La litanie du malade

POËMA ZÉPHIR

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« O santé ! Santé ! Bénédiction des riches ! Richesse des pauvres ! Qui peut t’acquérir à un prix trop élevé, puisqu’il n’y a pas de joie dans ce monde sans toi ? » Ben Joson.

Que ferons-nous sans toi en effet ?! Tu nous tiens en laisse comme un chien excité à la simple idée d’aller en balade. Sans toi pas de fête, pas de sortie, plus d’alcool, plus de bonnes choses. Il ne nous restera rien que des avalanches de médicaments, du bouilli, des “pom zoranz” à volonté, un abonnement à ce cher lit et une relation passionnelle avec la douleur. Douleur… cette vermine qui terrasserait même le plus coriace des hommes. Nous sommes prêts à tout pour t’éloigner de nos corps effrayés. Même à t’attribuer une place primordiale dans notre budget.
Tels Dieu et Satan, tu es en compétition avec la santé pour savoir qui recollera le plus de partisans. La route vers elle est dure et étroite. Mais comment rester vertueux quand nous sommes quotidiennement tentés par le surmenage, la malbouffe, le stress et les plaisirs faciles ? Alors, on se tourne vers cette bonne vieille assurance santé.
Cette dernière a bien compris les enjeux. De plus en plus, elle se délecte et s’engraisse avec nos insécurités, nos maladies beaucoup plus fréquentes, notre paranoïa et notre recherche incommensurable du confort. Elle est devenue comme notre eau bénite nous sauvant de longues journées d’attente à l’hôpital pour mendier deux plaquettes de Panadol et une fiole « d’eau rose ».
Nous te sommes dévoués, chère assurance. Protège-nous des bancs de ces centres de santé crasseux et de certains infirmiers odieux qui brutalisent nos veines fragiles de contribuables. Même si nous savons que tu augmentes tes tarifs constamment, nous continuerons à t’offrir une bonne partie de notre salaire sur un plateau d’argent. Si seulement tu pouvais avoir pitié de ces pauvres gens qui n’ont pas le privilège d’être remboursés après chaque visite à la pharmacie. Voyez cela comme de l’ingratitude, mais ce n’est pas une honte d’affirmer que nos hôpitaux nous rendent plus malades la plupart du temps.
Aujourd’hui, on veut tous éviter d’y mettre les pieds; femmes enceintes, futurs opérés ou simples grippés. Si nous n’en avons pas les moyens, bye bye le « luxe » des cliniques et les résultats d’analyses prêts en moins de deux. Alors, nous nous armons contre toi intrépide douleur ainsi que tous tes satanés maux, contre l’inconfort de la vie… quitte à y laisser toutes nos soirées dans les heures supplémentaires.

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