Les commissaires se suivent…

La presse l’écrit depuis des mois : avec la multiplication des affaires et le comportement à plusieurs vitesses de la police, Maurice donne de plus en plus l’image d’une série sur la mafia. La dernière illustration a été donnée par l’assassinat par balles perpétré mercredi soir à Beau-Bassin. La séquence est hallucinante : deux hommes à moto ont tiré trois balles à bout portant sur un habitant de Beau-Bassin, récidiviste connu de la police et fréquentant certains milieux politiques. En dépit de ses blessures, la victime de l’attentat a conduit sa voiture jusqu’au poste de police de Beau-Bassin où il déclare qu’il a reçu trois balles. Après l’avoir écouté et comme de rien n’était, la police laisse le blessé reprendre sa voiture pour se rendre à l’hôpital de Candos où il se fera admettre, subira une intervention chirurgicale, avant d’être placé à l’unité des soins intensifs. Comment est-ce que des policiers ont pu laisser un homme blessé par balles conduire sa voiture pour aller à l’hôpital en traversant deux villes, au risque de provoquer des accidents ? Alors que la police ne semblait pas se sentir intéressée – ou concernée – par le cas, elle a quand même émis un communiqué, jeudi, pour affirmer que le blessé était hors de danger. Au petit matin, vendredi, le blessé devait décéder des suites de ses blessures.

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Quelques heures plus tard, le nouveau commissaire de police a tenu une conférence de presse pour, comme la précédente, ne pas dire grand-chose. Il est venu affirmer qu’il avait des «  informations solides » pouvant mener, selon ses déductions, à une arrestation. Si le responsable de la police mauricienne ne dispose pas d’informations suite à un meurtre, trois jours après qu’il a été commis, à quoi sert-il? Ceci étant, il n’est pas certain que la police mauricienne soit spécialiste de bonnes informations et déductions. Il y a quelques semaines à peine, la police avait classé dans la catégorie suicide ce qui devait se révéler, suite à une enquête judiciaire en cours, comme étant un assassinat ! Vendredi, le commissaire de police déclara qu’il écartait « la thèse tension communale » comme étant à l’origine de l’assassinat et privilégiait un règlement de comptes. Et puis, il a enclenché sur le fait que, depuis quelque temps, des irresponsables essayent à travers des posts sur les réseaux sociaux de créer un climat d’instabilité dans le pays. Non, affirme le commissaire de police, ce n’est pas vrai que, comme l’affirment certains, que la police est dépassée. Si le commissaire de police dit vrai et qu’il contrôle la situation, pourquoi est-ce que ses hommes n’appréhendent pas les auteurs des posts incendiaires sur les réseaux sociaux, dont certains avec photos et noms des auteurs ? Pourquoi est-ce que ses hommes sont plus réactifs à arrêter, au petit matin, des internautes critiquant le Premier ministre que ceux qui, de son aveu même, tentent de créer un climat d’instabilité dans le pays en menaçant le «  tissu social fragile » ?

On attendait beaucoup du nouveau commissaire de police, surtout après le long passage aux Casernes centrales de son prédécesseur… Au cours des premiers jours, il a pris certaines décisions qui ont laissé croire qu’il allait permettre à la force de se débarrasser de l’image d’une police au service du gouvernement, de ses ministres et de ses protégés. D’une police au service des citoyens. Mais au fur et à mesure que passe le temps, la police, dirigée par Khemraj Servansingh, commence à ressembler de plus en plus à celle de Mario Nobin et la dépasse parfois dans l’excès. Les Mauriciens se souviendront longtemps du centre de Port-Louis transformé en zone militaire avec policiers, soldats, chiens renifleurs, blindés et snipers pour empêcher une petite foule d’une centaine de personnes de huer le ministre du Commerce, convoqué en cour. Les Mauriciens se souviendront aussi que, quelques jours après, des partisans du ministre du Commerce ont pu défiler devant la même cour sans qu’aucun policier ne s’en émeuve. Si le commissaire de police continue à pratiquer ce qui est perçu comme une politique de deux poids deux mesures, on finira par le confondre avec son prédécesseur.

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