COVID-19 – Culture vivrières : les planteurs de la zone rouge « gagn GM-là margoz »‘

– Ils accusent des pertes variant de Rs 100 000 à Rs 120 000 par arpent sous légumes

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À partir de ce début de semaine, les planteurs de la zone rouge peuvent livrer leurs fruits et légumes aux marchands et aux encanteurs à la rampe adjacente du National Wholesale Market de Wooton de 5h à 9h du matin. Cette décision du ministère de l’Agro-industrie a été prise après consultations avec le commissaire de police, Khemraj Servansing. Deux jours sont consacrés à cet exercice, soit les mardis et vendredis. Mais pour les planteurs de la zone rouge, « ki gagn guvernma-là margoz », cette décision aurait dû être prise en réunissant les planteurs, marchands et encanteurs. Pour eux, l’exercice pourrait s’avérer être un « fiasco », comme cela avait été le cas pour la décision prise il y a quelques semaines permettant aux planteurs de livrer leurs légumes de 5h à 8h du matin.

Les planteurs de la zone rouge détenant leurs cartes de planteurs pourront livrer leurs fruits et légumes à la destination susmentionnée. Les marchands et les encanteurs détenant un Work Access Permit (WAP) sont seuls autorisés à s’y rendre pour l’achat des fruits et légumes. Tous ceux qui se rendront à cet endroit doivent par ailleurs obligatoirement porter un masque et obéir aux règles de la police.

Toutefois, cette décision du gouvernement est très loin d’être acceptée par les planteurs de la zone rouge. Ces derniers, avant même cette décision, avaient été contraints de détruire des arpents de légumes, notamment de choux, carottes, courgettes et pâtissons, prêts à être récoltés, car les marchands n’avaient pas le droit de se rendre dans la zone rouge. « Le temps accordé aux planteurs, soit de 5h à 9h, est très réduit. Nous n’avons eu que deux jours par semaine. Les planteurs se rendent sur place mais, souvent, les marchands ne veulent pas se déplacer. Lorsque l’horaire était de 5h à 8h, les planteurs s’y sont rendus avec leurs légumes, mais les marchands n’y étaient pas, tout comme les encanteurs. Le temps alloué est insuffisant pour que les planteurs et les marchands arrivent au même moment. L’encanteur a aussi la pression de vendre les légumes en peu de temps » , explique Arassen Pagenee Chinan, planteur de la zone rouge.

Il comprend toutefois l’hésitation des marchands, étant donné, dit-il, qu’ils ne savent pas si tous les légumes seront disponibles. « Je prévois qu’il n’y aura que deux planteurs ou deux ou trois marchands », fait-il ressortir. Prévoyant déjà un échec de cette décision gouvernementale, il soutient que les planteurs auraient dû pouvoir aller livrer leurs légumes peu importe la région et l’heure. « Un planteur ne se déplacera jamais pour rien, sauf pour distribuer ses légumes. Mais on ne laisse pas les planteurs entrer et sortir de la zone rouge. C’est devenu un problème », ajoute Arassen Pagenee Chinan.

Il regrette ainsi qu’à cause de cette situation, les légumes pourrissent dans les champs et se vendent cher dans les supermarchés. Selon lui, pour inciter les planteurs, les marchands et les encanteurs dans la vente de fruits et légumes, on aurait dû procéder à la vente à l’encan les mardis et jeudis au bazar de Vacoas. « On aurait pu le faire de manière contrôlée, où les planteurs arrivent un à un et déposent leurs légumes. Et de l’autre côté, les marchands arrivent aussi un à un pour récupérer leurs légumes. Cela aurait été plus adéquat. Il faut se rendre à l’évidence que Wooton n’est pas accessible à tout le monde », dit-il.

Cependant, on ne laissera pas les marchands pénétrer dans la zone rouge, dit-il. Le planteur estime ainsi que le ministère aurait pu prendre une « meilleure décision » en laissant les planteurs, marchands et encanteurs se rencontrer toute la journée, « au lieu de juste de 5h à 9h », dit-il. « Les marchands et les planteurs peuvent s’y rendre quand ils le veulent et les encanteurs présents n’ont qu’à faire le lien entre eux », reprend-il.

Pour lui, les planteurs se sentent « abandonnés » et sont « très en colère ». À ce jour, quasiment tous les légumes cultivés par les planteurs de la zone rouge ont été détruits, rappelle-t-il. « La demande pour les légumes est présente, mais l’accessibilité à ces légumes n’y est pas », regrette-t-il. Et de dire que des choux et des carottes ont été jetés dans les champs, ajoutant que des légumes sont déjà détruits et que certains planteurs doivent planter à nouveau. « Mais les planteurs n’arrivent pas à cultiver à nouveau. Ils perdent leur argent et leur temps. Une pénurie de légumes est à prévoir dans les mois à venir », estime-t-il. Ce planteur de La Marie regrette par ailleurs qu’aucune permission ne soit octroyée pour qu’ils puissent récupérer des semences et des fertilisants pour commencer leur plantation de légumes.

Cette décision du ministère de l’Agro-industrie est également décriée par Vikash Mungry, secrétaire général de l’Agricultural Development Marketing Association, et qui siège aussi sur différents conseils d’administration ayant lien avec la plantation de légumes. « Je me demande si les marchands se déplaceront réellement pour acheter ces légumes. Ils ont aussi un coût. Lorsque les marchands viennent de loin pour se procurer des légumes, ils font du tort aux consommateurs en vendant les légumes à un prix élevé. Nous vendons le chouchou à Rs 10 le kilo aux marchands, mais eux le vendent à Rs 35, car ils viennent de loin », explique ce planteur.

Selon lui, la zone rouge est le principal endroit pour la production de chouchous et de choux. « Je crains que les consommateurs doivent payer plus cher. Les planteurs ne vendent pas leurs légumes à un prix élevé. Ce sont les marchands qui pratiquent un prix abusif », dit-il catégoriquement. Pour le secrétaire général, on aurait dû étendre l’horaire décidé. « Le planteur aurait eu le temps d’aller dans son champ et de récolter ses légumes. Cela prend déjà du temps. Si le marchand est déjà présent et que le planteur n’est pas encore arrivé, il pourrait repartir. Que fera le planteur avec ses légumes ? Il n’a aucune autre option. Une chambre froide n’existe même pas pour conserver ces légumes », déplore-t-il.

Vikash Mungry se demande ce qui se passera si tous les planteurs apportent un ou deux types de légumes aux marchands. « On ne produit pas certains types de légumes. Les marchands pourraient ne pas être intéressés par les légumes qu’ils voient. Que fera le planteur dans ce cas ? » demande le planteur. Et de poursuivre que les planteurs pourraient travailler sur commandes. Ainsi, ils pourraient collecter tous les légumes la veille et les apporter le lendemain. Il suggère aussi que les stades de football soient utilisés pour la vente de légumes, sous la supervision de la police, qui ferait respecter les normes sanitaires.

Cette nouvelle décision, dit-il, intervient à un moment où tous les légumes sont déjà endommagés. « Du fait des voleurs de légumes et de l’absence de marchands, les planteurs ont été obligés de détruire leurs champs de choux », dit-il. « Nous pulvérisons des pesticides sur les légumes le matin. Nous devons respecter au moins sept jours et ne pas récolter les légumes. Mais nous voyons que les voleurs emportent ces légumes et les vendent au public. Le public doit être vigilant en achetant les légumes. L’effet des pesticides n’est pas immédiat, mais on le verra peu à peu », prévient Vikash Mungry.
Il regrette par ailleurs que ce début d’année ait été propice pour la culture de légumes par rapport à la même période lors des années précédentes. « Les planteurs ne voulaient pas investir pour la culture de légumes. Mais cette année, le climat est bon et la plupart des champs sont remplis de légumes. Malheureusement, nous sommes affectés par la Covid », dit-il. Par ailleurs, la majorité des planteurs de la zone rouge cultivent la pomme de terre à partir du 15 avril et les planteurs ont déjà obtenu leurs graines. Sauf qu’en ce moment, la plupart des champs sont remplis de légumes. « Les planteurs n’ont pas d’endroit pour la culture de la pomme de terre », dit-il.

Certains commenceront donc à cultiver la pomme de terre à partir de la semaine prochaine. La concurrence avec les établissements sucriers, qui cultivent aussi la pomme de terre, est de fait appréhendée. Si les deux parties récoltent leurs pommes de terre au même moment, les marchands se rendront auprès des établissements sucriers, dit encore notre interlocuteur. Ainsi, leur coût de production chutera jusqu’à Rs 160 000 par arpent. Selon lui, lors de ce 2e confinement, les planteurs de légumes ont perdu « jusqu’à 75% de leurs investissements ».

De son côté, Vivek Bhujun, planteur de la zone rouge, est aussi critique sur l’horaire décidé par le gouvernement. « Nous sommes dans nos champs durant ces heures. Nos employés sont présents et s’attellent à différentes tâches », dit-il. Aussi aurait-il préféré vendre ses légumes l’après-midi, car sortir le matin et laisser les travailleurs sur place « n’est pas approprié », dit-il.

Avec cet horaire (de 5h à 9h), il estime qu’une « pression est exercée sur les planteurs » pour qu’ils collectent tous leurs légumes la veille. Sauf que plusieurs légumes « changent de couleur et de texture le lendemain de la cueillette ». Avec pour résultat, selon lui, que les marchands ne voudront pas en acheter. La décision d’appeler les planteurs, marchands et encanteurs « n’est pas appropriée ». Pour lui, l’ouverture du mardi sera un « fiasco », car « les marchands ne se dérangeront pas pour un ou deux types de légumes ». Il dit aussi craindre que les planteurs rentrent chez eux avec tous leurs légumes demain matin. Et de conclure que, durant le confinement, il a perdu « plus de Rs 1 million ».

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