C’est vendredi soir aux alentours de 21 heures que Cédric Coret et Anthony Madanamoothoo ont quitté le pays pour prendre part aux Mondiaux, ainsi qu’aux Championnats du Commonwealth qui se tiennent simultanément en Ouzbékistan du 7 au 17 décembre. Coret sera en action lundi dans la catégorie des moins de 96 kg, tandis qu’Anthony Madanamoothoo sera sur la plateforme le mercredi 15 décembre chez les 102 kg. Ces derniers sont accompagnés de l’entraîneur Gino Soupprayen.
Place aux choses sérieuses pour les haltérophiles qui auront la lourde responsabilité d’améliorer leurs meilleures marques réalisées lors des derniers Championnats nationaux au centre national à Vacoas. Ils seront opposés à la crème de la crème mondiale, et quoi de mieux que des gros performants pour permettre aux locaux de franchir un palier…
Le président de la Mauritius Weightlifting Federation (MWF), Magarajen Moonien, s’attend à ce que les leveurs de fonte « donnent la pleine mesure de leurs capacité. Nous nous attendons à ce qu’ils fassent mieux que lors des derniers Championnats de Maurice. Mais je suis aussi conscient qu’il y a eu une grosse coupure et que les haltérophiles masculins n’ont pas eu de compétitions internationales à se mettre sous la dent. Ce n’est pas évident dans ce genre de condition mais ce sont des athlètes talentueux. Je suis d’avis qu’ils répondront présents.»
L’homme fort de l’haltérophilie local soutient par ailleurs que ces derniers feront escale à Istanbul en Turquie, avant de rallier l’Ouzbékistan. « Etant donné que cette compétition est qualificative pour les Jeux du Commonwealth de Birmingham en Angleterre, il faudra être très fort pour se qualifier. D’autant qu’aux Mondiaux et aux Championnats du Commonwealth, les haltérophiles en découdront dans dix catégories, alors qu’il n’y en a que huit, aux Jeux du Commonwealth. Il se peut qu’un athlète monte sur la première marche du podium dans sa catégorie respective, mais que la catégorie en question ne soit pas au programme en Angleterre. C’est la particularité », ajoute-il. À noter que Gino Soupprayen n’a pas voulu donner de déclaration. Quoi qu’il en soit, nous suivrons avec attention les prestations des deux Mauriciens qui sont d’ailleurs considérés comme les plus talentueux leveurs de fonte du pays.
Pour rappel, Cédric Coret (30 ans) prendra part à ces premiers Mondiaux, après pratiquement plus de dix ans de carrière. Triple médaillé d’or aux Jeux des iles de l’Océan Indien (JIOI) de 2015 à la Réunion, et 2019 à Maurice, il avait d’ailleurs été désigné « Meilleur Performant » lors des derniers Championnats de Maurice, avec une performance de 136 kg a l’arraché, 173 kg à l’épaulé-jeté, et 309 kg au total olympique, qui constituait trois records nationaux chez les 96 kg.
« J’essaierai de battre mes records ou du moins m’en approché. Je suis un compétiteur dans l’âme qui a toujours eu à cœur de défendre avec force et honneur les couleurs du quadricolore. Je suis beaucoup plus mature que par le passé et je ne me déplacerai pas en tant que victime expiatoire, même si le niveau sera très très relevé. Nous parlons ici de la crème de la crème, ce qui se fait de mieux en matière de compétiteurs sur la planète. Nous jouons vraiment dans une autre cour », avait-il fait ressortir. Il avait d’ailleurs indiqué que ce serait difficile voire impossible d’aller chercher une médaille. « Ce type de compétitions se prépare trois à quatre ans avant, et non du jour au lendemain. Il est impératif de bénéficier d’un bon encadrement et d’un suivi quotidien. Je n’ai pas eu une bonne préparation depuis le début de l’année. De ce fait, je ne m’attends pas à réaliser des miracles sur la plateforme. Cette expérience du plus haut niveau me fera certainement grandir en tant qu’athlète pour devenir encore meilleur. Etant donné que cette compétition est qualificative pour les Jeux du Commonwealth, je compte tout mettre en œuvre pour être de la fête à Birmingham. Il faut y croire », avait-il insisté.
Coret, tel un phénix qui renait de ses cendres
Cédric Coret est avant tout un revanchard. La vie ne lui a pas fait de cadeau. Époux de la meilleure haltérophile mauricienne, Roilya Hanitra Ranaivosoa, il a su faire fi de l’adversité et continuer à avancer, malgré les obstacles qui se sont dressés sur sa route. On se souvient d’ailleurs de sa grave blessure en 2016 qu’il contracte de son retour d’urgence d’un stage intensif en Roumanie, pour prendre part aux qualifications pour les Championnats d’Afrique. Son genou ne tiendra d’ailleurs pas le choc. S’ensuivirent ensuite des interventions chirurgicaux, des doutes et des larmes. C’était d’ailleurs une période sombre de sa vie, ou il même songé à arrêter, ou plutôt que son corps ne tiendrait plus. Mais Cédric Coret est fait d’un autre métal, celui des guerriers.
Comme dit le dicton, il faut reculer pour mieux sauter. Autant dire que lui, il a rarement déçu dans les grands-rendez-vous. « J’ai toujours été un passionné. J’ai des objectifs, des envies, ce besoin de montrer ce que j’ai dans le ventre. Il ne faut pas m’enterrer trop vite. Je reviens toujours plus fort », avait-il fait ressortir. « Dans la vie, il y a des hauts et des bas. J’ai toujours cru en mon potentiel », avance-il, déterminé. Du haut de ses 30 ans, Coret prendra demain (il est bon de le préciser), à ces premiers Mondiaux, après plus de 10 ans de carrière. Quand le travail et la persévérance paient.
Anthony Madanamoothoo, du haut de ses 21 ans, a également une belle carte à jouer. Double médaillé de bronze à seulement 15 ans aux JIOI de 2015 à La Réunion, triple médaillé d’or aux JIOI de 2019 à Maurice et aux Championnats du Commonwealth juniors (77 kg) en Malaisie en 2016, médaillé d’argent et de bronze aux Championnats d’Afrique en 2019 en Egypte, le jeune Madanmoothoo poursuit son petit bonhomme de chemin et ne cesse de progresser à vitesse grand V. Fils de culturiste (Jack Madanamoothoo) Mr Mauritius en 2001, 2002 et 2004), il est tombé dans la marmite depuis sa plus tendre enfance comme Obélix dans la potion magique, et il tentera d’améliorer ses meilleures marques, soit 140 kg à l’arraché et 170 kg à l’épaulé-jeté. « Je suis en forme et très concentré. J’ai eu une dernière session d’entraînement vendredi matin et je dois dire que ça s’est bien passé. On va tout donné. J’espère ramener une médaille pour ma patrie. C’est mon objectif ultime », prévient Anthony Madanamoothoo, qui sera à sa première participation aux Mondiaux Seniors.
Une affaire de famille chez les Madanamoothoo
Pour le père d’Anthony, son fils a toujours eu de réelles prédispositions pour cette discipline sportive. « Quand il était enfant, il m’accompagnait à la salle de sport, durant mes séances de musculation. Mon épouse gardait les autres garçons et Anthony m’accompagnait. J’avais remarqué qu’il adorait prendre les haltères, s’essayait sur la machine, et plus important encore, il a toujours eu la morphologie adéquate pour pratiquer ce sport.
Car il est important de préciser que le type de corps, la génétique, la masse osseuse joue beaucoup dans la performance. Il faut avoir des prédispositions et Anthony possédait ses attributs étant plus jeune », explique-il. Au fur et à mesure, la passion a grandi, et aujourd’hui, Anthony ne jure que par l’haltérophilie. « Je bois et mange des barres de fer (Rires). C’est à la fois ma passion et mon passe-temps. Je n’ai jamais pratiqué une autre discipline sportive. Je n’en ressentais pas le besoin. J’ai toujours été amoureux de ce sport et comme beaucoup de compétiteurs qui se respectent, mon objectif est de prendre part un jour aux Jeux Olympiques. C’est mon rêve ultime », avoue le jeune homme. Toutefois, les galères, Anthony Madanamoothoo les a connus également. En 2014, à seulement 15 ans, il avait été testé positif au Stanozolol (stéroïde anabolisant synthétique dérivé de la testostérone) pendant sa participation aux Youth & Junior Weightlifting Championships (15-21 avril 2014) en Tunisie. « Cet épisode est aujourd’hui derrière moi. Je me concentre sur l’avenir. J’ai grandi, mûri, et beaucoup mieux blindé psychologiquement », précise notre interlocuteur, sans détour. Cédric Coret et Anthony Madanamoothoo sont des athlètes hors norme et de dignes représentants du quadricolore. À eux maintenant de montrer ce qu’ils valent sur la plateforme.
Andy Berthelot