Du Président et du Monarque

MARIE JACQUES LAVAL PANGLOSE G.O.S.K

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Ami et Élève du Grand E.

« Le Seigneur dit à Samuel : « Je t’envoie chez Jessé le Bethléémite, car j’ai vu parmi ses fils le roi qu’il me faut. » 1. Samuel 16

Le président de la République mauricienne n’est pas un monarque. Il n’est pas oint. Il est choisi par un homme, le Premier ministre et non par la foule. Il ne gouverne pas, ni de droit divin, comme Philippe le Bel, ni de droit saisi, comme De Gaulle. Il remplit une fonction. En lui adressant la parole il faut dire Monsieur le président et non Sire. On est en République. Il tient cette fonction d’une charte. Elle s’appelle La Constitution. Cependant cette dernière lui confère les droits et devoirs lesquels, avant sa venue, appartenaient à une Reine. Car notre Constitution a remplacé, comme principe agissant, la Reine et ses actes à travers le Gouverneur Général, par un président. Tant il est vrai que les pouvoirs du Gouverneur Général étaient fort limités, ainsi son successeur s’habille de façon identique. Comme De Gaulle, dans sa cinquième République, projeta une « certaine idée de la France », le président de l’île Maurice incarne une certaine façon de mener le pays. C’est celle du Premier ministre du jour. Voilà notre démocratie.

En France actuelle le président élu par le peuple votant, dirige le Premier ministre sur le tracé de sa politique. Ce dernier est le collaborateur essentiel du premier. Leur interaction est si capitale que lorsqu’ils ne sont pas du même bord les Français parlent de cohabitation.

À Maurice un président qui tenterait de définir sa propre gouverne en matière politique se retrouverait dans un habit emprunté. Les dispositions du texte constitutionnel, par exemple dans la section 64,  le dépeignent comme agissant, dans l’exercice de ses fonctions, sur avis du Premier ministre. Cet euphémisme veut dire obéissant aux ordres du Premier ministre. Il ne lui arrive d’agir de son propre chef que dans de rares circonstances comme, quand il faut, en cas de changement de majorité au Parlement, choisir un Premier ministre, ou quand il est nécessaire de nommer un membre de la Commission de Pourvoi en Grâce.

Cette institution détient le pouvoir absolu de donner la grâce, ou un pardon à un condamné. À l’origine il incombait au monarque, seul, d’exercer cette prérogative, comme seul le Roi, tel Robert Le Pieux, pouvait guérir un malade de ses écrouelles: Rex tangit Deus curat. Le Roi touche et Dieu guérit. Ces dons divins, le pardon, la guérison émanaient de MonSeigneur. « Ego te absolvo »: Je t’absous: dans le corps (guérison) et l’âme (pardon). À l’île Maurice, par une substitution surréaliste des choses, c’est la Commission qui recommande l’absolution que doit alors, impérativement, accorder le président.

La substance de l’action royale ne s’est pas transmise par la mue présidentielle. Car la force du peuple, la démocratie démos: la plèbe, kraté la force, a voulu que le président, bien que décrit comme le Chef de l’État et le Commandant en Chef de la République, celui qui défend la Constitution, s’assure que les institutions démocratiques et la règle du droit soient protégées, les droits fondamentaux respectés, l’unité de la nation mauricienne essentiellement diverse maintenue, se voit limité dans son action par la Constitution qui lui octroie ces atouts. La magie divine a fait place aux exigences terrestres.

Que pourrait faire le président, par exemple, dans son rôle de défenseur des droits de l’Homme si l’exécutif votait une loi abolissant la présomption d’innocence,  disant que tout suspect est coupable jusqu’à la preuve du contraire par ledit suspect ? Il pourrait refuser de donner son assentiment au texte combien de fois?

Cincinnatus, grand général Romain, fut appelé à défendre Rome deux fois contre un péril extrême: la première devant la menace de l’invasion des Aequi en 453 avant JC, la deuxième contre une conspiration interne par Maelius, qui voulait devenir Roi de Rome, vers 439 avant JC. Après avoir vaincu les deux dangers, quittant la vie publique, Cincinnatus se retira à chaque fois sur ses terres pour continuer à les cultiver, à l’instar des vaishyas. C’est probablement ce modèle qui inspira la création du poste de Président de notre République. Le président ici doit partir, son échéance terminée. Le Romain partait de lui-même, la sienne accomplie.

Cela dit, il m’a été donné de connaître Maître Pradeep Roopun, l’avoué doué d’une grande capacité d’humanisme. Bonne chance à vous Monsieur Le président et à votre adjoint. Que MonSeigneur vous bénisse.

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