Covid-19 : ils disent non à la vaccination obligatoire

— « Hein ! To pa pou fer vaksin twa ? Kifer ? » La tension monte entre pro et anti-vaccin obligatoire

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— Ahad Khodabacus, un Mauricien établi en Afrique du Sud : « La liberté d’expression comprend le débat d’opinion »

La pression monte d’un cran pour les personnes réfractaires à la vaccination, compte tenu de la multiplication du nombre de morts depuis la circulation du variant Delta. Mais quelles sont les raisons qui poussent ces hommes et ces femmes à bouder l’inoculation ? Week-End a interrogé cinq citoyens lambda qui ont consenti à témoigner à visage découvert, car au-delà des préoccupations liées à leurs principes de liberté, aux effets secondaires des vaccins et aux avis contradictoires, ils ont le sentiment commun d’être stigmatisés et accusés à tort d’être des relais dociles de la « propagande complotiste ». L’annonce de la mise en place de la vaccination obligatoire dans certains secteurs d’activité et les rumeurs d’une extension de cette mesure vers les supermarchés enveniment le débat entre pro et anti-vaccins obligatoire.

Oumée Abdool Cader, 34 ans, enseignante

« Hein ! To pa pou fer vaksin twa ? Kifer ? » Oumée Abdool Cader, 34 ans, se voit souvent poser cette question lors de conversations avec des amis. En effet, rares sont les personnes opposées à la vaccination obligatoire qui ne se font pas tacler par ceux qui croient dur comme fer dans le rôle probant de la piqûre dans le recul de la pandémie. « Certes, je peux comprendre que certains sont convaincus des bienfaits de la vaccination, mais est-ce une raison pour refuser d’entendre ceux qui, en se basant sur leur principe de liberté, considèrent aujourd’hui que tous les vaccins ne conviennent pas à tout le monde ? » nous confie Oumée Abdool Cader, qui a préféré quitter le métier d’institutrice qu’elle exerçait depuis cinq ans dans une école préprimaire au lieu de se faire vacciner. « C’est mon métier, ma passion, mais j’ai préféré tirer ma révérence, car je considère qu’obliger, d’une façon déguisée, une personne à se faire injecter des doses qui sont en phase d’expérimentation est contraire aux droits humains, en sus d’être méfiante de ses effets secondaires. »

Reenah Ram, 38 ans, enseignante

Reenah Ram, 38 ans, également enseignante dans le primaire, n’en a cure des bien-pensants de la vaccination. « Imputer aux non-vaccinés l’échec de la lutte contre le virus, alors que plus de 70% de la population s’est fait vacciner, est absurde. La réticence à se faire piquer illustre premièrement une crise de confiance envers la parole politique. Ne parlons pas des intérêts supposés de certains pseudo-experts avec l’industrie des vaccins. On nous prend pour des cobayes avec des vaccins qui n’ont nullement fait leurs preuves. » Celle qui vient de donner naissance à son troisième enfant nous raconte sa mésaventure dans un hôpital juste après son accouchement. « On m’a mise dans une salle où je côtoyais des patients atteints de Covid et qui souffraient de problèmes respiratoires. J’étais à bout de nerfs. Et dire que certains osent nous imposer des procédures alors qu’ils ne sont même pas capables de protéger dignement leurs mandants. » Reenah Ram, qui compte bien reprendre le travail l’année prochaine, souhaite que « la situation sanitaire s’améliore d’ici là, faute de quoi j’aurai à faire un choix difficile contre mon gré. »

Mettre sa carrière entre parenthèses

Elodie Calou, 30 ans, chanteuse freelance

La décision de ne pas se faire vacciner peut être attribuable à un ensemble d’autres facteurs, comme ceux qui estiment que leur état de santé n’est pas compatible avec la vaccination. À l’instar des deux institutrices, Élodie Calou, 30 ans, se retrouve confrontée à un choix cornélien : accepter l’inoculation ou refuser, avec des conséquences que cela implique pour la suite de sa carrière de chanteuse freelance dans hôtellerie. Pour des raisons médicales, elle a décidé de choisir la deuxième option et mettre sa carrière entre parenthèses. « Depuis quelques années, j’ai remarqué avec inquiétude que j’ai des hématomes de manière spontanée, sans avoir pris de coups. Les causes de ces bleus spontanés seraient peut-être due à une baisse du taux de plaquettes dans le sangD’où ma réticence à me faire administrer le vaccin. Je ne dis pas que j’ai raison, mais mes craintes sont légitimes, n’en déplaise à certaines personnes vaccinées. »

Mère d’une fillette de huit ans, Élodie Calou voit anxieusement ses économies partir en fumée. « C’est compliqué. Mon médecin traitant est réticent à me fournir un certificat en vue de l’exemption à la vaccination. En outre, dans le consent form pour la vaccination, on nous demande de renoncer aux poursuites en cas d’effets secondaires et de mort des suites du vaccin. Ces lois liberticides sont injustes. Asterla mo retrouv mwa dan enn sitwasion finansier konplike », dit-elle.

« La seule à pouvoir décider »

Beverly Appave, 35 ans, directrice d’une agence de marketing

Beverley Appave, 35 ans, ne passe pas quatre chemins pour défendre son choix de ne pas accepter l’injection du vaccin et les restrictions imposées aux personnes non-vaccinées. « La vaccination doit être un choix. Mon corps n’appartient à personne. Je suis la seule à pouvoir décider ce que j’injecte dans mon corps. C’est une atteinte directe à ma liberté et mon droit de mouvement. Qu’on soit vaccinés ou pas, le risque de contracter ou de contaminer reste le même », souligne cette directrice d’une agence de marketing et de communication qui tire à boulets rouges sur ceux qui remettent en cause son combat farouche contre la vaccination obligatoire. « Je me fais souvent traiter d’antipatriotique. D’autres personnes affirment que je suis obligée de me faire vacciner si j’aime vraiment ma famille. Ils délirent. Honnêtement, je ne comprends pas cette logique. Nous avons vu comment les gens meurent dans les pays où le taux de vaccination atteint quasiment les 100%. Maurice n’est pas en reste, en atteste la tragédie à laquelle sont confrontées des centaines de familles. »

D’autres voix s’élèvent pour exprimer leur scepticisme sur la rapidité avec laquelle les vaccins anti-Covid ont été développés et autorisés. « Bon nombre de médecins disent que ces vaccins sont dotés d’une efficacité exceptionnelle. Je ne dis pas qu’ils ont absolument tort, mais je pense avoir le droit de me poser certaines questions quand on sait que le virus n’a pas cessé de tuer et de se répandre dangereusement dans le monde », avance Ahad Khodabacus, un Mauricien établi en Afrique du Sud depuis les années 2000.

« Marye pike pou fer pei-la redekole »

Ahad Khodabacus, un mauricien établi en Afrique du Sud

Se basant sur des discussions qu’il a eues avec des experts gravitant dans le secteur de la santé et au terme de ses propres recherches, Ahad Khodabacus met au défi ceux qui ont une confiance aveugle dans le vaccin et qui font fi de toute réflexion participative. « On reproche à tort les personnes qui diffusent une pensée alternative sur le sujet d’être systématiquement des complotistes. Or, la liberté d’expression comprend le débat d’opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans enflammer les débats. Je me suis documenté sur des sites fiables qui ont été approuvés par des médecins et réfutés par d’autres. Mais ça nous a permis d’avancer dans nos convictions. Qui sait ? Peut-être que je changerai d’avis un jour. »

Du coup, le quadragénaire, qui s’informe régulièrement de ce qui se passe dans son île natale, regrette d’une part la multiplication du nombre de morts à Maurice et, d’autre part, les discussions houleuses et les invectives qui pullulent sur les réseaux sociaux entre pro et anti-vaccin obligatoire. « Sakenn ena so lopinion, me fodre ena enn respe ant zot pou ki kapav marye pike pou fer pei-la redekole. »

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