Rencontre —  Anesh Mungur (16 ans, militant écologiste) : »Nous sommes de la génération qui répare les erreurs causées par les générations précédentes »

Du haut de ses 16 ans, Anesh Mungur, étudiant de West Coast International Secondary School, n’a vraiment pas froid aux yeux et vient de décrocher une bourse au United World College de Costa Rica où il complètera son baccalauréat international. C’est lors d’une manifestation du mouvement écologique Fridays for Future Mauritius que nous l’avons rencontré pour la première fois. Il avait alors 14 ans et faisait déjà montre d’un gros potentiel. À quelques mois de son départ, il s’est prêté au jeu des questions-réponses et nous offre un aperçu de ce que pense un jeune adolescent mauricien du monde qui l’entoure. Entretien.

 

- Publicité -

Pour commencer, qui est Anesh Mungur ?

Je suis un fervent militant de 16 ans, conférencier, athlète, passionné des arts de la scène et écrivain indépendant. Étant adolescent au XXIe siècle, ma génération est la génération de génocides, de conflits, d’une pandémie mondiale et de catastrophes climatiques. Je veux changer cela parce que je crois que chaque enfant doit jouir de son droit le plus fondamental, qui est d’avoir un avenir certain dans un monde correct. Ainsi, je sens qu’il est de ma responsabilité de me battre pour ce qui est légitimement le nôtre.

Parle-nous de cette fameuse bourse d’études… au Costa Rica !

Le 10 février de cette année, j’ai reçu la meilleure nouvelle que j’aurais jamais pu demander. Le comité national mauricien des United World College (UWC) m’a choisi pour une place dans l’un des UWC. On m’avait offert le choix entre trois collèges : l’UWC Atlantic, l’UWC Costa Rica et l’UWC Hong Kong. Sans hésitation, j’ai opté pour le United World College of Costa Rica.

Cette nouvelle a été le fruit de plusieurs années de développement de mon curriculum vitae et, surtout, de moi-même en tant que jeune personne qui contribue activement à notre société. Le processus de demande était loin d’être simple. En toute honnêteté, ce fut l’une des périodes les plus stressantes de ma vie. Cela impliquait la rédaction de nombreux essais, que j’envoyais ensuite à ceux en qui j’avais confiance, pour qu’ils les revoient encore et encore… pour enfin obtenir quelque chose de parfait. Il y avait aussi les entretiens de groupe ainsi que les entretiens individuels ; les recommandations de mes enseignants et la liste continue. En fin de compte, à la suite de tout ce travail acharné et de tout ce dévouement, tout s’est mis en place.

De manière plus générale, en tant que jeune, penses-tu que la jeunesse mauricienne est suffisamment valorisée ?

Ayant été un jeune militant pour le climat à Maurice pendant de nombreuses années, j’ai fini par apprendre la vérité sur la façon dont les jeunes, qui ont pour ambition de changer la façon dont les choses sont gérées pour améliorer nos sociétés, sont perçus par le public et le gouvernement mauricien.

En fait, le public veut voir plus de jeunes comme moi. Cela leur donne peut-être une source d’inspiration et de l’espoir. Cependant, notre gouvernement, plus précisément ceux qui sont au sommet de l’Establishment de notre pays semblent avoir décidé collectivement que nous, les jeunes, n’étions pas suffisamment bons pour eux. Je crois que c’est parce que notre présence même, notre franc-parler et notre conviction menacent leurs positions de pouvoir.

Faisant partie du mouvement Fridays For Future Mauritius, j’ai travaillé avec des responsables gouvernementaux et je peux dire que cela a été une expérience qui me marquera pour le reste de ma vie. De la demande de permis de protestation à la volonté de rejoindre des organisations gouvernementales de la jeunesse pour l’environnement, je peux dire avec certitude que, malheureusement, nos voix n’ont pas été entendues. Cependant, je prévois de changer cela.

D’ailleurs, l’on a tendance à « taguer » la nouvelle génération comme étant une génération qui ne s’intéresse qu’aux réseaux sociaux (TikTok, Instagram, Snapchat). Qu’en penses-tu ?

De mon point de vue, je pense que dire que nous sommes une génération coincée dans nos téléphones,relève d’une pure ignorance de la part des générations d’avant. En tant que membre de cette génération, c’est exaspérant parce que, tout d’abord, nous sommes tellement plus que cela. Si les générations d’avant prenaient un peu de temps pour découvrir ce que nous faisons réellement, elles seraient bien étonnées !

Nous sommes une génération qui détient un fort potentiel qui s’étend à des kilomètres. Nous sommes une génération qui innove chaque jour, de Greta Thunberg à Coco Gauff, pour n’en nommer que quelques-uns. Nous sommes de la génération qui répare les erreurs qui menacent inévitablement notre avenir, causées par les générations précédentes. Nous ne devons pas oublier qu’en fin de compte, si les générations d’avant prétendent que nous, les jeunes, sommes trop investis dans les médias sociaux, alors ils doivent se poser la question, eh bien, qui a créé ces applications en premier lieu ? N’est-ce pas votre génération qui a créé ces applications addictives ?

Parlons écologie. Est-ce que c’est un sujet qui devrait intéresser davantage de jeunes comme toi ?

Bien sûr. Ayant grandi sur cette île incroyable, entourée par la nature, j’ai toujours été fasciné par l’environnement que j’appelle mon chez moi. C’est l’une des raisons les plus importantes pour lesquelles j’ai décidé de consacrer une grande partie de mon adolescence à sa protection. De plus, je pense que cela devrait naturellement faire l’objet de la passion de nombreux autres adolescents, car l’écologie de notre planète, à plus d’un titre, concerne leur avenir.

Selon toi, faisons-nous assez en tant que société pour protéger notre île des effets du changement climatique ?

Comme je l’ai dit à plusieurs reprises dans le passé, Maurice, étant la très petite île qu’elle est, contribue le moins au changement climatique et, pourtant, parmi d’autres petites nations insulaires, nous sommes les plus vulnérables à ces effets catastrophiques. Comme nous serons ceux qui porterons le poids du réchauffement climatique, il est incontestable qu’il est de notre responsabilité de reconnaître le changement climatique comme une crise mondiale et d’encourager d’autres pays à réduire leurs émissions de carbone. Mais à bien des égards, nous sommes impuissants dans cette situation parce qu’en tant que nation, nous ne pouvons pas inverser les effets du changement climatique. Il faudrait que ce soit un effort collectif en tant que communauté mondiale pour qu’il y ait un espoir pour sortir de cette crise.

Entretien réalisé par Kovillina Durbarry

 

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -