Arts Visuels : Adieu Fabien Cango !

Le monde des arts visuels est de nouveau en deuil avec le départ le jeudi 2 octobre de Fabien Cango, artiste peintre, avec plus de six décennies de pratique artistique. Il fait partie des derniers de l’équipe de Serge Constantin qui a donné ses lettres de noblesse à l’art mauricien et qui a initié et accompagné bon nombre de jeunes artistes locaux de cette génération. Fabien Cango a, à son tour, marqué la vie de nombreux jeunes et moins jeunes qui ont fréquenté son atelier pendant de nombreuses années.
Les messages de sympathies et en hommage à l’artiste pleuvent sur les réseaux sociaux depuis l’annonce du décès de Fabien Cango. Né à Moka en 1940, il s’est intéressé au dessin très jeune. « J’étais fasciné par Miss Moutou. Elle n’enseignait pas l’art mais elle faisait des dessins pour les leçons de géographie », témoignait Fabien Cango, il y a quelques années au Mauricien.
C’est un peu plus tard, en tant qu’élève au collège du Saint-Joseph qu’il se frotte aux premiers tableaux artistiques que le frère Edmond affichait. « C’était des tableaux faits par des jeunes Belges et je me disais : “Je dois pouvoir dessiner comme eux”. » Cependant, il a dû attendre encore pour pouvoir s’y mettre. « Dès que j’ai commencé à travailler après mon SC, je me suis payé un cours d’art (dessin et peinture) par correspondance. » Encouragé par son professeur qui lui disait « Fabien, mettez-vous tout de suite à la peinture », le jeune Fabien s’y met. « Bien plus tard, soit plus de dix ans après, j’ai rencontré Serge Constantin et il m’avait dit : “Venez” ! J’y suis allé mais à un moment donné, j’étais un peu découragé. Je sentais qu’il ne s’occupait pas trop de moi. Par la suite, j’ai compris qu’il s’occupait surtout de ceux qui n’avançaient pas très vite. »
Pour Fabien Cango, la seule façon d’y arriver, c’était de dessiner. C’est d’ailleurs le conseil qu’il donnait à tous ceux qu’il côtoyait. « J’ai dessiné tous les jours pendant des années. » Et ce, même sur son lieu de travail. « À 20 ans, je suis entré à l’hôpital. Je m’intéressais à la science, à la médecine et à l’art. Mon cahier de dessin était de la même largeur que la poche de la veste d’infirmier. Je le conservais donc dans ma poche et quand je n’avais rien à faire, je dessinais. »
Fabien Cango a ainsi développé des compétences pour des dessins et des peintures de petits formats. Après avoir passé 41 ans, il décide de vivre de son art. Loin des exigences académiques, il prônait la liberté artistique. « S’il n’y a pas de liberté, il n’y a rien », disait-il. Toutefois, liberté ne voulait pas dire « faire n’importe quoi ». Artiste-praticien assidu, Fabien Cango conjuguait « liberté avec discipline et rigueur ». Et il n’a jamais arrêté de dessiner. Chaque toile qui sortait de son atelier succédait à une multitude de croquis. « Il faut dessiner, encore et toujours. Il y a des dizaines de dessins qui précèdent chaque tableau. Et tous les tableaux ne sont pas toujours réussis », disait-il avec une grande humilité.
Fabien Cango s’est battu toute sa vie pour l’art. Il regrette le temps où « les tableaux se vendaient comme des petits pains ». Il aimait ironiser : « Plus personne n’a de l’argent dans ce pays. Ils roulent en Porsche ! »
De grande générosité de cœur, il reconnaît le professionnalisme et valorise aussi d’autres corps de métier, qu’ils soient liés à l’art ou pas. Ainsi, il exprime son admiration pour l’encadreur. « L’encadreur est quelqu’un d’unique : l’artiste n’a pas besoin de le guider pour mettre son tableau en valeur. »
Fabien Cango est de ceux qui privilégiaient la peinture à l’huile, matière « plus noble », estimait-il, notamment en raison des possibilités multiples qu’elle offre, des compétences qu’elle requiert pour une maîtrise parfaite mais aussi pour le rendu. Et pour lui, un artiste doit maîtriser toutes les techniques !
Même s’il a participé à de nombreuses expositions, il n’est pas de ceux qui font des solos régulièrement. « Mes meilleurs tableaux sont vendus chez moi », affirmait-il, non sans une pointe de fierté. D’ailleurs, après une longue absence de la scène publique, soit depuis 2001, Fabien Cango avait tenu une exposition en solo en 2017. Il a participé à quelques rares expositions collectives entre-temps. Cependant, c’est cette année que les amateurs d’art ont eu l’occasion d’admirer une de ses gravures, « La chanteuse de jazz », lors de l’exposition collective Terre d’artistes au Caudan Arts Centre.
Dans son atelier, niché à flanc de la montagne Raffray, non loin de Terre-Rouge, Fabien Cango évoluait entre ses carnets de croquis, par dizaines, entreposés dans des armoires, sur des étagères ou sur des chaises disposées çà et là, ses palettes, ses croquis et ses peintures dont certaines étaient abouties, d’autres encore naissantes ou qui n’avaient pas encore atteint la maturité pour porter la signature de l’artiste. Cependant, pour lui, même si elle représentait la touche finale portée à l’œuvre, celle-ci n’était jamais finie. « C’est le regard du spectateur qui le termine », disait-il. Et d’ajouter : « Une personne achète toujours un tableau qui lui parle et elle le termine par son histoire. »
Les funérailles de Fabien Cango auront lieu ultérieurement. À ses proches et à tous ceux infligés par ce départ, Le Mauricien présente ses plus vives sympathies.

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