ACCIDENTS DE LA ROUTE: On ne sait toujours pas se conduire…

Près de 40 morts depuis le début de l’année sur nos routes. Un chiffre qui laisse pantois lorsqu’on sait que plusieurs mesures ont été prises pour qu’il y ait moins d’accidents et de victimes de la route. Elles restent vaines parce que le changement de comportement des usagers se fait toujours attendre.
Meilleur état des routes, plus de visibilité la nuit grâce aux lampadaires, panneaux de signalisations et marquage des routes, radars et durcissement des lois pour une meilleure prise de conscience, campagnes de prévention régulière, plus de contrôles routiers… En dépit de toutes ces mesures, les accidents fatals demeurent d’actualité. Cela ne semble pas émouvoir certains automobilistes et usagers de la route (piétons, motocyclistes) : l’excès de vitesse des uns et/ou la négligence des autres continuent à provoquer des accidents. Un chiffre récent doit interpeller : plus de 300 contraventions pour excès de vitesse pendant le week-end pascal en dépit des appels à la prudence…
Trop d’accidents de la circulation sont occasionnés par l’insouciance des usagers et le non-respect du code de la route. “Il faut aller au plus profond des choses pour chercher les causes des accidents”, souligne Alain Jeannot, président de l’ONG Prévention routière avant tout (Prat). Il est rejoint par l’inspecteur de police Bijaye Rambhursy de la Traffic Branch. Tous deux reconnaissent que le comportement de certains usagers laisse vraiment à désirer. Les études menées montrent que 95% des accidents sont dus à la négligence des usagers de la route : excès de vitesse, conduite en état d’ébriété, utilisation du téléphone portable au volant…
Vulnérables.
Alain Jeannot souligne que certains usagers ne mesurent pas les risques qu’ils prennent sur la route. “Avec la vie moderne et trépidante, nous vivons dans le présentéisme. On ne se soucie pas du reste. La vitesse est considérée comme une valeur.” La somnolence au volant serait aussi un des facteurs provoquant des accidents, selon une étude qu’il a conduite. Il recommande que les responsables de Health & Safety dans les entreprises s’assurent que les chauffeurs ont suffisamment de temps de repos avant de prendre le volant.
Par ailleurs, il estime que les mesures prises par les autorités ne sont pas assez rigoureuses : un usager qui succombe à un accident de la route relève d’un cas d’“homicide involontaire”. “Entre le moment de l’accident et celui où le coupable se présente en cour, a-t-il le droit de conduire ?”, interroge-t-il. À ses yeux, une suspension du permis de conduire freinerait les ardeurs de certains, qui réfléchiraient à deux fois avant de commettre une infraction. “L’amende de Rs 2,000 ne décourage pas la vitesse”, ajoute-t-il.
On sait que les motocyclistes, les cyclistes et les piétons sont les usagers les plus vulnérables. Ils devraient faire preuve de plus de prudence, “n’ayant pas une “carrosserie” pour les protéger”, constate l’inspecteur Rambhursy. Ils doivent se rendre bien visibles, surtout la nuit, en portant des vêtements rétroréfléchissants. La tête étant une des parties les plus vulnérables en cas de chute, il est recommandé de porter un casque de protection – et surtout l’attacher. Il faut aussi savoir que le port de la ceinture de sécurité en voiture, à l’avant comme à l’arrière, diminue les risques de blessures graves.
Prévention.
Pour l’inspecteur Rambhursy, les usagers de la route doivent se comporter de manière plus responsable. “Les accidents n’arrivent pas qu’aux autres. Tout le monde doit se sentir concerné.” Comme Alain Jeannot, il croit dans la prévention et estime que l’éducation peut mener à un changement de comportement. Cela doit se faire à tous les niveaux, en commençant avec les enfants. Il souligne qu’à travers le National Policy Strategy Framework, le community policing est privilégié. L’inspecteur Rambhursy espère que ceux qui participent aux causeries et aux campagnes de sensibilisation deviendront des citoyens plus responsables.
La sensibilisation devrait se faire dès le plus jeune âge, souligne Alain Jeannot. En Australie par exemple, le code de la route et le comportement responsable en chemin sont enseignés aux enfants dès le primaire. Ils apprennent également les rudiments de premiers secours.
Des nouvelles législations sont aussi en préparation, comme le permis de conduire probatoire. Tout nouveau conducteur se verrait remettre un permis de conduire provisoire pour un laps de temps défini. En cas d’infraction, le permis lui sera enlevé et il sera obligé de passer un nouvel examen. À ce propos, Alain Jeannot estime qu’il faut revoir les tests menant à l’obtention du permis de conduire à Maurice.
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1, 3 million de morts annuellement
Les accidents de la route ont pris une telle ampleur que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a publié un rapport et un plan pour sensibiliser les populations et les autorités concernées. “Les traumatismes dus aux accidents de la circulation sont une des causes majeures de mortalité, puisqu’ils sont chaque année à l’origine de 1,3 million de décès”.
Si la tendance se maintient, les accidents de la circulation passeraient de la neuvième à la cinquième place comme cause de décès d’ici 2030, avec 2,4 millions de morts par an. L’OMS explique cette situation par l’augmentation rapide de la motorisation, qui ne va pas de pair avec une amélioration suffisante des stratégies de sécurité routière et d’urbanisme.
En mars 2010, l’assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution par laquelle elle proclame “la décennie 2011-2020, Décennie d’action pour la sécurité routière, en vue de stabiliser puis de réduire le nombre prévu de décès imputables aux accidents de la route dans le monde en multipliant les activités menées aux niveaux national, régional et mondial”. Le plan préconise plusieurs stratégies à être élaborées, dont la création d’un “système de transport routier mieux adapté à l’erreur humaine et qui tienne compte de la vulnérabilité du corps humain”, en mettant l’accent sur “la gestion de la vitesse et la conception des routes”.
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Une approche systémique doit être adoptée
“Il faut étudier un accident en profondeur pour en comprendre les causes. Il faut pour cela adopter une approche systémique et ne pas blâmer l’homme uniquement. Il faut prendre en considération le facteur humain, l’état de la route et celui du véhicule”, confie Ben Buntipilly, conseiller spécial au Bureau du Premier ministre.
Balayant d’un revers de la main l’hypothèse d’une mauvaise planification de certaines infrastructures routières, Ben Buntipilly rétorque qu’il y a “une approche globale, mais l’implémentation ne peut pas se faire globalement”.
Des mesures ont déjà été mises en place pour une meilleure sécurité routière, souligne-t-il. D’autres vont l’être, comme le permis à point ou le permis probatoire.
Il précise que “nous n’avons pas de routes sûres, mais nous avons des routes plus sûres”. Pour le conseiller spécial, c’est à cause de la grande mobilité des gens que les risques d’accidents ont augmenté.

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