Rs 25,6 milliards englouties – pension : l’assurance de la CSG remise en question

Actuaires et fiscalistes : « L’État n’a pas les moyens d’assurer la hausse de Rs 4 500 du BRP »

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Les éléments de réponse fournis suite à l’interpellation parlementaire adressée au ministre des Finances, Renganaden Padayachy, au sujet de la Contribution Sociale Généralisée (CSG) ont remis sur le tapis la réalité brutale de la réforme de la pension initiée par le MSM, sans aucune consultation avec les professionnels du secteur, ni les employeurs et encore moins les employés, et largement contestée. Des doutes surgissent quant à l’assurance, voire la viabilité, de la CSG pour assurer la révision à la hausse de Rs 4 500 de la Basic Retirement Pension (BRP). Une réalité sans doute trop vite oubliée, à l’effet que contrairement au National Pensions Fund, la CSG n’est pas un fonds permettant d’accumuler et d’investir les cotisations des employés et des employeurs.
Les cotisations collectées à ce jour et totalisant Rs 25,6 milliards, soit de 2020 à septembre 2023, ont donc été injectées directement dans la caisse du gouvernement et en sont ressorties aussitôt pour payer la hausse de la pension de vieillesse et diverses autres allocations annoncées dans le budget. Les actuaires et autres professionnels s’évertuent à faire comprendre les effets néfastes sur le long terme de la CSG depuis la mise en œuvre de ce projet il y a trois ans.
Pourtant au Parlement, Renganaden Padayachy n’a cessé de répéter qu’il « ne faut pas s’inquiéter », laissant comprendre la possibilité d’ une baguette magique. Il a souligné que de 2020/21 au 30 septembre dernier, les cotisations des employés et des employeurs à la CSG ont totalisé Rs 25,6 milliards, dont Rs 5,3 milliards en 2020/21, Rs 8,3 milliards en 2021/22, Rs 9,5 milliards en 2022/23 et Rs 2,5 milliards pour le premier trimestre de 2023/24.
Mais ces Rs 25,6 milliards de cotisation des employés se sont volatilisées en un rien de temps pour le paiement de CSG Allowance, de l’augmentation de la pension et du Housing Loan Scheme, entre autres.

« Population bernée »

« Il ne faut pas croire que la CSG est un fonds comme l’était le NPF, nous l’avons dit à plusieurs reprises dans le passé. La CSG n’est pas un fonds d’investissement comme le NPF », soutient un fiscaliste de la place.  « Cette taxe est versée dans les caisses de l’Etat au même titre que l’Income Tax, la TVA, les droits de douane, les droits d’accise, la taxe d’enregistrement, etc., » dit-il, soulignant que la CSG a été introduite par le ministre des Finances « pour financer l’augmentation de la Basic Retirement Pension de Rs 9 000 à Rs 13 500 » ainsi que pour payer des prestations sociales comme la CSG Income Allowance, la CSG Child Allowance et autres.
« En fait, le gouvernement a berné la population avec la CSG, car il fallait trouver un prétexte pour prendre l’argent des salariés et le mettre dans la caisse du gouvernement. La population n’y voit et verra que du feu », fait-il comprendre.
Or, ce professionnel de la taxe estime que le NPF était « solide », avec des investissements valant environ Rs 140 milliards. Il s’interroge également sur le montant des cotisations évoqué par le ministre Padayachy, notamment pour 2022/23, à hauteur de Rs 9,5 milliards, « ce chiffre n’est pas correct ».
Les indications sont qu’il faudra s’attendre à une révision à la hausse du taux de cotisation, car « le gouvernement n’a pas les moyens d’augmenter la pension de vieillesse par Rs 4 500, pour la porter à Rs 13 500, surtout avant fin 2024 », et  l’argent collecté sous la CSG ne suffira pas cela d’autant qu’il faut financer d’autres allocations avec les cotisations de la CSG.
« Le ministre des Finances se verra obligé d’augmenter les autres taxes, comme l’impôt sur le revenu et augmenter le taux de cotisation à la CSG ou alors recourir à des emprunts additionnels pour financer la hausse de la pension de vieillesse promise alors que l’échéance des prochaines élections générales se précise ! Donc, qu’on ne vienne pas nous dire de ne pas nous inquiéter. Ces Rs 4 500 promises devront bien sortir de quelque part ! La population et les observateurs ont bien raison de s’inquiéter car les taxes et cotisations vont augmenter, ainsi que le déficit budgétaire… », s’insurge-t-on dans les milieux avertis.

« Un chat… un chat ! »

Les actuaires aussi n’en démordent pas : « Il est grand temps d’appeler un chat un chat ! La CSG est un impôt destiné à financer la pension de vieillesse. La CSG est aujourd’hui un impôt direct important, après l’Income Tax », lâche un membre de la profession. « Dans un fonds de pension, on collecte, on accumule des fonds et on les fait fructifier en les investissant. La CSG n’a pas de fonds. La CSG n’est pas un fonds de pension. Les cotisations des employés sont dépensées durant la même année financière.»
Interrogé sur le « Il ne faut pas s’inquiéter » du ministre Padayachy, cet actuaire constate que « bien sûr qu’il n’est pas inquiet car il va continuer à augmenter la taxe et le seuil des cotisations dans le futur pour financer la hausse de la pension. En fait, avec la CSG, le gouvernement s’est doté d’une nouvelle source de revenus. »
Ce professionnel estime que la CSG est mieux adaptée aux pays où la population est jeune et pas à ceux où la population est vieillissante comme à Maurice. « La situation va se détériorer pour nous, surtout que la population vieillit mais régresse également, et que l’argent des cotisations n’est pas investi et n’est pas fructifié comme c’était le cas avec le NPF. » Pour lui, la CSG n’est pas un système équitable : « Si nous comparons nos cotisations d’aujourd’hui avec la pension que nous aurons à la retraite, c’est comme si nous contribuons un bœuf, pour avoir un œuf. »
Un dossier qui alimentera la chronique politique à coup sûr compte tenu que la pension est un élément majeur de campagne électorale…

CSG et inflation

Dans la conjoncture, certains professionnels du monde financier sont d’avis que le ministre des Finances « pourrait laisser filer l’inflation » afin d’entraîner une hausse des salaires – pour faire face au pouvoir d’achat – et par ricochet une hausse automatique du volume des cotisations à la CSG, sans que le gouvernement n’ait même à augmenter le taux de cotisation.
Cette théorie n’est d’ailleurs pas sans rappeler le commentaire récent du leader de l’opposition au parlement, à l’effet que l’inflation « est la meilleure amie » du ministre des Finances…

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