Connexions Maurice-Rodrigues – Le cri du cœur d’Emilie : « Reverrai-je mes parents ? »

Son père souffrant et sa mère sont bloqués à Rodrigues.

Émilie est une jeune Mauricienne de 28 ans mariée et installée aux Pays-Bas depuis quelque temps. Elle est revenue au pays natal depuis le 30 octobre pour revoir ses parents, eux installés depuis de nombreuses années à Rodrigues. Or, son père et sa mère sont bloqués à Rodrigues et ne peuvent pour l’heure rentrer à Maurice.

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Reverra-t-elle ses parents qui espèrent encore rentrer avant son départ le 26 novembre pour les Pays-Bas ? C’est un véritable cri du coeur et un coup de gueule également contre les autorités que lance la jeune femme, lasse d’attendre en vain un vol arrivant ou partant vers Rodrigues. Mais surtout anxieuse qu’elle doive repartir sans avoir vu ses parents, et notamment son père qui est souffrant. Voici son témoignage qui, espérons-le, sera pris en compte par les autorités.

« Cela fait près de trois ans que je n’ai pas vu mes parents. À l’annonce des autorités mauriciennes de la réouverture des frontières le 1er octobre, pour Maurice aussi bien que Rodrigues, j’étais emballée de revenir. J’allais enfin pouvoir revoir mes proches. Cela doit faire du bien de pouvoir se serrer dans les bras, de pouvoir passer du temps ensemble. Surtout après ces longs mois de Covid. Maurice rouvrait ses frontières et le pays est Covid-safe. D’ailleurs, il n’y a pas de Covid à Rodrigues. Donc, pour moi, j’atterrissais à Maurice et prenais l’avion illico pour Rodrigues. Cela faisait longtemps que j’attendais cet instant. D’ailleurs, j’ai repoussé mon voyage déjà parce qu’alors que Maurice ouvrait ses frontières, Rodrigues est restée fermée. Soit.

Mais il est prévu qu’on puisse à nouveau voyager vers Rodrigues à la fin du mois d’octobre. J’ai une nouvelle fois repoussé ma date d’arrivée, car si je reviens à Maurice, c’est pour voir mes parents… Donc, que je puisse me rendre à Rodrigues. Mais lorsque j’ai atterri à Maurice après mon long voyage le 30 octobre, la nouvelle tombe : Rodrigues n’ouvrira pas ses frontières. Cela, alors que j’avais prévu d’y passer tout mon séjour.

L’espoir d’un vol de rapatriement

À la toute dernière minute, sans crier gare, sans prendre en compte que des annonces officielles ont généralement (pour ne pas dire « toujours ») une valeur importante. Déçue du fait que je ne pourrai pas voir mes parents, je garde espoir, le temps qu’ils puissent acheter des billets pour un vol de rapatriement vers Maurice. Après tout, je ne repars que dans trois semaines… Même si aucune info n’est communiquée, mes parents, pleins de ressources, obtiennent deux places sur le vol organisé le 6 novembre. Nous devrions enfin être réunis !

Malheureusement, mon père souffre d’une urgence médicale qui nécessite une hospitalisation immédiate le jour du départ, et se retrouve ainsi dans l’incapacité de prendre l’avion pendant quelques jours. Et ma mère décide de rester à ses côtés. Ils ont cependant l’espoir d’être rapatriés sur un vol médical étant donné que mon père a prévu de faire un suivi et des tests médicaux à Maurice. De plus, il souhaite un deuxième avis médical, et en a informé son médecin traitant à Rodrigues à maintes reprises.

Cela dit, le médecin ne lui a pas permis d’être sur un vol de rapatriement médical, qu’il y ait de la place ou non, car selon lui, il n’en avait pas besoin. Et son droit à un deuxième avis ? Et de me revoir après tout ce temps ? Les souhaits du patient ne semblent pas être pris en compte à l’hôpital de Crève Cœur (Port Mathurin). Le plus frustrant ? Seul ce médecin a le pouvoir de décider de ce qu’il en sera. Je suis choquée par l’absence consternante de coopération entre le corps médical en 2021 !

Quand la réouverture

des frontières de Rodrigues ?

Ces événements soulèvent deux principales questions. Tout d’abord, à combien de reprises peut-on changer d’avis quant à la réouverture annoncée des frontières ? Ayant étendu mon séjour d’une semaine, alors qu’il était prévu que je reparte vendredi dernier pour chez moi où m’attend mon époux, j’attends de voir mes parents depuis près d’un mois alors qu’ils sont coincés à Rodrigues. C’est une situation très pesante, car aucune information n’a été communiquée suite à la soi-disant réouverture des frontières ce 15 novembre.

Parallèlement, cela affecte également plusieurs acteurs du tourisme pour qui les temps ont été très durs ces 18 derniers mois. À chaque annonce officielle, ils prévoient du stock en cuisine, prennent des réservations pour les hébergements et les excursions… pour ensuite devoir tout gâcher ou rembourser. Il faut également noter que ce type de situation si mal organisée et instable de la part des autorités mauriciennes et rodriguaises constitue le cauchemar des (nouveaux) investisseurs financiers. D’où vient la souveraineté d’une décision à Maurice ? Quid du droit de circulation ?

« …on meurt de chagrin, de solitude… »

Ensuite, peut-on « protéger » une population sur un seul pan ? Oui, le Covid tue. Mais il existe des solutions telles que la vaccination et les gestes barrières. Il va falloir apprendre à vivre avec cette nouvelle maladie à travers la réadaptation, car ce virus va constamment évoluer. Cela dit, savez-vous ce qui tue également et qui peut toucher chacun d’entre nous ? Une mauvaise santé mentale, un moral au plus bas sur une longue durée… car si l’on ne meurt pas d’un virus, on meurt de chagrin, de solitude et de dépression. Il est primordial de faire en sorte que la population puisse reprendre le cours de la vie, le plus « normal » possible, tout en prenant des précautions. L’autarcie n’en est pas une, surtout pour Rodrigues. »

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