COURT OF INVESTIGATION | Naufrage du MV Wakashio : Des mensonges des officiers de la NCG sur des appels « invisibles »

Les relevés téléphoniques ne démontrent aucun appel entre l’Operations Room de la NCG et le poste de Pte-du-Diable entre 18h05 et 20h20 le 25 juillet 2020

- Publicité -

L’assesseur Geneviève aux officiers en Cour : « Everybody seems to have memory loss here. You better speak the truth. We will investigate anyway »

Les officiers de la National Coast Guard (NCG) qui étaient de garde à l’Operations Room ainsi que le Radar Operator en poste au moment du naufrage du MV Wakashio dans la nuit du 25 au 26 juillet 2020, ont passé un mauvais quart d’heure, hier. De retour devant la Court of Investigation, le PC Ujoodha, de l’Operations Room, et le PC Sujeebhun, de la station de Pointe-du-Diable, avaient, lors de leur audition, en mai dernier, déclaré avoir effectué des appels téléphoniques  vers 19h30 pour signaler la présence du vraquier dans les eaux territoriales de Maurice. Sauf qu’en Cour hier, ils ont été confrontés aux relevés téléphoniques de MT, qui ne démontrent en fait aucun appel effectué entre 18h05 et 20h20. « It is because you did not call. We have two documentary evidence to show that you never called », a lancé l’assesseur Mario Geneviève.

En mai, le PC Arvin Ujoodha, qui était en poste à l‘Operations Room de la NCG le jour du naufrage, avait indiqué avoir effectué un appel vers 18h10 au poste de Pointe-du-Diable à travers la VHF Radio pour signaler la présence du MV Wakashio. Il aurait alors parlé au PC Sujeebhun. Il avait indiqué l’avoir rappelé deux ou trois minutes pour confirmer le nom et la position du navire. Or, il avait affirmé que vers 19h30, il avait rappelé le PC Sujeebhun de la ligne fixe de l’Operations Room, pour de nouveau confirmer les détails sur le navire, et le PC Sujeebhun lui aurait alors dit qu’il avait à maintes reprises contacté le bateau, mais en vain.

Seulement, à en croire les relevés téléphoniques de MT, aucun appel n’a été effectué à cette heure-là. Le premier appel de l’Operations Room au poste de Pointe-du-Diable était à 20h20. L’assesseur Mario Geneviève, qui menait l’interrogatoire, devait alors rappeler au témoin au fait qu’il avait dit en mai qu’après un premier appel sur la VHF Radio, il avait de nouveau appelé le PC Sujeebhun sur la ligne fixe deux ou trois minutes après pour confirmer certains détails à propos du navire.

Or, si l’Operations Room de la NCG possède deux lignes fixes enregistrées en son nom, contre une seulement pour le poste de Pointe-du-Diable, aucun appel n’avait été effectué ce soir-là. Face à la pression insistance sur ce point spécifique, le PC Ujoodha devait revenir sur sa première déposition, durant laquelle il avait donné les détails exacts de ses appels, pour déclarer hier en Cour qu’il ne se souvenait plus de l’heure exacte. « I do not remember the exact time and for how long but I remember I called Pointe du Diable », a-t-il affirmé.

A plusieurs reprises, le panel de la Cour d’investigation devait lui demander de raconter ce qui s’est passé « exactement » ce soir-là, mais le témoin a maintenu qu’il avait appelé. « There was no call between you and Sujeebhun. Please tell us exactly what happened when you first found Wakashio », a dit Mario Geneviève.

Avec le témoin maintenant sa version des faits ou encore disant qu’il ne se souvenait plus des détails exacts, Mario Geneviève, visiblement agacé, devait lancer : « This call was not made. I am afraid you are lying to us. »

Le témoin a également indiqué avoir pris connaissance que le vraquier était “grounded” vers 20h30, et que quand il avait parlé au PC Sujeebhun, il n’était pas au courant de la situation. Mario Geneviève a indiqué que lors de sa déposition initiale, le PC Sujeebhun avait affirmé que vers 19h30, quand il l’avait appelé, il avait dit au PC Ujoodha qu’il lui confiait désormais le monitoring du navire, et qu’il n’allait plus suivre cette situation.

Mais le PC Ujoodha a catégoriquement nié. « Today we see you don’t have a very good memory. You gave the exact time last time and you say you got the time from the DB entries. Now you are saying approximately, you are speculating. You are not supported in what you say », a repris l’ancien juge Abdurafeek Hamuth.

Pendant plus de deux heures, le témoin a été face à ses contradictions quant à ce qu’il avait fait ce soir-là. Il a cependant maintenu avoir dit la vérité « tout le temps ».

« Flabbergasted »

L’autre témoin appelé à la barre, le Radar Operator Mevin Sujeebhun, a aussi fait face à ses incohérences. Il avait donné comme version qu’il y avait eu une communication entre le PC Ujoodha et lui vers 19h30 sur la ligne fixe de l’Operations Room.

Une fois de plus, l’assesseur Mario Geneviève devait lui faire comprendre qu’il n’y avait eu aucun appel. Mais malgré toutes les questions posées, le témoin devait se contenter de dire qu’il ne se souvenait plus, « car cela remonte à plusieurs mois ». Et l’ancien juge de lui faire remarquer que, lors de sa déposition, en mai, il avait pourtant donné des détails précis.

Le témoin n’a ainsi pas été en mesure d’expliquer comment il n’avait pas vu s’approcher le navire des récifs et pour quelles raisons il n’avait rien fait et que ce n’est qu’après 20h qu’il avait tenté de connaître la localisation du vraquier. Il ne se souvenait pas non plus quel appel il avait passé ce soir-là ni même vers quelle heure, se contentant de répondre à chaque question posée par des « maybe » ou « I do not recall ».

Exaspéré, Mario Geneviève  devait lancer : « You are a Radar Operator. Who trained you? I am flabbergasted. It is unbelievable for a Radar Operator to say what you just said. It is because you did not call. We have two documentary evidence to show that there was no call at all ».

La Court of Investigation a ainsi eu du mal à accepter les versions incohérentes des officiers de la NCG. Rappelons que c’est sur la base de ces informations fournies par National Coast Guard par le truchement du commissaire de police, Khemraj Servansing, que le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a répondu à des Private Notice Questions du leader de l’opposition d’alors, Arvin Boolell, et des interpellations parlementaires.

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour

- Publicité -