Les choses se précisent en ce qui concerne les demandes de Stay of Execution des Regulations rendant obligatoire le réenregistrement des cartes SIM. La Cour suprême a en effet ordonné, lundi, que tous les affidavits par rapport à ces demandes soient déposés en Cour au plus tard le 18 mars. Cette directive concerne les demandes de Me Pazhany Rangasamy et de l’activiste politique Ivor Tan Yan pour un Stay of Execution contre la mise en application de ces Regulations. Par ailleurs, concernant la demande de Me Rangasamy, l’État et la Data Protection Commissioner ont soumis leurs contre-affidavits ce lundi.
C’est une Assistant Permanent Secretary du Bureau du Premier ministre qui a juré l’affidavit au nom de l’État, où elle demande que la Cour rejette la demande de Stay of Execution des Regulations. Cet affidavit attire l’attention que le ministre des TIC, Deepak Balgobin, a été mis en cause dans cette affaire de façon erronée, car c’est le Premier ministre qui est responsable des Regulations.
Selon l’État, ces Regulations ont été apportées dans l’intérêt public dans le but de combattre le trafic de drogue, et ce, dans le sillage des recommandations de la Commission Lam Shang Leen. Cette commission avait en effet soulevé une problématique dans le processus d’enregistrement existant des cartes SIM, à savoir que certaines personnes peu scrupuleuses se serviraient de cartes d’identité de tierces parties et feraient de nouvelles cartes SIM en leur nom, sans que ces dernières ne soient au courant, en vue d’en faire une utilisation illicite.
La commission avait ainsi recommandé des Regulations afin que toute personne désirant obtenir une carte SIM soit contrainte de fournir certaines informations pour permettre son identification.
Dans cette optique, l’État a souligné l’importance de relier une carte SIM à l’identité et à la photographie de la personne, faisant la démarche. D’où la demande d’une photographie en couleur au moment de l’enregistrement de la carte. Selon les nouvelles procédures, le demandeur doit fournir une copie de sa carte d’identité et une preuve d’adresse. L’opérateur prend alors une photo en couleur de son client, laquelle est comparée à celle de sa carte d’identité, puisée de la base de données des cartes d’identité, avec l’objectif d’empêcher l’usurpation d’identité.
L’État a par ailleurs fait ressortir que sous la Regulation 13, l’opérateur aura l’obligation de prendre des mesures pour empêcher tout accès ou divulgation des données recueillies.
L’État maintient que cet exercice ne lui permettra pas d’accéder aux messages ou autres communications contenues dans la carte SIM, et qu’il ne pourra en outre pas intercepter d’échanges téléphoniques et de courriels.
Un ordre du Juge en chambre sera toujours requis pour qu’un opérateur puisse divulguer à la police ou à l’ICAC toute communication enregistrée sur la carte SIM. Qui plus est, sous la section 46 de l’Information and Communication Technologies Act, la divulgation non autorisée de telles communications constituera toujours un délit. L’État n’a pas manqué de faire ressortir que, selon le processus existant avant l’entrée en vigueur de ces Regulations, les opérateurs détenaient déjà une copie de la carte d’identité. En outre, la prise d’une photo « n’a rien de nouveau » et est exigée pour toute demande de passeport ou de carte d’identité. L’État réitère que le stockage de ces photos permet d’éviter que les opérateurs n’enregistrent une carte SIM à l’insu de quelqu’un.
L’État précise par ailleurs que la section 48 de l’Information and Communication Technologies Act permet au ministre de tutelle d’apporter des Regulations en ce qui concerne l’enregistrement des cartes SIM, et qu’il n’y avait ainsi pas lieu de débats parlementaires.
Par ailleurs, l’État soutient qu’il n’y aura aucune base de données biométriques. Dans ce contexte, l’affaire apportée par feu Madhewoo concernant la prise et le stockage d’empreintes digitales, le jugement de la Cour suprême et l’avis du Comité des droits humains des Nations Unies ne sont pas pertinents dans le cadre de cette affaire. En outre, l’État mauricien n’a nullement ignoré ou essayé de contourner l’avis des Nations Unies, mais avait donné son point de vue dans cette affaire, et attend maintenant la réponse des Nations Unies.
Par ailleurs, un Senior Data Protection Officer a juré l’affidavit au nom de la Data Protection Commissioner. Dans cet affidavit, cette dernière a fait ressortir que la Data Protection Act fournit le cadre légal pour le contrôle de toute entité engagée dans la collecte de données personnelles et le traitement et l’usage qui en est fait, ainsi que leur destruction et leur divulgation, et ce, sans négliger l’aspect sécuritaire. Il a souligné que cette loi est contraignante envers l’État.
La Data Protection Commissioner maintient qu’aucune partie des Regulations ne contrevient la Data Protection Act. Elle qualifie de fait la démarche de Pazhany Rangasamy de « misconceived » et étant « devoid of merits ». Elle a par conséquent invité la Cour à rejeter la demande de Stay of Execution.
Le représentant de Mauritius Telecom a pour sa part demandé un renvoi car son affidavit n’était pas encore prêt.

