GUERRE DES GANGS : Robin Souty confronté au « film » de la fusillade

Après trois semaines d’enquête sur le règlement de comptes mortel de Petit-Verger avec une victime, Yoven Velangany, tué par balle devant sa résidence, les limiers de la Major Crime Investigation Team (MCIT), travaillant en étroite collaboration avec des membres du CID de l’Eastern Division, ont pu établir la chronologie des événements de ce samedi 19 avril.
Toutefois, l’élément majeur, qui échappe jusqu’ici à cette enquête, demeure que les armes du crime – 3 fusils de chasse – n’ont pas encore été récupérées. Les enquêteurs sont sur une piste jugée valable, soit celle du chauffeur, qui aurait pris charge du 4×4 du suspect Robin Sourty pour le ramener de Petit-Verger, Saint-Pierre, à Camp Fouquereaux où il avait été abandonné le samedi soir. Des indications sont qu’au moins une des armes à feu, celle utilisée pour tirer sur la victime, aurait été dissimulée dans ce véhicule. Lors de son interrogatoire en présence de son homme de loi, Me Samad Goolamaully, en fin de semaine, le suspect Robin Sourty a avoué être sur place au moment des faits mais a nié avoir fait feu avec une arme.
La séance de Questioning Under Warning de ce suspect constitue un tournant dans cette enquête. La guerre des gangs avait connu une nette intensification suite à des incidents dans lesquels Robin Sourty, présenté comme faisant partie de la garde rapprochée du leader de l’opposition, Paul Bérenger, représente une pièce-maîtresse du puzzle. Au cours de ces deux jours, il a reconstitué en détails les grandes étapes de cette affaire avec pour toile de fond le trafic de drogue.
Dans sa version des faits, Robin Sourty allègue que dans l’après-midi du vendredi 18 avril, il avait croisé un dénommé Bakary à Saint-Pierre. Celui-ci lui aurait demandé de transmettre un message précis aux frères Harel à l’effet que « fer zotte konné ki mo pou desann zotte. » Le dénommé Bakary n’aurait pas été satisfait de la réaction de Robin Sourty, qui avait fait comprendre que ce n’était nullement ses oignons.
« Samdi gramatin, mo ti dan gymnase. Mo pe fer lekszersis. Mo ti pe fer Benchpress ek san ki mo attan mo ine gagn kut samurai lor mo latet. Mo ti abasourdi ek mo ti rekonet Bakary et Steven (Mootoocurpen) », ajoute Robin Sourty. Il confirme qu’il s’était rendu à l’hôpital pour se faire soigner mais qu’il a préféré signer sa « discharge against medical advice » pour pouvoir assister à la réunion du comité central du MMM à Rose-Hill dans la journée.
À Rose-Hill, ses amis et collègues bouncers, qui avaient eu vent de son agression avec confirmation de ses blessures, voulaient monter une expédition pour « alle donne ène koreksyon Bakari. » Des pièces versées dans le dossier à charge indiquent que c’est à ce moment précis que la bande à Jean-Philippe Harel, directeur de Body Guard Co. Ltd de Grand’Baie fut contactée vu les intentions du gang de Bakary. Un des suspects aurait également cité nommément le nom de Jean-Philippe Harel comme étant à Petit-Verger lors des coups de feu.
Confronté à ces éléments, Robin Sourty rejette la thèse de complot pour cette expédition punitive à Petit-Verger. « Mo ti dir banla pa bizin fer sa bann zafer-là. Mo ti dir zot ki mo pou alle laba pou alle koz ar Bakary », réfute ce suspect. Il ajoute qu’il devait partir en direction de Saint-Pierre après la réunion de cette instance du MMM. Il était accompagné d’un dénommé Alan Martin, des deux frères Sansfaçon et de Yannick Rivière, tous en détention policière dans cette enquête criminelle.
Robin Sourty avoue qu’en route, à hauteur de Côte d’Or, il avait été rejoint par un autre groupe de véhicules avec des bouncers. Il déclare qu’il a tenté en vain de les persuader de rebrousser chemin. « Zot ti kontinyé swiv mo transport », ajoute-t-il. Et à hauteur d’Helvetia, le cortège fut rejoint par un autre groupe du Nord.
Une fois sur place à Petit-Verger, Robin Sourty allègue que la situation a échappé à tout contrôle. « Mwa mo pa ti éna zarm ar mwa. Ene kut, mo nek, ine tende bao. Pa mwa ki ti tir kut fisi. Ene bann ine profité pou réglé zot kont. Mo inosan dans sa zafer-là. Mwa ki ti gagn kut samurai gramatin », a-t-il fait comprendre en substance aux questions des enquêteurs de la MCIT,  menés par le chef-inspecteur Luciano Gérard assisté de l’inspecteur Ranjit Jokhoo. Il nie également avoir donné des instructions pour tirer des coups de feu.
D’autres témoignages et aveux de suspects indiquent qu’au moins l’une des armes à feu appartiendrait à Jean-Philippe Harel, qui maintient avoir un alibi avec une entrée consignée au poste de police de Grand’Baie quelques minutes après les incidents de Petit-Verger. La présence de ce suspect sur les lieux du crime est donnée comme une quasi certitude avec la confirmation venant de certains suspects et de témoins oculaires, en sus des enregistrements vidéo sur téléphone cellulaire.
Une enquête départementale interne a été initiée en vue de déterminer les circonstances dans lesquelles une entrée avait été consignée au nom de Jean-Philippe Harel dans l’Occurrence Book du poste de police de Grand’Baie pour lui donner un alibi soi-disant en béton. Des développements sont à prévoir une fois le gros dans l’enquête sur la fusillade est bouclé.
Dans l’immédiat, d’importants moyens sont déployés en vue de retrouver les armes du crime. La police est sur les traces du chauffeur, un spécialiste des pièces de rechange de la région, qui avait pris le volant du 4×4 de Robin Sourty après la fusillade pour le déplacer jusqu’à Camp Fouquereaux. Les enquêteurs soupçonnent qu’au moins l’un des fusils, soit celui utilisé pour tirer sur la victime, avait été placé dans ce véhicule. L’arrestation de ce suspect devra permettre à la police de remonter la piste de l’arme à feu, pièce à conviction cruciale dans cette enquête, qui a déjà vu l’arrestation de 13 suspects.

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