NAUFRAGE DU MV WAKASHIO – Salvage Operation sur fond de marée noire au large de Pointe d’Esny : La carte de la catastrophe écologique

Mahébourg Waterfront, le point de ralliement

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Le Mahébourg Waterfront porte déjà des traces de la marée noire depuis vendredi matin et toute nouvelle vague d’huile lourde en provenance du bulk carrier de 300 mètres de long et de 50 mètres de large ne fera qu’accentuer la dégradation de la côte  du sud-est. Pour la journée de vendredi, la firme Sotravic a pompé 10 000 litres et la société Seeven 21 000 litres d’huile aux abords du Mahébourg Waterfront, les travaux se poursuivant durant le week-end. Même si le waterfront n’offre pas un viewpoint idéal pour voir le MV Wakashio sur les brisants au large de Pointe d’Esny, c’est le point de ralliement des militants écologistes et autres volontaires voulant participer à la clean-up operation devenue plus qu’urgente.

Rezistans ek Alternativ a donné le ton dès vendredi en mobilisant ses membres de même que le public en général pour la fabrication artisanale de boudins géants avec de la bagasse et autres produits textiles en vue de retenir la poussée des oil patches vers le rivage du sud-est avec des conséquences écologiques graves. À vendredi, la Mauritius Ports Authority avait fait placer une centaine de mètres de barrière anti-marée noire à hauteur du front de mer. Des membres de la Special Mobile Force (SMF) sont également déployés pour le nettoyage du front de mer. Depuis hier matin, cette promenade fait partie de la zone interdite décrétée par les autorités, de même que Pointe-d’Esny, Pointe-Vacoas, la plage de Blue-Bay, La Cambuse, Pointe-Brocus et Falaise-Rouge.

Blue Bay Marine Park zone interdite

Blue Bay accueille depuis le dimanche 26 juillet l’Incidental Command Post (ICP) de la salvage operation suite au naufrage du MV Wakashio, avec en stock à ce poste en fin de semaine 1 680 mètres de sea booms, dont 300 mètres déjà installés à l’entrée du parc marin depuis vendredi, 87 bouées, cinq embarcations d’intervention de la National Coast Guard (NCG) et un float tank de 12,5 tonnes et de facilités de pompage de fioul de la mer.

Le Parc marin de Blue Bay est sur le monitoring radar des autorités en vue de prévenir tout risque de pollution de l’environnement marin, d’où l’installation de sea booms à l’entrée du parc marin, soit un peu moins de 500 mètres, dont 125 mètres pour le compte de la compagnie de distribution pétrolière Vivo Energy. Pour l’instant, le parc marin, situé à un peu moins de trois kilomètres au sud-est des lieux du naufrage, semble être épargné par les nappes d’huile lourde s’échappant de la soute du MV Wakashio vu que le courant général tire vers le nord-est en empruntant principalement le couloir entre l’Île-aux-Aigrettes et la côte de Pointe-d’Esny.

Avec l’environmental emergency declaration signée par le Premier ministre, Pravind Jugnauth, vendredi, la région du Blue Bay Marine Park est décrétée zone interdite, sauf pour les besoins d’opérations, dont entre autres les délibérations du National Crisis Management Committee, présidé par le chef de gouvernement, dont la première réunion s’est déroulée vendredi après-midi et devant se tenir quotidiennement.

Pointe d’Esny sous haute surveillance

Le rivage de Pointe d’Esny est placé sois stricte surveillance des mouvements des oil slicks vu la proximité avec le casualty site du MV Wakashio, distance estimée à moins d’un kilomètre. Devant les appréhensions qu’une accélération du rythme du déversement de fioul se traduira comme une menace directe pour ce coin du sud-est, d’importants dispositifs sont déployés, soit quatre bateaux de la société Polyeco SA sur place, dont un équipé de skimmer et les trois autres d’IBC Tanks d’un millier de litres chacun pour des opérations de pompage de l’eau de mer polluée par des hydrocarbures.

En plus, quelque 315 mètres de sea booms et une centaine de mètres de sorbent booms ont été installés à Pointe-d’Esny. Des éléments de la SMF et des employés de la Tourism Authority sont engagés dans des travaux de nettoyage, avec les prochaines 48 heures considérées comme étant critiques.

A Rivière-des-Créoles,  un invité cauchemardesque

Depuis jeudi, les habitants du paisible village de Rivière-des-Créoles, perdu sur la route côtière entre Mahébourg et Flacq, vivent un cauchemar nuit et jour. D’abord, ils ont été assaillis par une forte odeur de fioul dans l’air. Mais très vite, ils se sont rendu compte que l’équilibre écologique des environs a été chamboulé. Une eau noirâtre a envahi le lagon, avec tout le littoral souillé, rendant le village méconnaissable. Du sans précédent avec le courant général de la mer dirigeant la marée noire  de manière irréparable sur la côte.

Devant la gravité de la catastrophe environnementale qui se développe, dès vendredi matin,  un important renfort, dont 225 membres de la SMF, soit l’un des plus importants contingents déployés sur un des lieux du sinistre, équipés de pelles, pioches et sacs poubelles, avec pour mission de procéder au nettoyage du rivage. Pour la seule journée de vendredi, quelque 10 000 litres de fioul ont été pompés de la mer par une société privée, alors que la SMF Engineer Squadron, travaillant de concert avec ECO Fuel Ltd, s’était retrouvée avec     12 000 tonnes d’oily liquid.

Le travail devait reprendre durant le week-end avec les habitants de Rivière-des-Créoles et des environs s’interrogeant sur les raisons derrière la lenteur et l’amateurisme dont ont fait preuve les autorités pour s’attaquer de front aux risques potentiels d’oil spill dès le début. Aujourd’hui, cette partie de la côte de Maurice se conjugue avec désolation et indignation, alors que le cauchemar est loin d’être fini.

L’île-aux-Aigrettes, un des fleurons de la conservation, en danger

L’île-aux-Aigrettes est une des fiertés de Maurice en tant que réserve naturelle. Mais dès mercredi dernier, au vu de l’évolution sur les lieux du sinistre, les responsables de la Mauritius Wildlife Foundation (MWF) ont dû se résoudre à élaborer le plan tant redouté pour un environmental worst case scenario. Ainsi, dès la fin de la semaine, des espèces d’oiseaux, dont l’Olive White Eye, avec une soixantaine dénombrés sur l’Île-aux-Aigrettes, de même que des espèces rares, ont dû être évacuées sur la volière de Rivière-Noire et d’autres environmental fall back positions.

Le danger pour cette réserve naturelle, très prisée que ce soit des Mauriciens ou des étrangers, est qu’un courant traversant entre l’île-aux-Aigrettes et le rivage de Pointe d’Esny draine le fioul  déversé du Mv Wakashio vers la côte. Des risques potentiels pour les oiseaux et autres reptiles, dont le cardinal et les scinques de Telfair.

D’aure part, dans un communiqué émis hier, le ministère de l’Agro-Industrie rappelle que “there is an established protocol that must be adhered to so as to enhance the chance of survival of animals (especially birds/seabirds) caught in oil spill”. Les membres du public sont avisés qu’ils ne doivent pas tenter de nettoyer les oiseaux recouverts d’huile lourde, mais plutôt de prendre contact avec le National Parks and Conservation Service qui fera le nécessaire.

MV Wakashio et les craintes des 3 843  tonnes de fioul

Les quelque 3 800 tonnes de fioul dans les soutes du bulk carrier battant pavillon panaméen représentent une menace mortelle pour la faune et la flore marines au large du sud-est de l’île et aussi pour l’environnement humain. Ce tonnage dépasse largement les limites de Tier-3 prévues par le National Oil Spill Contingency Plan. Cette cargaison de fuel oil à être pompée à hier matin est répartie comme suit à bord du vraquier battu par les vagues : 1 850 tonnes dans le Tank N°1 à babord, 1 183 tonnes dans le Tank N°1 à tribord, Tank N°2 à tribord: 801 tonnes, 6,5 tonnes au lieu des 9,5 tonnes du Service Tank.

Par contre, le reste de la cargaison comprend 209 tonnes métriques de marine gas oil, dont 104 tonnes dans le Starboard Tank N°1 et 105 tonnes dans le Tank N°2 à tribord encore intacte à bord, de même que les 88 tonnes de lubrucating oil. Il faut aussi noter qu’il y a un mètre cube d’huiles usées à bord du vraquier.

En fin de semaine, la salle des machines, la steering gear room et les cales Nos 7, 8 et 9 étaient inondées, alors que les cracks à la coque continuaient à se détériorer, avec des risques, évoqués dès jeudi, que le MV Wakashio se fracture en deux sous les effets des houles.

De leur côté, les vingt membres d’équipage, dont le commandant indien, évacués d’urgence du vraquier pour des raisons de sécurité, sont placés en quarantaine au Belle-Mare Recreational Centre avec une deuxième série de COVID-19 tests effectués jeudi dernier. Aussitôt la quatorzaine obligatoire bouclée, le commandant du MV Wakahsio sera interrogé under warning par une escouade spéciale de limiers du Central CID sous la supervision du Deputy Commissioner of Police Heman Jangi sur les circonstances de ce naufrage. Les officiers de la National Coast Guard de service le samedi 25 juillet dernier ont déjà consigné leurs versions des faits et des inculpations provisoires contre le commandant indien ne sont pas à écarter dans la conjoncture.

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