ART : Ce port où s’origine l’acte de peindre

Roger Charoux et Jocelyn Thomasse, peintres issus du groupe de Serge Constantin (1917-1998), grands rêveurs d’inconnu, cherchant dans l’espace et dans la chair la nouveauté, font le point sur une bonne cinquantaine d’années de travaux d’artistes qui ont opté pour la recherche et la nouveauté. « Analogies & Correspondances » est le thème choisi par Laetitia Lor, peintre, et Alicia Maurel, curatrice de THE THIRD DOT, (une plateforme culturelle), pour tracer le parcours dynamique de ces « aînés » selon le principe de l’analogie et de l’association en images, éloignées dans le temps ou l’espace. Un rapprochement harmonique entre les deux peintres pour suggérer la couleur et les sensations. Pour montrer aussi des valeurs originelles, une culture, un patrimoine artistique à travers un ensemble de 82 oeuvres présentées par paire au 13, Albion Docks, Trou Fanfaron, Port-Louis, jusqu’au 21 juin 2017.
Ils ont été parmi les premiers prêts à chercher une poétique nouvelle. Le voyage a commencé dans l’Atelier du Dôme rouge du peintre Serge Constantin, au Plaza, Rose-Hill. Jocelyn Thomasse a rejoint, dans les années 1960, Roger Charoux qui apprenait chez Constantin la technique du dessin « selon la manière dure », dit ce dernier. « Oublie ce que tu sais… » disait Serge Constantin pour inciter les apprentis à rêver de nouveauté, à faire preuve de créativité. Jocelyn Thomasse, lui, se souvient des correspondances avec le cosmos que lui a appris le grand peintre-écrivain Malcolm de Chazal (retrouver par le dessin primitif, la forme et les sons qui se répondent).
Roger Charoux et Jocelyn Thomasse ont cheminé ensemble, peint le Port, les navires, les rues de Port-Louis, les gens. « … Le Port demeure, comme cet emblème, ce mirage incessant. Serge Constantin et Jocelyn Thomasse affectionnaient particulièrement les décors changeants des bateaux, allant et venant, de l’atmosphère, de la lumière, de cet endroit empli de denrées et d’histoires venues des quatre coins du monde. Un Port est riche de choses… » écrit Alicia Maurel dans le catalogue qui accompagne l’exposition. De fait, toute île a un port voyageant sur tous les océans du monde. Roger Charoux décrit le lieu où se déroule l’exposition  comme celui « où bizarrement nous venions peindre… Il y a l’âme du grenier… l’art contemporain a besoin d`espace, de recul… » Le groupe de Serge Constantin, renouvelé, continue toujours de peindre, parfois devant le port, tout autant préoccupé d`inventions poétiques que de sensations. Au vu des portraits, des nus, des paysages, avec quelques incursions dans des figures abstraites, on peut même dire que la peinture de Charoux et de Thomasse avance dans une voie classique explorée dans le contexte d’une grande liberté donnée par des maîtres et influencée par la sensibilité personnelle de nos peintres. Cette peinture est aussi une interrogation  sur l’image picturale, ce qu’elle transmet, et sur la peinture elle-même dans son capacité à faire vivre ses sujets au coeur de l’intimité. « Œuvres figuratives, semi-abstraites ou abstraites se dévoilent en binôme, dans leurs liens visuels, thématiques, ou de formes, ces peintures racontent la vie de l’île Maurice, la poesie, la douce indolence de ce que c’est de vivre ensemble… » (Alicia Maurel).
L’ensemble des 82 tableaux est disposé aux cimaises comme un itinéraire à suivre au bord de rivières, dans les rues, dans un lieu pictural chargé de vibrations intenses imprégnant la sensibilité du regardeur.

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