Le gag du vendredi

C’est devenu hebdomadaire. Unanimement vilipendée pour le peu de résultats qu’elle produit par rapport au budget qu’elle engloutit, l’ICAC émet désormais des communiqués pour montrer à quel point elle bosse dur. C’est devenu le gag du vendredi.

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Il y a eu celui du 12 juin, quand la commission démarrait sur un ton presque triomphal en disant qu’elle est déjà en contact avec la BAD avec qui elle entretient “une étroite collaboration depuis quelques années” en vue d’obtenir une copie de son  rapport incriminant l’administration mauricienne dans l’attribution du contrat de St-Louis.

Comme la démarche a fait pschitt, tout comme celle de la même nature qu’avait entreprise le ministère des Finances auprès de la BAD, l’ICAC s’est fendue ce vendredi encore d’un nouveau communiqué pour dire que la BAD lui a signifié une fin de non-recevoir et quelle allait désormais se tourner vers la BWSC pour des éléments en vue de constituer son dossier d’enquête.

On ne sait pas pour l’heure si cette nouvelle et celle de la confirmation du classement de Maurice sur la liste de l’UE, toutes deux tombées vendredi dernier, ont été accueillies par des pétarades à Trèfles comme cela a été le cas du révoqué de la présidence du CEB, Seety Naidoo, le bras droit du Premier ministre adjoint qui a dû garder les tonnes de pétards qu’il n’a pu utiliser lors des dernières élections générales n’ayant pas eu d’occasion de les célébrer.

L’ICAC a aussi profité de son dernier communiqué de presse pour faire le point sur les enquêtes dans des cas notoires impliquant des personnes influentes.  Il n’y a que les enquêtes qui sont toujours en cours, les dossiers mal ficelés renvoyés par le Bureau du directeur des poursuites publiques et l’absence de preuves concluantes. Un bilan qui reste bien maigre.

La seule fois, ces dernières années, où on a pu voir des enquêtes avancer et aboutir dans un délai raisonnable a été 2016, lorsque Kaushik Goburdhun agissait comme directeur par intérim à la suite de la démission de Lutchmyparsad Aujayeb. Les enquêtes sur Raj Dayal et ses “bal kuler”, ainsi que celle diligentée sur Vishnu Lutchmeenaraidoo et son Euroloan avaient rapidement abouti.

L’ancien ministre de l’Environnement fait toujours face à un procès, tandis que le dossier de l’Euroloan avait fait l’objet d’un communiqué du bureau du DPP indiquant que c’est à la Banque centrale de se pencher sur une possible infraction aux lois existantes. La Banque de Maurice n’a, elle, jamais communiqué sur le suivi recommandé par le DPP.
Depuis, la commission s’arrange pour parler le même langage que les autorités. Comme pour confirmer la perception qu’elle est aux ordres, il a suffi que Ivan Collendavelloo décrète que la corruption alléguée s’est déroulée en 2014 pour que, trois jours plus tard, L’ICAC fasse savoir qu’elle a décidé de rouvrir l’enquête initiée cette année-là après que des informations ont fuité sur une rencontre entre le directeur du CEB, Shyam Thanoo, et le représentant de BWSC. L’enquête avait été classée sans suite.

Puisqu’elle est dans cette bonne voie, elle serait bien inspirée d’enquêter sur une autre rencontre similaire qui, elle, a eu lieu en 2017 entre le directeur par intérim du CEB, Shamshir Mukoon, et le même délégué de la BWSC. Sauf que, dans un cas, le contrat a été annulé et que, dans l’autre, elle a, en fait, succédé à toutes les démarches qui ont précipité le taillé sur mesure, le certificat d’urgence pour annuler le recours devant l’Independent Review Panel, les Rs 700 millions supplémentaires, et l’octroi du contrat. Une différence de taille, sur laquelle Ivan Collendavelloo ne donne pas d’explication plausible.

Après être resté complètement mutique pendant des jours, assistant à la destitution de son président du CEB sans broncher, le Premier ministre adjoint a tenté de se défendre au Parlement en tirant sur tout ce qui bouge et en comparant Pravind Jugnauth à William Pitt, une histoire de papa/piti du 19è siècle. Rien que ça.

Espérons qu’un de ces jours, lorsque les Britanniques vont débattre des Chagos, un petit malin ne va pas utiliser cette comparaison entre Pravind Jugnauth et un Premier ministre de l’ère coloniale pour se payer la tête de la République de Maurice. Toujours est-il que les flatteries appuyées d’Ivan Collendavelloo en direction du Premier ministre ont sonné comme une démarche plus qu’obséquieuse devant celui qui peut faire ou défaire un ministre.

Quant aux diatribes contre certains dirigeants du MMM et qui peuvent avoir laissé ceux qui l’ont suivi en direct mardi, un peu abasourdis, il faut le comprendre. Lui qui croyait avoir un ascendant indiscutable sur Rose-Hill et Beau-Bassin revient de très loin. S’il est lui-même un rescapé qui doit faire face à une pétition électorale, il ne faut pas oublier que son artificier de colistier a été battu et que deux de ses candidats au No 20, Ken Fong et Tulsiraj Benydin, ont eux aussi été rejetés.

Cela a dû lui rester en travers de la gorge et il y a de quoi piquer une crise contre contre ceux qui ont terrassé ses poulains, lui qui n’a plus que les deux lumineuses béquilles que sont Ismael Rawoo et Zahid Nazurally sur qui s’appuyer au Parlement. Et encore ! Pas sûr qu’ils terminent leur mandat sous la même bannière carrée carrée.

Alors que la réputation de Maurice est en jeu, que la BAD refuse sa collaboration et que l’on demeure sur une liste noire de l’UE, les institutions et les corps intermédiaires se délitent les uns après les autres. La MBC peut refuser un droit de réponse au diocèse de Port-Louis, un universitaire est traîné devant un comité disciplinaire parce qu’il aurait exprimé des opinions et le syndicat du CEB en pleine tempête électrique sur St-Louis ? Rien, parce que c’est bien plus gratifiant de se montrer à un meeting du ministre de l’Energie au No 19. Vraiment, tout fout le camp.

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