meeah, ex-député et conseiller municipal, et Daniel Laurent, lui aussi ancien lord-maire, cette fois dans la course en tant qu’indépendant après une carrière au sein du Mouvement socialiste militant (MSM).
Mais au-delà de la bataille électorale, les défis qui attendent la prochaine équipe municipale sont colossaux. Sur le plan financier d’abord, la mairie de Port-Louis affiche un déficit de Rs 200 millions pour l’exercice 2024/2025. La nouvelle administration devra Ser Sintir dans un contexte économique tendu. L’application prochaine de la nouvelle loi sur les administrations régionales pourrait, quant à elle, redistribuer certaines cartes en matière de gouvernance.
Autre dossier sensible : la gestion du Victoria Urban Terminal. Ce projet phare, censé générer des revenus, ne s’est pas révélé rentable. De nombreux marchands ambulants ont abandonné leurs étals, et un étage entier du complexe reste vide. Des discussions sont en cours pour relancer la location des espaces vacants. Enfin, les plaintes des citadins s’accumulent concernant l’entretien des espaces publics : jardins à l’abandon, terrains sportifs délaissés, piscines pas entretenues. La lutte contre la drogue demeure également un enjeu majeur. La mairie est attendue sur le terrain social avec des initiatives culturelles et sportives. Sans oublier les problèmes d’infrastructures : gestion des drains, voirie, et routes dégradées. La tâche s’annonce ardue pour la nouvelle équipe, mais l’espoir d’un vrai renouveau municipal est bien là.