La croisière espère sortir la tête de l’eau malgré les ravages du Covid-19

Contaminations et décès à bord, paquebots errant de port en port: malgré la pandémie qui a plombé son image et suspendu toute activité, le secteur de la croisière s’estime touché mais pas coulé et veut reconquérir sa clientèle avec de nouvelles normes sanitaires.

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Pour l’année 2020, le secteur tablait sur 32 millions de passagers dans le monde.

Un objectif rendu caduc par l’épidémie de Covid-19 qui laisse sur le flanc une industrie générant plus d’1,1 million d’emplois directs et indirects, en incluant entre autres la construction navale.

Après une crise sanitaire d’une telle ampleur, « aucune activité dans le tourisme ne peut reprendre à l’identique, la croisière n’y fait pas exception », résume à l’AFP Erminio Eschena, président de Clia France, l’association regroupant les principaux armateurs.

Surtout que l’image même de la croisière a été dévastée: « il y a notamment eu ce +navire de l’angoisse+ qu’a été le Diamond Princess, une espèce de bateau de pestiférés version 21e siècle », souligne Paul Tourret, directeur de l’Institut supérieur d’économie maritime (Isemar).

Avec près de 4.000 personnes à bord, le Diamond Princess est resté en quarantaine tout le mois de février au large du Japon, le nombre de cas de coronavirus culminant à 700 pour une dizaine de morts confirmées. Les images d’autres navires « contaminés » – Zaandam, Coral Princess, Costa Magica – ont également fait le tour du monde.

« Les médias d’une manière générale ont ciblé, avec beaucoup d’insistance par moments, la croisière. Cela a été fait avec un peu trop d’acharnement, il y a eu un besoin à un moment donné d’illustrer le coronavirus, les croisières ont servi à cela », juge Erminio Eschena.

A présent, le principal défi des compagnies – à l’arrêt total au moins jusqu’à début août – est de redonner l’envie de monter à bord.

« Il faut beaucoup travailler pour transmettre un sentiment de sécurité, en développant des innovations en termes de produits et services: la demande pour les croisières dépendra de ce qui sera mis en place », souligne Giuliano Noci, professeur de stratégie à l’école de commerce de Polytechnique à Milan.

– juste une « mauvaise passe » ? –

Un protocole sanitaire est en cours d’élaboration pour le secteur, et sera bouclé d’ici fin juin.

« Toutes les options sont à l’étude pour prendre en compte la distanciation sociale: envisager un taux d’occupation qui ne serait pas à 100% à bord ou dans les navettes, une refonte des flux d’accès et de circulation, l’arrêt des buffets pour ne proposer que de la restauration à table », détaille Clia.

« L’attention se porte aussi sur le contrôle à l’embarquement, l’évolution de l’offre de divertissement, les technologies numériques. Pour les excursions, nous travaillons sur des circuits avec un nombre de participants restreint par bus, eux-mêmes plus petits », complète Costa Croisères, marque du numéro un mondial du secteur Carnival.

« Cette situation pourrait favoriser l’innovation technologique », comme la réalité vituelle pour remplacer les excursions, note M. Noci.

Mais la reprise dépend aussi d’autres secteurs: sans trafic aérien, impossible d’acheminer les clients sur le lieu de départ de leur périple; avec des frontières fermées ou des quarantaines, pas d’escales à terre. Certains pays ont également proscrit les croisières pour une longue période, comme les Seychelles jusqu’en 2021.

« Nous adopterons une approche progressive en fonction de la situation de chaque pays. Une première phase pourra éventuellement privilégier des itinéraires nationaux, avant un élargissement aux pays voisins », indique Costa.

La Chine – deuxième marché derrière l’Amérique du nord – devrait être la première à repartir en croisière: « les Chinois sont tracés constamment, ce qui réduit significativement la probabilité de contamination », selon Giuliano Noci.

« Nous avons de nouvelles réservations pour cet automne et l’hiver prochain. Les vacanciers savent faire la part des choses », juge pour sa part Erminio Eschena.

Reste à savoir si les armateurs tiendront le coup: le géant Carnival, qui avait levé plus de 6 milliards de dollars en avril, vient de se faire évincer de l’indice phare de la Bourse de Londres, après avoir perdu les deux tiers de sa valeur depuis le début de l’année.

Mais pour Paul Tourret, l’optimisme reste de mise: « Les grandes compagnies s’attendent à une année difficile, mais considèrent que c’est juste une mauvaise passe ».

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