Économie des ménages : le rendez-vous de mercredi

La CPI Basket a accusé une hausse d’au moins 18% de 2019 à 2022 pour atteindre Rs 35 300,
alors que deux salariés sur trois touchent moins
de Rs 20 000 par mois

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   À la fin de septembre, l’endettement des ménages auprès des banques était de Rs 140,8 milliards, soit une progression de Rs 28 milliards par rapport à 2019

    Avec la BoM accumulant un trou de Rs 11 milliards dans son bilan, sa filiale, la MIC, alloue Rs 6,8 milliards au secteur privé et fait des placements privés  de Rs 47,4 milliards au 31 octobre

Statistics Mauritius ayant annoncé un taux d’inflation de 10,7% pour cette année, prenant à contre-pied les dernières prévisions optimistes de 9,5% formulées lors la dernière réunion du Monetary Policy Committee de la Banque de Maurice, la bataille en vue de rétablir le pouvoir d’achat du salarié est entrée dans une phase active. Les partenaires sociaux, que ce soit les représentants des différentes fédérations syndicales ou encore le patronat, chapeauté par Business Mauritius (BM), ont encore 24 heures, soit jusqu’à demain, pour faire connaître officiellement leurs prétentions. D’ailleurs, les propositions syndicales préliminaires portent sur une moyenne de compensation salariale de Rs 3 900 en attendant de fignoler les derniers détails. Le ministre du Travail et des Relations industrielles, Soodesh Callichurn, a transmis aux stakeholders des négociations tripartites la garantie de l’Hôtel du gouvernement que le versement de l’allocation de vie chère de Rs 1 000 aux 357 716 bénéficiaires, salariés du privé et du public de même que les self employed depuis le dernier budget sera maintenue jusqu’au 30 juin prochain. De son côté, Business Mauritius a déjà indiqué que des entreprises du privé pourraient solliciter des béquilles financières pour faire face à la situation.

Avec les prochaines délibérations formelles des négociations tripartites, présidées par le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, convoquées pour mercredi prochain, les dés de la compensation salariale seront jetés. Devant la nette détérioration du pouvoir d’achat des ménages enregistrée au cours de cette année, les syndicalistes se disent confiants que leur revendication pour une full compensation par rapport au taux d’inflation de 10,7% pour 2022, chiffres non-contestés de Statistics Mauritius, est des plus légitimes dans la conjoncture.

Dans le camp du secteur privé, en particulier au sein du corporate sector, l’on cache difficilement la crainte quant à une éventuelle générosité du gouvernement en matière de compensation salariale. La raison invoquée derrière cette hypothèse est que l’octroi de cette compensation pourrait être la dernière pour le présent mandat du gouvernement.

Une aile au sein du secteur privé croit déceler une odeur d’élections générales anticipées au cours du premier semestre de l’année prochaine en marge des développements anticipés sur le dossier de la réouverture des négociations engagées avec le Royaume-Uni sur l’archipel des Chagos, et plus précisément le bail de la base américaine de Diego Garcia. En tout cas, ces spéculations dans le privé autour des snap elections early next year rejoignent un scénario politique retenu dans l’opposition.

Rattraper la perte du pouvoir d’achat

“2023 étant la quatrième année du mandat de ce présent gouvernement, nous voyons difficilement le Premier ministre, Pravind Jugnauth, engager ses troupes dans des élections municipales pour ensuite se jeter dans la bataille pour les législatives quelques mois après les résultats des municipales”, fait-on comprendre, avec le secteur privé sur ses gardes quant au quantum de hausse des salaires pour compenser le pouvoir d’achat érodé des salariés.

Indépendamment de ces cartes politiques ouvrant la porte à des élections anticipées, les syndicats multiplient les initiatives pour un rattrapage de la perte du pouvoir d’achat. Dans cette perspective, Ashok Subron, au nom de la General Workers Federation et de la All Employees Federation (ACE) du regretté Rashid Imrith, a soumis au gouvernement toute une panoplie de demandes de données socio-économiques.

“L’analyse de ces informations qui nous ont été communiquées en fin de semaine suite à des requêtes de notre part devra nous permettre de justifier les demandes syndicales pour une compensation décente en faveur des salariés. Mieux encore, mettre en avant des preuves que les exigences des syndicats ne sont nullement démesurées en vue de soulager le fardeau de la population, écrasée par la hausse des prix”, déclare en substance Ashok Subron à Week-End.

De prime abord, l’évolution du coût du panier de la ménagère retient l’attention et les chiffres révélés lors de la réunion technique de mercredi dernier sont éloquents à plus d’un titre. De 2019, soit l’année des dernières élections législatives ou encore avant Covd-19, le Cost of the CPI Basket a enregistré une hausse de 18%, avec la détérioration encore plus conséquente de 2021 à 2022, soit en 2017, the Average Monthly Household Exoenditure était de Rs 28800 pour passer ensuite à:

l Rs 29 740 en 12018
(+ Rs 920)

l Rs 29 900 en 2019
(+ Rs 160)

l Rs 30 700 en 2020
(+ Rs 800)

l Rs 31 900 en 2021
(+ Rs 1 200)

l Rs 35 300 en 2020
(+ Rs 3 400).

Pour mieux appréhender les difficultés des ménages à affronter cette flambée des prix post-Covid-19, et en marge des répercussions de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le tableau de la répartition des salaires parmi les différentes catégories projette un éclairage des plus édifiants. En 2022, au moins deux salariés sur trois, secteurs public et privé confondus, touchent moins de Rs 20 000 par mois. Par contre, la situation est encore plus dramatique dans le secteur privé avec la moyenne passant à trois sur quatre (76,3%).

La répartition des salaires mensuels sur le plan national se décline comme suit :

l Rs 12 000 ou moins : 28,2% avec le pourcentage montant à 37,6% pour le secteur privé

l Rs 12 001 à Rs 20 000 : 33,5% et 38,7% pour le privé

l Rs 20 001 à Rs 30 000 : 16,9% et 11,5%, soit un sur dix, dans le privé

l Rs 30 001 à Rs 40 000 : 8,4% contre 4,1% dans le privé

l Rs 40 001 à Rs 50 000 : 4,8% contre 2,5% dans le privé

l Rs 50 001 et plus : 8,2% contre 5,9% dans le privé.

Un autre détail révélateur est que le nombre de salariés dans le privé touchant des salaires de base de plus de Rs 50 000 par mois est resté quasiment le même de 2019 à 2022, soit légèrement au-dessus de la barre des 17 000. Par contre, pour les salaires de moins de Rs 50 000 dans le privé, le nombre est en régression, passant de 313750 en 2019 à 281 100. L’on notera qu’en 2020, année du premier confinement, ce nombre était de 316 600.

À titre d’indication, en 2022, le nombre total de salariés dans le privé est de 298 500, dont 196 600 dans la tranche d’âge de 16 à 45 ans, soit une moyenne de deux sur trois avec 13 500 âgés de plus de 60 ans. Les hommes sont au nombre de 167 000 et les femmes de 131 500.

De son côté, le secteur public emploie 105 900 personnes, dont 43 200 éléments féminins et quelque 200 employés âgés de plus de 65 ans.

Pour en revenir à la perte du pouvoir d’achat des salariés, les derniers détails, en attendant les chiffres du Housing and Population Census 2022, indiquent que dans une famille sur trois (32%), il n’y a qu’un seul income earner, ce qui rend la situation encore plus dramatique. Plus dramatique encore est que dans un ménage sur dix, soit un peu plus de 30 000, “there is only one woman person working”.

Situation
dramatique

Par contre, le volet qui devrait susciter davantage de préoccupations se résume à l’endettement des ménages. Les données ne concernent que des emprunts contractés auprès des banques. À la fin de septembre, les Outstanding Bank Loans to Households étaient de Rs 140,8 milliards, soit une détérioration de l’ordre de 18% depuis 2019.

À titre d’illustration, en moyenne, chaque ménage se retrouve avec des dettes bancaires d’un peu plus de Rs 380 000. Toutefois, force est de constater qu’en réalité, le poids de l’endettement bancaire dans les ménages est différent, car ce ne sont pas toutes les familles qui peuvent prétendre obtenir des facilités financières auprès des banques.

Les chiffres communiqués à Ashok Subron par le secrétariat des négociations tripartites, assurant la coordination entre les ministères des Finances et du Travail et Statistics Mauritius révèlent que l’endettement familial a connu une nette accélération entre 2020 et 2022, passant de Rs 116,9 milliards à Rs 140,8 milliards.

Avec les quatre révisions successives du Key Repo Rate depuis le début de l’année, soit un relèvement total de 215 points, cet indicateur demande à être monitored de près, que ce soit au niveau des banques que des ménages….

Des chiffres à retenir

l 9 335 employés sur les 12 mois et 1 512 bénéficient du Partial Payment en 2020. C’est le plus grand nombre de bénéficiaires enregistrés sous les Transition Unemployment Benefits (TUB). Comparativement à 2019, soit juste avant la pandémie, ce chiffre a presque doublé.

L’année dernière, le nombre recensé dans ces deux catégories étaient respectivement de 7 836 et 1 911. Par contre, pour cette année 2022, la situation s’est inversée avec 3 536 employés obtenant un Part Payment sous les Transition Unemployment Benefits contre 791 pour les 12 mois complets.

Le document communiqué au négociateur de la GWF ne fait aucune mention des cas de fraude sous le TUB et qui font l’objet d’enquête cadenassée de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC).

l 28 350. C’est le nombre de travailleurs étrangers officiellement recensés dans le pays à ce jour. Le plus grand nombre avait été enregistré en 2020 en plein confinement du Covid-19, soit 33 380.

l Sur les 298 500 salariés dans le secteur privé, 75 600 sont dans la catégorie de Skilled Workers, 72 100 engagés dans des Elementary Occupations, 52 800 en tant que Service and Sales Workers et 35 900 des Clerical Workers. Les 62 100 restants sont considérés comme des Managers, des professionnels et des techniciens.

l À septembre dernier, le nombre de salariés et d’entrepreneurs contribuant à la CSG est de 419 545, alors que le nombre bénéficiant des Rs 1 000 sous la CSG Income Allowance est de 357717 pour un montant de Rs 1,6 milliard.

l Les TOP 25 Local Companies brassent un chiffre d’affaires global de Rs 179,5 milliards, en baisse par rapport aux Rs 195,6 milliards de 2019-20. Le montant de la Corporate Tax de cette catégorie est toujours légèrement au-dessus de la barre des Rs 2 milliards. En 2021-22, ces 25 compagnies avaient réalisé des profits nets de Rs 23,5 milliards, soit Rs 9 milliards de plus que pour le précédent exercice.

De 2019-20, ces Top 25 compagnies ont été délestées de quelque 6 000 emplois, avec leurs labour cost s’élevant à Rs 14,6 milliards en 2021-22 contre Rs 19,2 milliards en 2019-20.

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