HERBICIDES ET PESTICIDES | Utilisation abusive Arrêtez de nous empoisonner !

GÉRALDINE HENNEQUIN-JOULIA

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Leader, Idéal démocrate

Les Nations unies ont reconnu, pour la première fois, le 7 octobre le droit à un

GÉRALDINE HENNEQUIN-JOULIA
Leader, Idéal Démocrate

environnement « propre, sain et durable » à toute personne. Résolution réclamée par de nombreuses organisations internationales et qui est passée totalement inaperçue à Maurice sinon soulignée par Vikash Tatayah de la Mauritian Wildlife Foundation. L’État mauricien, pour sa part, regarde ailleurs. Les priorités sont autres ! Le changement climatique est à peine une ligne sur leurs discours pour la galerie. La presse non plus n’a pas le temps de s’attarder sur une telle avancée ; elle préfère notamment pour quelques titres qui s’en sont fait une spécialité nous gaver des cas de sodomie du jour ou de meurtres les uns plus graveleux que les autres ! Merci à Shenaz Patel d’avoir attiré l’attention sur cette question le 12 octobre dans un plaidoyer qu’elle a titré « Notre poison quotidien » paru dans Week-End !

Pourtant, nous devrions, nous insulaires, dont la production alimentaire pour notre population n’atteint que péniblement la barre des 22%, nous soucier au premier plan de la santé environnementale. Nous devrions savoir que chaque action, aussi petite soit-elle, entraine une conséquence sur le climat. Mais pas seulement. Sur notre santé également.

Il est plus qu’urgent de parler ici du très inquiétant rapport rédigé par Nitin Rughoonauth, du Department of Physics, Faculty of Science, University of Mauritius, et qui a été relayé par l’Institut Charles Telfair. Rapport que le mouvement Fight for Future a essayé tant bien que mal de diffuser également sur les réseaux sociaux. Il concerne l’utilisation des herbicides et pesticides à Maurice, sur nos fruits et légumes.

Savez-vous, chers concitoyens, que pendant que Mme Leela-Devi Dookun-Luchoomun enfourche un vélo pour réaliser une vidéo de quelques minutes pour la galerie, Maurice est le plus important utilisateur de pesticides au monde ! Vous avez bien lu – un rapport de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Voyez vous-même : 3418 kilos par kilomètre carré. C’est même un chiffre record ! L’Universitaire Nitin Rughoonauth attire notre attention sur le fait que le rapport de 2020 sur la question montre qu’il y a eu une augmentation de l’utilisation de ces poisons de 22,3%, ces trois dernières années.

Alors oui, les politiciens peuvent venir en costard cravate nous annoncer des plans sur la comète pendant que nos légumes et nos fruits sont aspergés quotidiennement de poisons. Pendant qu’ils se chamaillent sur quelles alliances leur seront plus favorables aux prochaines élections pour qu’ils maintiennent tous leurs statuts (parti au pouvoir et partis d’opposition confondus) nos terres se gorgent jour après jour, depuis des années de ces pesticides et herbicides qui ont des conséquences réelles sur la santé des Mauriciens.

D’ailleurs, les touristes seraient sans doute étonnés de savoir ce que contiennent nos fruits et légumes qu’on leur présente dans de belles assiettes !

Que dit ce rapport ?

1. Il revient sur l’appauvrissement de la fertilité des sols qui est une des premières conséquences de l’utilisation intensive des pesticides. Pour remédier à cela le déversement des fertilisants a été une pratique courante dans nos champs. Pourtant, elle ne favorise pas des productions conséquentes. Le rapport note bien qu’entre 2009 et 2020, l’utilisation de fertilisants a baissé de près de 50% mais qu’en même temps l’utilisation de pesticide pendant la même période a augmenté de presque 24%. Pourquoi donc plus de pesticides alors que la production alimentaire venant de nos champs a baissé considérablement.

2. La contamination des nappes phréatiques et de l’air. Une étude menée durant deux ans par le Mauritius Research Council (MRC) sur la qualité de l’eau venant des plantations suite aux grosses pluies révèle la présence d’herbicide plus d’une année après son utilisation. L’Universitaire Rughoonauth souligne suivant ces recherches que ceci explique qu’aucune de nos nappes phréatiques n’est à l’abri de cet autre poison qu’est l’herbicide. Ne pointons pas du doigt seulement les plantations en oubliant les cours de golf qui utilisent aussi de l’herbicide en veux-tu en voilà pour garantir ces tapis verts d’un incroyable esthétisme. Tant pis pour notre santé !

La mesure de la qualité de l’atmosphère dans une étude menée entre 2010 et 2018 indique une importante présence de 27 pesticides dans l’air que nous respirons. Cette étude pour la seule région de Réduit montrait même la présence de pas moins de 12 de ces pesticides dont certains déjà interdits d’utilisation à Maurice depuis 2004 ! Mais qui contrôle quoi ? Les lois et les règlements ne sont pas des abris de bonne conscience. Ils doivent être appliqués. Quelle catastrophe de devoir venir dire de telles évidences !

3. Ce rapport démontre l’inefficacité criante des lois et des organismes de contrôles mis sur pied successivement depuis les années 70. La législation comporte trois textes législatifs – Food Act qui inclut le Foods Regulations, le Dangerous Chemicals Control Act (DCCA) et Use of Pesticides Act (UoPA) qui sont loin d’être suffisants et parfois même semblent se contredire. Bref, le brouillard qui ne permet aux organismes de contrôle de pouvoir agir avec efficacité.

4. La partie de ce rapport qui nous inquiète au plus haut point est la corrélation entre toutes ces données et la santé des Mauriciens. Selon Nitin Rughoonauth, le gouvernement lui-même reconnait qu’un meilleur contrôle de l’utilisation des pesticides est un axe primordial dans le National Cancer Control Programme Action Plan.

Tout est inextricablement lié : le climat, notre environnement et notre santé. C’est en cela qu’il est pertinent d’aborder le développement durable.  Alors que le Conseil de l’ONU affirme que « l’exercice du droit de bénéficier d’un environnement propre, sain et durable est un élément important de la jouissance des droits de l’homme », il est grand temps que nos dirigeants veillent au renforcement des lois en matière de protection de l’environnement, afin de s’acquitter de leurs obligations et engagements en matière de droits humains.

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