Planning

— Tu ne sors plus de chez toi, on dirait ? On ne te voit plus.
— Aio, ma chère, avec ces embouteillages permanents à cause des travaux du métro. Il vaut mieux que tu restes chez toi-même.
— Mais tu habites très loin de l’endroit où le métro va passer quand même ! Comment les travaux peuvent-ils t’affecter ?
— Mais comme tout le monde dans les villes, je suis affectée par les déviations, les rues fermées, les trous fouillés, la poussière et les embouteillages. Tu sais ce qui m’énerve le plus dans cette affaire ?
— On dirait que tout t’énerve. C’est vrai que c’est embêtant pour le moment, mais une fois que le métro sera fini, tout reviendra dans l’ordre, toi.
— J’aimerais bien voir ça ! J’aimerais voir s’il n’y aura plus d’embouteillage sur la route Royale entre Beau-Bassin et Saint-Jean quand le métro commencera à rouler.
— Aio. On croirait entendre un membre de l’opposition.
— Tu te trompes, c’est ce que disent tous les gens qui sont victimes de la construction du métro. Ceux qui subissent les inconvénients tous les jours.
— Aio, vous les gens de l’opposition, vous êtes contre tout ce que fait le gouvernement.
— C’est ce que dit le gouvernement pour cacher son manque d’expérience.
— Qu’est-ce tu veux dire ?
— Je veux dire que tout le monde est d’accord qu’il faut un métro… s’il va régler le problème des embouteillages dans les villes. Mais ce que je reproche au gouvernement, moi et les centaines de personnes qui subissent les conséquences, c’est le manque de planning.
— Quelle manque de planning encore ?
— On n’est pas informé sur les travaux toi. Les rues sont déviées ou fermées du jour au lendemain sans que tu sois prévenu. Un coup c’est ouvert, un coup c’est fermé, un coup c’est un peu ouvert et pas totalement fermé. Tu ne peux plus arriver à l’heure à un rendez-vous maintenant. L’autre jour, on est arrivé mari en retard au rendez-vous de ma maman avec son docteur.
— Le docteur X, mais lui, il est toujours en retard d’une heure sur ses rendez-vous.
— Oui, mais là, on est arrivé trois heures après l’heure, parce la route était bloquée depuis Beau-Bassin jusqu’à Vacoas.
— Il fallait passer par les chemins coupés, couillonne.
— C’est ce que j’ai fait, comme beaucoup de personnes d’ailleurs. Mais certains de ces chemins étaient fermés ou interdits à cause des travaux. Et comme d’habitude, on n’est pas prévenu : on découvre la fermeture une fois qu’on est devant le chemin. Non, je bouge le moins possible, je reste chez moi pour regarder la télé.
— Tu suis les Jeux des Îles ?
— Tu veux dire les Jeux du gouvernement ?
— Qu’est-ce que tu veux dire encore par là ?
— Ce que tout le monde a remarqué. Le gouvernement a accaparé les Jeux qui, comme la construction du métro, ont été organisés avec un amateurisme extraordinaire.
— Il y a eu quelques couacs, mais c’est normal toi.
— Quelques couacs ? Il n’y a eu que des couacs tu veux dire ! Tous les billets ont été vendus, mais les gradins sont vides. On a dépensé Rs 94 millions pour le stade George V, mais le terrain est en moins bon état que celui d’unVillage Council !
— Ecoute, on ne pouvait pas prévoir que la pluie allait tomber cette quantité-là.
— On ne pouvait pas prévoir qu’il allait pleuvoir en hiver à Curepipe ? On ne savait pas qu’il y a toujours eu un problème de drain au stade George V ? Et pourtant malgré la pluie, qui tombait beaucoup plus avant, c’est là qu’on a joué tous les matches importants depuis des années. On ne pouvait pas prévoir, tu dis ! Mais gouverner c’est justement prévoir avoir un planning.
— Aio tu me fais c… avec ton planning. Tu seras bien décon quand le métro commencera à rouler en mettant fin aux embouteillages à Rose-Hill.
— Hé toi, arrête de causer n’importe, donc. La fin des embouteillages à Rose-Hill, surtout avec la nouvelle mesure annoncée !
— Quelle mesure encore ?
— Tu n’es pas au courant ? La vice-Première ministre vient d’annoncer qu’elle va faire transférer le marché de Rose-Hill à Ebène.
— Critiquer le gouvernement, ça même tout ce que tu sais faire ! Si on envoie le bazar de Rose-Hill à Ebène, il y aura moins d’embouteillages à Rose-Hill. C’est pas ça même que tu veux ?
— Oui. Mais tu sais où la vice-Première ministre veut faire transférer le bazar de Rose-Hill.
— A Ebène, toi-même tu as dit.
— Oui, mais je ne t’ai pas dit où à Ebène. Elle veut faire transférer le marché à Ebène, sur le terrain où on prévoit de construire la gare d’autobus.
— Et alors ?
— Et alors ? Et alors ? Si on transfère le marché sur la gare d’autobus où mettra-t-on les autobus ? Dans le stade ou dans la cour du Plaza ? Tu crois que c’est comme ça qu’on va régler le problème des embouteillages à Rose-Hill, avec ou sans métro ?

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J.C A

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