Le Criminal Appeal and Criminal Review Bill, présenté par l’Attorney General, Gavin Glover, a été adopté. Présentant ce projet de loi, il a déclaré que l’objectif est de garantir « une justice plus cohérente, accessible et équitable dans nos cours de justice ». À l’heure actuelle, la procédure d’appel en matière pénale « est fragmentée et contraignante ».
En effet, les procédures sont dispersées dans plusieurs lois, notamment The Criminal Appeal Act, The Courts Act et la Criminal Juridication Act. Le gouvernement promet de rendre la justice plus accessible et de faciliter la compréhension de la justice pour les profanes.
« Certes, nous adhérons à la maxime selon laquelle nul n’est censé ignorer la loi. Mais nous ne pouvons ignorer le fait que le volume cumulé de toutes les lois applicables dans un pays comme Maurice est tout simplement énorme. Même le juriste le plus expérimenté ne peut prétendre connaître toutes nos lois. La question se pose donc : comment être équitables envers nos citoyens ? Le mieux que nous puissions faire est de faciliter concrètement l’accès à la justice. Dans les prochaines semaines, un site web sera mis sur pied faisant état de toutes les lois mises à jour en vigueur à Maurice, librement accessibles, sans procédure de signature complexe ni incertitudes quant aux versions antérieures et aux amendements », a déclaré l’Attorney General.
Les règlements seront mis en ligne peu après, a poursuivi ce dernier. « Nous introduisons également des modifications qui amélioreront l’équité de traitement des accusés. Désormais, il ne peut s’écouler plus de 28 jours entre le moment où une personne est reconnue coupable d’une infraction et le prononcé de la peine par une cour de justice. Des dizaines de personnes attendent aujourd’hui des mois, voire des années, en prison avant de connaître leur condamnation. Il s’agit d’une situation intolérable qu’il faut absolument abolir.
Selon Gavin Glover, ce projet de loi impose une obligation importante : toutes les cours de justice doivent désormais informer une personne condamnée de son droit d’appel immédiatement après le prononcé d’un jugement. « Le verdict d’un jury peut faire l’objet d’un appel devant le DPP, mais seulement dans des circonstances limitées, lorsque le verdict est déraisonnable ou qu’une irrégularité grave a entaché le procès. La procédure d’appel est désormais simple lorsqu’un accusé conteste sa condamnation. Le délai est de 21 jours à compter de la condamnation », précise-t-il.
Le DPP peut saisir la Court of Criminal Appeal si des preuves nouvelles et convaincantes sont révélées dans une affaire. « A convicted person may similarly request a review but here it is by the Human Rights Division of the National Human Rights Commission on the same ground. This is a safeguard. It is not a political tool nor an appeal in disguise », a dit l’Attorney General.
Ce projet de loi n’impose pas un délai obligatoire pour que les jugements soient rendus par les cours de justice, mais « nous envisageons sérieusement cette réforme. Nous discuterons davantage avec le judiciaire et respecterons tous les points de vue et les contraintes auxquelles il est confronté, mais le temps de le faire viendra », a déclaré Gavin Glover.
La raclée de bois vert à Adrien Duval
Lors de son Summing-Up, l’Attorney General Gavin Glover s’est focalisé sur certains points soulevés par le Whip de l’opposition, Adrien Duval, lors de son intervention. Tout en critiquant les sièges vides de l’opposition, il a fustigé Adrien Duval qui, selon lui, a soulevé un « point extraordinaire », notamment que c’est un projet de loi qui a été présenté en « ambush », ce qui n’est absolument pas le cas. Pour Gavin Glover, cela est une « surprising accusation », mais qui est « devoid of merit ».
Répondant à Adrien Duval au sujet des consultations avec le Bar Council, la Law Society et la Law Reform Commissionn l’Attorney General a expliqué que si c’était nécessaire, « cela aurait été fait ». Or, le présent projet de loi concerne essentiellement le judiciaire, qui sera chargé de mettre en application les dispositions de cette loi, et il y a eu des consultations à tous les niveaux avec le judiciaire. En outre, il n’y a aucune obligation constitutionnelle de consulter avec quelconque External Body avant de présenter un projet de loi à l’Assemblée nationale. « D’ailleurs, le bureau de l’Attorney General est pleinement familier avec le fonctionnement de nos cours de justice et les défis auxquels ils font face » , rassure-t-il.
Gavin Glover a maintenu qu’il y a une incompréhension du whip de l’opposition sur le projet de loi. Selon lui, si ce dernier n’a pas lu le projet de loi, il ne va pas le comprendre. L’Attorney General a ainsi expliqué que « le présent projet de loi ne fait que clarifier et simplifier des dispositions déjà existantes, quoique certaines procédures aient été modifiées pour être plus équitables envers les prévenus. »
Ce qui a fait sortir Gavin Glover de ses gonds : le fait que le whip de l’opposition l’ait attaqué pour avoir remis en question le droit d’appel. « Comment ? Il n’a jamais expliqué cela », a-t-il renchéri.
Un autre point qui avait été soulevé par le whip de l’opposition : le fait que le droit d’appel n’ait pas été mentionné en ce qui concerne les peines avec sursis et les travaux communautaires, ce que l’Attorney General a qualifié de « nonsense ». « He should be ashamed to make such clearly erroneous statements in the House », fustige-t-il. Il a expliqué que les peines avec sursis et les travaux communautaires ne sont ordonnés par un tribunal que comme mesure de substitution aux peines d’emprisonnement, qui sont l’objet du présent projet de loi.
Un autre point soulevé par Adrien Duval sur la clause 22 du projet de loi, qui a trait aux appels par rapport aux défectuosités dans les actes d’accusation, a été qualifié par Gavin Glover comme une autre « grave misconception » du whip de l’opposition. Cela alors que le principe contenu dans cette clause existe déjà dans les lois actuellement en vigueur.
En résumé, selon l’Attorney General, un brin sarcastique, « en simplifiant et en clarifiant la loi, le projet de loi fera de sorte que les praticiens du droit qui ne connaissent même pas les concepts de base du droit pourront se référer à une seule loi, cela afin qu’ils puissent mieux conseiller leurs clients sur le processus d’appel ».
SHAKEEL MOHAMED, ministre du Logement et des Terres
« Certains ont le don de
compliquer ce qui est simple »
Le ministre des Terres et du Logement, Shakeel Mohamed, a d’abord exprimé son incompréhension face à l’attitude de l’opposition, dont les trois membres étaient absents de l’hémicycle. « They are not here again, it is a pity because it shows how they hold this population in esteem », lance-t-il d’entrée de jeu.
Pour Shakeel Mohamed, ce projet de loi ne fait que clarifier et simplifier un processus judiciaire devenu obsolète. « There are certain words that are used that in fact gives the clue as to what exactly this legislation is all about. Clarify, simplify, standardize. It is clear that this bill is doing nothing else than simply do exactly what those three words say », ajoute-t-il. En réponse aux propos d’Adrien Duval, il souligne que le projet de loi respecte pleinement la Constitution. « My late father always said: go to the law, read the Constitution. And section 10.5 clearly allows for what is proposed in this bill. (…) The only thing that the Attorney General has done is clarify everything. Nothing more », laisse-t-il entendre.
Le ministre a dénoncé ce qu’il considère comme une tentative délibérée de compliquer un texte pourtant limpide. « It takes some qualities in certain people to be able to complicate what is simple. And it’s exactly what I have witnessed today », estime-t-il. Il a aussi défendu la méthode du gouvernement : « This government understands the meaning of consultation. The proof is the Finance Bill being circulated well in advance for debate. We do not have the monopoly of knowledge. »
Enfin, il a salué le travail de l’Attorney General, Gavin Glover, pour avoir permis une meilleure accessibilité à la justice : « The purpose of all this is to create ease of access, clarity, resource optimization, efficiency, all this is in the spirit of giving sense to what democracy is. » Pour Shakeel Mohamed, cette réforme est une respiration démocratique. « We breathe democracy, not just write it in a book », fait-il ressortir.
MANOJ SEEBURN, backbencher
« Les procédures d’appels sont simplifiées »
Manoj Seeburn a déclaré que ce projet de loi vise à clarifier et à sécuriser ce domaine de la justice afin de simplifier les procédures d’appel et de révision à tous les niveaux du système judiciaire, dans le cadre d’une législation consolidée et réfléchie.
Malheureusement, selon lui, le député de l’opposition, Adrien Duval, a affirmé que ce projet de loi avait été présenté en l’espace de quelques jours seulement. « Cela est inexact, car le programme gouvernemental indiquait déjà que ce projet de loi était en préparation. Dans le système actuel, les appels et les révisions en matière pénale sont régis par des lois, une jurisprudence et des règles de procédure dispersées. Les cours de justice fonctionnent selon des législations différentes, ce qui crée une confusion, en particulier pour les personnes vulnérables qui souhaitent contester une condamnation ou une peine », dit-il.
Ce manque d’uniformité risque de saper les principes mêmes sur lesquels repose notre système judiciaire, notamment l’équité, l’accessibilité et l’égalité de traitement devant la loi, ajoute-t-il.
Ce projet de loi constitue une avancée majeure dans « l’administration de la justice dans notre pays. Il unifie les droits d’appel de tous les recours en matière pénale, qu’ils soient formés contre la décision définitive de la Cour suprême, contre la décision définitive de la Cour de district de la Cour intermédiaire ou de la Children’s Court, au sein d’une législation unique et cohérente », affirme-t-il.
Ce faisant, il renforcera la sécurité juridique et protégera les droits de toutes les parties impliquées dans les procédures pénales. Il impose clairement l’obligation aux cours de justice d’informer immédiatement la personne condamnée de son droit d’appel, a dit le député.
RAJEN NARSINGHEN, Junior Minister aux Affaires étrangères
« Notre cadre juridique était
devenu obsolète et fragmenté »
Le ministre délégué aux Affaires étrangères, Rajen Narsinghen, a défendu le Criminal Appeal and Criminal Review Bill et exprimé sa déception face à l’intervention d’Adrien Duval, le Whip de l’opposition. « J’attendais beaucoup de lui, j’attendais qu’il présente des arguments valables sur les Shortcomings du Bill, mais il a choisi un autre chemin », dit-il.
Pour Rajen Narsinghen, ce projet de loi est une étape clé dans la consolidation de la démocratie et de l’État de droit. « Il vise à renforcer la transparence, moderniser les institutions et garantir l’égalité devant la loi, la sécurité juridique et la séparation des pouvoirs ». Il s’agit, selon lui, d’un texte fondamental, né d’une véritable volonté politique qui, a-t-il dit, faisait défaut par le passé : « The political will did not exist before, and today we see this will materialising. » Le ministre a souligné que le système actuel repose sur des lois désuètes : « The current law dates back to 1954 and other pieces of legislation are fossils, impregnated with colonial traces », maintient-il. Et il a reproché à l’opposition de vouloir conserver ce cadre obsolète.
Le projet de loi corrige plusieurs lacunes, a déclaré Rajen Narsinghen. « Before, there was legal incoherence, and the rules were scattered across multiple pieces of legislation », a-t-il dit. Cette dispersion « entraînait une complexité procédurale excessive, inaccessible pour les justiciables non représentés, et provoquait des lenteurs judiciaires nuisibles à la crédibilité du système ».
Le nouveau texte « centralise, clarifie et simplifie les procédures d’appel et de révision pénale ». Il introduit un leave to appeal pour filtrer les recours abusifs, permet l’introduction plus souple de nouvelles preuves, et ouvre la voie à une gestion numérique des procédures : « We are moving towards a digitalisation of the appeal process, accelerating treatment and reducing administrative burdens ».
Enfin, Rajen Narsinghen estime que cette réforme « aligns Mauritius with the best international practices and responds to the needs of a modern justice system .»
KHUSHAL LOBINE, leader des Nouveaux Démocrates
« Il est devenu Speaker par la petite porte »
L’intervention de Khushal Lobine, leader des Nouveaux Démocrates, sur le Criminal Appeal and Criminal Review Bill, a été incisive à l’encontre d’Adrien Duval. ll n’a pas mâché ses mots : « He became speaker from the backdoor. » Il a reproché à son collègue de l’opposition de ne pas comprendre les clauses du projet de loi : « He is completely cut off from debates and reality. »
D’après lui, Adrien Duval n’a pas été à la hauteur des débats, s’égarant dans des références obsolètes et oubliant que les discussions sur la réforme du système d’appel criminel datent de 2012. « What surprises me is the lack of decorum and lack of elegance from a member. But what can we expect from somebody who came through the back door and entered in the previous government? » dit-il.
Il s’est également dit très triste que l’intervenant, qui est de surcroît avocat de profession, soit incapable de saisir la portée de ce texte législatif. « Either he understands the bill or he pretends not to understand. But if he doesn’t understand, there is a problem with regards to his capacity as a lawyer », se demande-t-il
Au-delà des critiques, le député du No. 15 a défendu vigoureusement le projet de loi présenté par l’Attorney General, Gavin Glover. Il s’agit, pour lui, d’une réforme majeure pour rendre la justice plus accessible, en garantissant « fairness, legal certainty and access to justice. »
Le texte introduit plusieurs nouveautés importantes : l’imposition d’un délai de 14 jours pour prononcer une sentence après une condamnation, un processus d’appel standardisé avec des échéances claires, impliquant une meilleure gestion des dossiers par le Court Registry. Autre avancée notable : la possibilité pour les tribunaux de notifier systématiquement le droit d’appel à une personne condamnée, ce qui représente un « transformative procedural safeguard ».
Le projet de loi prévoit aussi un mécanisme de révision des procès après acquittement ou condamnation, s’il apparaît de nouvelles preuves. Khushal Lobine a conclu en soulignant que Maurice se met au diapason des autres démocraties : « We are acting in solidarity with other democracies, tackling the same systemic issues through principled reform », affirme-t-il.