Construction : Les prix demeurent très élevés depuis le Covid

En deux ans, hausse de 25 à 35% des coûts

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La pénurie de main-d’œuvre toujours problématique

Depuis septembre dernier, les prix ont amorcé une légère tendance à la baisse dans le secteur du bâtiment, mais demeurent toujours plus élevés que pour la même période en 2021. L’indice des prix à la construction (CPI) a enregistré une légère baisse pour atteindre 131,9, et a ensuite maintenu une tendance à la baisse pour atteindre 130,8 en décembre. Toutefois, malgré cette tendance à la baisse, les prix dans le secteur demeurent toujours très élevés et volatils. D’ailleurs, le CPI a augmenté de 10,7% en octobre 2022, de 9,5% en novembre et de 8,8% en décembre, comparé aux mois correspondants en 2021, comme l’explique Statistics Mauritius.

Durant le dernier trimestre 2022, aucun changement n’a été enregistré dans les sous-indices “Labour” et “Transport”. Le sous-indice “Location d’équipements” a augmenté de 0,5% par rapport au trimestre précédent. Le sous-indice “Matériaux” a baissé de 0,6% en octobre 2022, principalement en raison de la baisse des prix des barres de fer (-2%) et des ouvertures en aluminium (-6%), partiellement compensées par des augmentations des prix du “Hardcore” (remplissage), de +4,7%, des agrégats (6,4%) et des blocs (10,1%).

En novembre 2022, le sous-indice des matériaux s’est encore contracté de 0,1%, principalement en raison d’une diminution des prix des barres de fer (-2%), partiellement compensée par une hausse des prix des menuiseries en bois (+2,4%). Le sous-indice “Matériaux” a encore diminué de 0,4% en décembre 2022, suite aux baisses des prix des barres en de fer (-3,8%) et de la plomberie (-1,9%), partiellement compensées par des hausses de prix de la charpente en bois (+1,3%) et de la menuiserie en bois (+1,6%).
Bhooshan Ramloll, managing director de RBRB Construction, explique : « Les prix n’ont pas vraiment baissé. Par exemple, pour les barres de fer, les prix ont baissé de 5%, mais les fournisseurs ne jouent pas le jeu. » Il parle aussi du coût de la main-d’œuvre, qui est en hausse, et prévoit que le prix du ciment augmentera cette année. « C’est l’offre et la demande. La demande grossit et les prix vont augmenter. »

L’opérateur évoque au passage la compensation salariale de Rs 1 000, qui aura d’énormes répercussions sur le coût de production. « Même si nous comprenons que le coût de la vie a augmenté, c’est très compliqué de payer cette compensation par les temps qui courent. Nous avons 400 employés et cela représente une hausse de Rs 400 000 par mois de notre masse salariale et de Rs 4,8 millions par an. Cela affectera grandement notre profitabilité. Le hic, c’est que nous avons fini de donner des cotations aux clients et que nous ne pouvons plus changer les prix maintenant », explique Bhooshan Ramloll.

Le fait que les prix inclus dans les contrats ne font pas provision pour les fluctuations de prix sur le marché ne permet pas aux contracteurs d’avoir « une bouée de sauvetage », dit notre interlocuteur. Il faut qu’il y ait un “price adjustment” dans les contrats de construction. « Cela veut dire que si vous avez mis un prix en 2021 et que le projet démarre en 2023, nous devons travailler sur les prix de 2021. C’est le cas pour la majorité des projets et, ensuite, nous nous retrouvons sous pression, avec l’inflation qui a augmenté entre-temps. Personne n’avait prévu que l’inflation allait prendre une telle envergure. » Il espère que le gouvernement mette une loi pour prévoir la fluctuation des prix dans les contrats, « sinon nous serons obligés de travailler sur de plus grosses marges ».

Le secteur est également toujours affecté par un manque de personnel, et le recours à l’importation de main-d’œuvre n’est pas une sinécure non plus. « L’importation n’est pas facile. Il faut avoir le permis, puis sélectionner les personnes, avoir les permis de travail, les faire venir et les installer dans un dortoir. Les procédures prennent du temps, soit entre trois et six mois », dit-il.

Un autre opérateur explique que le secteur n’attire pas les jeunes, car « c’est un métier très dur, où on commence très tôt et on finit très tard ». Un promoteur déplore, lui, que le coût de la main-d’œuvre a beaucoup augmenté. Et parfois « de manière artificielle », comme c’est parfois le cas pour les poseurs de carreaux et de pierres taillées, notamment. « Certaines personnes profitent de la situation pour augmenter encore plus leurs prix, alors qu’il n’y a aucune raison spécifique à cela. »

La pénurie de main-d’œuvre est un gros problème à tous les niveaux de la construction. « Il y a quelque temps, c’était uniquement sur les chantiers, mais aujourd’hui, même les bureaux de professionnels éprouvent des difficultés à recruter et à retenir les employés. On trouve difficilement des gens expérimentés, et à chaque fois, il faut recommencer avec les jeunes et les former. Mais ces jeunes quittent après 5 ou 6 ans, car ce n’est pas un secteur “glamour”. Ils changent de secteur et, après, on recommence le processus de recrutement et de formation », explique un ingénieur évoluant dans le secteur du bâtiment.

Depuis la pandémie, le secteur reste en proie à diverses problématiques, avec la hausse des coûts de production mais aussi le fait que plusieurs opérateurs ont disparu, à commencer par de gros players, comme PADCO et Building and Civil Engineering Ltd. D’autres petits contracteurs ont également fermé boutique. « Le métier devient difficile et il y a trop d’imprévus dans le secteur. À tout moment, on peut voir le prix du ciment grimper, ou d’autres items. Les prix sont très instables et le marché est très volatil », souligne Bhooshan Ramloll.

Parmi les principales contraintes des contracteurs demeure le prix du diesel, qui a des effets en cascade, faisant grimper les coûts de production à tous les étages, à commencer par les frais de transport des employés. La récente augmentation du diesel a d’ailleurs vu une hausse de quelque 3% sur les contrats. « Dès que ça augmente, ça affecte toutes les prestations. C’est une réalité. »

Les entrepreneurs expliquent que depuis la pandémie, les prix demeurent volatils et qu’ils sont forcés de répercuter les hausses sur le marché. Les tarifs du fret ont ainsi quasiment quadruplé depuis le Covid. Ils ont certes baissé depuis quelque temps, mais ils demeurent toujours très élevés. Comme le résume un contracteur : « La situation est toujours compliquée et les prix sont toujours volatils. Nous n’avons pas constaté de réelle baisse ces trois derniers mois sur les prix par rapport aux “tenders”. »

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