Centre financier international de première ou de troisième classe ?

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L’inclusion de Maurice sur la liste des juridictions du Groupe d’action financière (Financial Action Task Force) faisant l’objet d’une surveillance accrue remet en question le concept de Maurice comme Centre financier international. Cette inclusion pourrait avoir des implications très significatives sur la proposition de valeur de la juridiction.
Un pays qui veut se positionner comme un centre financier international doit se comporter et avoir des règles qui s’alignent sur les meilleures pratiques internationales. Nous ne pouvons pas être sur une liste grise et en même temps dire aux gens que Maurice est un Centre financier international avec des banques fantastiques qui peuvent les aider à financer leurs sociétés, qu’il y a un secteur offshore très bien informé qui peut structurer les véhicules d’investissement et leur fournir tous les services nécessaires pour gérer leurs entreprises.
L’UE affirme que Maurice a des « déficiences stratégiques ». Comment peut-on avoir un « Centre financier international » avec des « déficiences stratégiques »? Les Bahamas, la Barbade, le Panama ne sont pas des pays avec lesquels on voudrait que Maurice soit positionné.
Voyons les 5 points sur lesquels Maurice a encore besoin d’apporter des améliorations significatives :
1.Démontrer que les superviseurs de son secteur des affaires mondiales et des entreprises et professions non financières désignées (Designated Non-Financial Businesses and Professions – DNFBP) mettent en œuvre une surveillance fondée sur le risque;
2.Assurer l’accès aux autorités compétentes et en temps opportun à des renseignements de base exacts et sur les propriétaires des bénéfices;
3.Démontrer que les organismes d’application de la loi (Law Enforcement Agencies – LEA) ont la capacité de mener des enquêtes sur le blanchiment d’argent, y compris des enquêtes financières parallèles et des affaires complexes;
4.Mettre en œuvre une approche fondée sur les risques pour la surveillance de son secteur des organisations à but non lucratif (OSBL) afin de prévenir les abus aux fins de financement du terrorisme, et
5.Démontrer la mise en œuvre adéquate de sanctions financières ciblées par le biais de la sensibilisation et de la supervision.
Ce sont ces insuffisances qui permettent à des entités mauriciennes d’accepter des « clients douteux et leur argent ». Or, il faut pouvoir protéger les acteurs sains de ce secteur, (qui comprend les IRS et les RES, les banques, le secteur offshore, entre autres), de ces entreprises douteuses qui réalisent d’importants profits au détriment de la réputation des pays.
Maurice doit, par conséquent, décider si elle veut être une juridiction de première classe ou une juridiction de troisième classe. « Première classe » signifie que nous corrigerons ces « lacunes stratégiques » et commencerons à dire non à certains types d’entreprises. Ce faisant, nous établissons des normes plus élevées pour notre pays, les employeurs et les employés ; et nous rehaussons les valeurs de l’ensemble de la collectivité. Lorsque l’on fait cela, il est possible de facturer un prix plus élevé pour votre service et les gens seront prêts à payer, parce qu’ils savent que vous êtes le meilleur.
À l’opposé, si l’île Maurice reste sur la liste grise, les entreprises de bonne qualité vont s’éloigner. Cela signifie que les banques mauriciennes auront moins de dépôts en devises. Pour cette raison, ils devront payer des taux d’intérêt plus élevés pour obtenir plus de dépôts, ce qui signifie qu’ils auront ensuite besoin de prêter à des taux d’intérêt plus élevés. Cela signifie que les coûts vont monter pour tout le monde à Maurice.
En outre, il faut aussi considérer que le secteur offshore est un gros employeur, Si Maurice reste sur la liste grise, alors les clients quitteront Maurice pour aller à Singapour ou au Luxembourg ; ce qui entraînera des licenciements dans le secteur offshore.
Enfin, il nous faut aussi considérer le pire des cas : les banques internationales pourraient éloigner leurs activités de Maurice pour ne pas engager leur réputation par voie de contamination. Comment procéderons-nous alors aux paiements de nos importations ? Et comment recevrons-nous des paiements pour nos exportations?
Comme on peut le constater, les conséquences sont considérables non seulement pour le secteur financier, mais pour l’ensemble de nos activités économiques. Le gouvernement ne peut pas faire le dos rond et jouer l’attentisme sur cette question. Encore plus par ces temps où notre économie est mise à rude épreuve, c’est un enjeu vital qui dépasse toute visée partisane. C’est une question qui requiert, d’une part, de la volonté et un consensus politique et, d’autre part, une démarche résolue de la part de tous les acteurs pour atteindre cette excellence que nous avons déjà posé comme ambition pour notre centre financier.

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