Des réseaux sociaux

Si le talent d’un avocat se mesure à sa capacité à se mettre en scène au niveau médiatique, après son show de lundi dernier, Rama Valayden mériterait d’être fait QC. Après avoir appris que la police allait l’intérroger le lendemain matin pour sa participation à la marche pacifique pour la Palestine – qui, il ne pouvait l’ignorer, était illégale –, il a invité le CID à venir le chercher sur le champ au lieu d’attendre le lendemain. Et un responsable de la police – sans doute, un des concepteurs du spectacle Flics en délire de feu le CP Kowlessur – a accepté la proposition de Rama Valayden et a dépêché une escouade à son domicile. Entre-temps, l’avocat metteur en scène avait battu le rappel de quelques amis avocats et avait réveillé sa famille pour accueillir la police au petit matin. Il avait surtout branché ses caméras de téléphone pour filmer et diffuser en direct les images de son interpellation qu’il fit passer pour une arrestation. Par des policiers visiblement très gênés de procéder à une interpellation ordonnée par leurs supérieurs sans en savoir le motif. On assista, alors en direct, à cette séquence qui mériterait d’être diffusée dans les bêtisiers : des policiers devant téléphoner aux Casernes centrales pour savoir pourquoi ils venait interpeller l’arrêter Rama Valayden. La diffusion de son interpellation /arrestation a permis à l’avocat de jouer le rôle qu’il affectionne : celui du dénonciateur de tous les complots. En faisant oublier qu’il est aussi un des défenseurs très demandés des trafiquants de drogue.
Le show de l’arrestation /interpellation se transforma en farce dans la journée de lundi quand la police fut obligée de laisser partir l’avocat sans retenir aucune charge contre lui. Mais surtout, quand le responsable du CID tenta d’expliquer l’inexplicable : pourquoi la police était allée chercher l’avocat à son domicile à 2h du matin. C’est, avança le gradé, à la demande de l’avocat lui-même que la police était allée l’interpeller à son domicile au petit matin. Il existerait, donc, au sein de la police mauricienne un service d’interpellation à la demande que ceux qui doivent être interpellés peuvent utiliser en choisissant leur heure? Mais au-delà de la farce, ce qui s’est passé aux petites heures du matin, lundi, montre à quel niveau est réduite la direction de la police mauricienne dont le ministre responsable ne cesse de vanter les mérites. En oubliant de dire que dans toutes les affaires de drogue, on finit toujours par trouver un membre de la force – surtout des gradés – qui ont aidé les passeurs à se faufiler à travers les filets… de la police !
L’autre leçon à retenir du show de Rama Valayden aux dépens de la police est le rôle important que jouent les réseaux sociaux, que le gouvernement tente de contrôler à travers l’opération lancée par l’ICTA. Si la principale « proposition » de l’organisme présidé par Dick Ng Sui Wah pour contrôler la diffusion des posts sur les réseaux sociaux avait été imposée, le comité aurait, sans nul doute, interdit la diffusion de l’interpellation en direct par la police de l’avocat. La même censure aurait été, sans doute, réservée aux clips qui ont fait le buzz, samedi, quelques heures avant le show de l’avocat. Celles montrant des officiers de la Child Development Unit arrachant littéralement de leur mère deux enfants à l’hôpital du Nord pour les conduire dans un Shelter. Une unité dont la mission est de veiller à la protection les droits des enfants et qui, dans ces clips, s’est comportée comme des kidnappeurs agissant en pleine nuit sous la protection de la police. De même, les images prises par satellite montrant Agaléga transformée en ce qui ressemble de plus en plus à une grosse base pour accueillir des avions gros porteurs et des gros navires auraient été interdites si le comité de censure de l’ICTA avait été mis en place. Tout ça pour dire que malgré leurs imperfections – et les abus et dérapages de certains utilisateurs –, les réseaux sociaux ont un rôle fondamental dans la transmission de l’information. Il faut, plus que jamais, se mobiliser pour qu’ils ne soient pas muselés.

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