Natasha et Ludovic me rappellent souvent comment certains adultes leur faisaient peur quand ils étaient petits. Lorsqu’il fallait qu’ils restent bien tranquilles sous les yeux de celui ou celle qui avait pour mission de veiller sur les deux chenapans, c’est à qui qui disait : « Attention, il y a un loup dans le jardin — Ne va pas loin, un loup te surveille ! — Là-haut, un loup caché dans la chambre. » Je ne ferai qu’une petite mention des fois où mes enfants ont crié : “Au loup, au loup !” pour attirer mon attention. Mais là n’est pas le sujet. Ce qui suit fait état de loups non imaginaires qui ont été enfin démasqués après avoir été, peut-on dire, protégés d’une quelconque manière.
En effet, il y a des loups (bleus) qui sont bien réels et qui, toutes babines dehors, salivent à l’affût de toute proie, qu’elle soit coriace, vulnérable ou dangereuse. Ils font feu de tout bois pour arriver à leurs fins (j’entends par là aux fins d’interrogatoire !). Cette petite poignée de loups sont bien ceux censés veiller à notre sécurité, ceux-là mêmes qui auraient dû nous inspirer le respect !
Nous avons eu droit ces jours-ci à des images insoutenables de l’horreur que peuvent faire subir des humains à d’autres humains. Voir des atrocités sur TikTok et autres réseaux sociaux ne portent pas la même violence (là est un autre drame encore, car cette violence venue d’ailleurs est banalisée et dédramatisée, tellement qu’elle est courante. Une scène humiliante qui a lieu dans un pays voisin n’est pas si choquante derrière le petit écran). Ici, les actes mis au grand jour ne se déroulent pas dans un pays étranger, mais bien à Maurice, avec des policiers mauriciens faisant subir des tortures à ceux qu’ils interrogent, caméra en main. Ces barbaries et ces actes indignes sont infligés à des concitoyens sur notre petite île. Où sommes-nous : dans un paradis sur terre ou dans un enfer aux allures d’île paradisiaque ?
Bien entendu, la police doit pouvoir mener ses enquêtes comme il se doit. Un travail si digne doit pouvoir s’accomplir sans qu’il n’y ait besoin que qui que ce soit ne surveille les faits et gestes des policiers, puisqu’ils devraient être eux-mêmes exemplaires. Personne n’est parfait, nous le savons, mais les policiers ne sont-ils pas, eux, sur la bonne voie ? Dieu merci, nous savons pouvoir compter sur la grande majorité des hommes et femmes en uniforme bleu pour assurer notre sécurité, celle de nos routes et, bien entendu, celle du pays.
Mais où et pourquoi cela déraille-t-il ? Est-ce utopique de croire en une force policière digne de ce nom ? On dirait que oui ! Le philosophe Thomas Hobbes voyait juste en disant que l’homme est un loup pour l’homme. Il est effrayant de voir comment l’homme civilisé peut se laisser conduire par tant d’animosité. De plus, il est encore plus glaçant de voir comment d’autres, présents lors des faits, peuvent se laisser influencer et adopter, eux aussi, un comportement ignoble : tous entraînés dans un effet de groupe, ou est-ce conduits par l’obéissance à des desseins obscurs ? Il est désolant de se rendre à l’évidence que la parole du sain d’esprit n’a plus sa place dans ces moments-là.
À quoi carburent ces hommes, non, je veux dire ces loups ? À la rage, la colère, la puissance, la frustration ? Sous quelle emprise sont-ils ? Celle de mauvais esprits tout droit sortis des eaux troubles pour semer la terreur lorsque cela leur semble nécessaire ? Est-ce que ces gens-là peuvent nous inspirer le respect, l’autorité et la sécurité ? Le respect des droits humains a été bafoué et, de ce fait, l’alerte a été donnée au niveau international. Comme si nous avions besoin de cela !
Nous ne sommes là ni pour débattre de la culpabilité ou pas des victimes qui ont subi ces atrocités ni pour savoir pour quels crimes elles ont été interrogées. À chacun son métier, et les vaches seront bien gardées — mais pas toujours, semblerait-il !
C’est un véritable scandale de savoir que des actes d’une si grande humiliation aient été infligés (à des êtres humains). Qu’en est-il du suspect qui s’avère être innocent ou coupable d’un petit délit ? Comment rentre-t-il chez lui ? Comment, d’un simple citoyen menant une vie normale, il devient une victime traumatisée et souvent vouée au mutisme ? Comment vit-il cela ? Que dit-il à sa famille ? Comment peut-il dormir ? D’ailleurs, comment dorment ces policiers adeptes de la brutalité ? Les victimes ne sont probablement pas des anges et sont peut-être des délinquants, mais seul un jugement de la cour peut établir ce qu’elles doivent être aux yeux de la justice.
Les vidéos et les images qui ont circulé nous rappellent que l’Homme peut perdre la raison lorsqu’il détient un certain pouvoir entre les mains. Il peut se laisser influencer parfois pour des raisons que lui-même ignore.
Nous allons laisser la police enquêter sur la police. Nous allons dénoncer et faire tout pour que justice soit faite. Nous allons espérer que les organismes internationaux s’intéressent tant à toute cette ignominie, qu’elle ne pourra être tue. Mais nous n’allons, nous, ni juger ni condamner ces tortionnaires. Nous les laissons avec leur conscience. Le moment venu, ils auront à répondre à plus Grand qu’eux.
Et nous allons remercier TOUS ces policiers qui eux se battent pour les citoyens et se démènent corps et âme pour que nous soyons en sécurité. Ceux et celles-là mêmes de la force policière qui ont à cœur d’accomplir leurs tâches de travail chaque jour, et qui rentrent chez eux avec le sentiment d’avoir veillé à la sûreté du pays. Ce sont ceux-là qui méritent de dormir sur leurs deux oreilles. Qu’ils soient fiers d’être policiers et qu’ils ne soient, en aucun cas, entachés à cause de ceux qui sont soumis aux ténèbres !
