ENJEU DE L’ÉCONOMIE : Les investissements privés au rouge et en régression

La performance des investissements publics aussi bien que privés en 2013 constitue un des éléments majeurs susceptibles d’influencer le taux de croissance économique. A ce stade, la Mauritius Commercial Bank (MCB), dans le premier numéro de l’année de MCB Focus publié vendredi après-midi, privilégie un modeste 3,5% tout brandissant un optimiste 5% si le Reform Agenda est relancé avec vigueur. Il va sans dire que le taux de croissance inférieur de 20 points aux prévisions de Statistics Mauritius relancera la polémique opposant le ministère des Finances à d’autres institutions engagées dans des exercices de prévisions économiques. Indépendamment de ces passes d’armes, l’élément crucial de l’analyse des responsables de MCB Focus, dont Gilbert Gnany, Group Chief Strategy Officer, Vicky Hurrynag et Nuvin Balloo, de la cellule stratégie et recherche, est axé sur le poids des investissements au sein de l’économie.
Dans la conjoncture, le fait décevant demeure que « private sector investment, excluding aircraft and marine vessel, is expected to somewhat contract in 2013 on account of lingering economic difficulties and uncertainties ». Dans le préambule, Gilbert Gnany souligne que « its share of GDP is projected to continue its descent to fall below the 17% mark this year, which is well short of the level being advocated to achieve the socio-economic objectives of the country ». La baisse dans les investissements se fera sentir pour la cinquième année consécutive avec le Gross Domestic Fixed Capital Formation atteignant 23,8% en 2012.
Déjà l’année dernière, les investissements privés avaient enregistré une contraction de 3,7% en raison des « soft economic conditions, heightened uncertainty levels and the restrained revenue generation capacity of enterprises ». D’une année à l’autre, les conditions sur le marché n’ont guère évolué de manière substantielle pour justifier un véritable renversement des tendances d’investissements des opérateurs économiques du privé. « This trajectory can be viewed with real concern insofar as restraints on capital expenditure tend to hinder the ability of the country to convincingly boost its productive potential and thence economic growth », souligne la MCB, qui confirme que l’industrie du bâtiment continuera à subir de plein fouet les effets de la crise depuis la fin des importants chantiers.
Dans cette perspective, le Chief Strategy Officer de la MCB préconise des efforts pour tenter de relancer la machine grippée des investissements. « Overall, the chief priority should be to re-ignite private sector investment and enhance the country’s external competitiveness », ajoute-t-il en évoquant la nécessité d’adopter une approche favorisant la croissance et susceptible de doper le « low domestic savings ratio ».
L’alternative pour soutenir les investissements se résume à la mise à exécution d’importants projets d’infrastructure, que ce soit au niveau des routes, de l’eau, de l’électricité ou du transport en commun. Mais des doutes subsistent quant au potentiel des investissements publics pour tirer la locomotive de la croissance. Les goulots d’étranglement dans l’exécution de ces projets sont légion. « At the public sector level, a strong growth is expected in investment therein on account of enunciated large-scale projects, although anticipated delays in implementation of the Road Decongestion Programme are likely to weigh down the final outcome », notent Vicky Hurrynag et Nuvin Balloo.
Tenant en ligne de compte ces facteurs, la MCB prévoit un taux de croissance de 3,5% en 2013 avec Gilbert Gnany ajoutant que « our growth prediction for 2013 is subject to prominent uncertainties and downside risks linked especially to any deepening of the Euro Zone crisis and potential geopolitical pressures on oil prices, while the expected real GDP growth for 2013 could be further hindered if domestic policies are not implemented in a proper way or are subject to reversals ».
L’une des conséquences directes de la morosité des investissements se traduit sur le taux de création d’emplois. Pour la quatrième année consécutive, le taux de chômage continuera à progresser pour atteindre 8,3% cette année en raison des « prolonged economic difficulties on the revenue-generating capabilities of firms, sustained market uncertainties and entrenched labour market rigidities ».
Au-delà de la progression du chômage en général, des appréhensions sont exprimées quant aux ravages de ce fléau parmi les jeunes et les femmes avec des taux nettement supérieurs à la moyenne nationale. « Worringly, female unemployment stood as high as 12,7% during this period, while 44% of the total number of unemployed was aged below 25 years », rapporte MCB Focus.
Dans son analyse des perspectives des secteurs économiques, la MCB se concentre sur l’industrie touristique, qui, ambitionne encore de crever la barre d’un million de touristes en une année. Les autorités devront faire preuve de hardiesse en adoptant des réformes en profondeur dans ce secteur affecté par la crise dans la zone Euro pour réussir ce tour de force.
« Against this backdrop and unless bolder reforms are put into place by more ambitiously tapping into airline connectivity capabilities for example – after duly tackling the perceived conundrum between air access capacity and potential demand for the Mauritian destination – it would be quite challenging to attain the target of 1 million tourists as set by the authorities for 2013, the more so given heightened competitive pressures being wielded by regional destinations », avertit la MCB, qui dresse une comparaison de la performance de l’industrie touristique des Seychelles, des Maldives et du Sri Lanka à celle de Maurice.
Les prévisions pour le textile ne sont guère brillantes avec une croissance marginale annoncée en 2013. Le sucre continuera à évoluer en territoire négatif avec la poursuite de la politique de downsizing et de sérieuses menaces contre les quotas d’exportation de sucre sur le marché européen à partir de 2015.
Par contre, le secteur des services financiers, malgré les attaques contre le traité de non-double imposition avec l’Inde, le Seafod Hub et la filière des télécommunications, de l’informatique et des communications (TICs) devront générer des taux de croissance appréciables en 2013.
Néanmoins, des signes positifs sont perceptibles sur d’autres aspects de la scène économique, dont l’évolution du taux d’inflation, présentée comme étant « manageable » dans la fourchette de 4 à 5% d’ici décelbre même si des craintes sont exprimées par rapport aux prix pétroliers et de ceux des « Administered Products », du déficit budgétaire estimé à 1,9% en 2012 et à 2,2% cette année en dépit des investissements publics en progression dans l’infrastrucrture et le paiement de la révision salariale du Pay Research Bureau et de la dette publique, taux maintenu à 53% du PIB.
La MCB fait également état du débat sur le désalignement de la roupie au cours de ces derniers mois, passant de 13% à la fin de mai de l’année dernière à 8% actuellement. Cette surévaluation de la roupie est présentée par le vice-Premier ministre et ministre des Finances, Xavier-Luc Duval comme un des facteurs ayant pesé lourd sur la croissance en 2012.
Dans le cadre de la relance du Reform Agenda, MCB Focus ouvre un autre chapitre délicat en proposant que la réforme de l’Etat-Providence soit engagée. « The comprehensive reform of the social welfare system should be seriously contemplated to ensure the sustainability of public finances, thus enabling the country to more effectively promote its socio-economic development over time », déclare le Chief Strategy Officer de la MCB.

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