DANNY PHILIPPE (LEAD): « Les parents eux-mêmes sont mal préparés

Présent et impliqué dans plusieurs régions du pays, pour les besoins des « outreach programs » préconisés par l’Ong dont il est le porte-parole, Danny Philippe, travailleur social, explique : « Les enfants se retrouvent souvent en situation de vulnérabilité parce que les parents eux-mêmes sont mal préparés à savoir ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire en présence d’un enfant. » Il prend comme exemple le fait que « de nos jours, tout est prétexte à faire la fête : même s’il s’agit d’un événement à caractère religieux, au sein de la famille, nombre de parents estiment qu’il faut “faire comme les autres” ». Une attitude qui « vient du fait qu’on se sent constamment en concurrence avec ses proches, ses voisins, ses collègues… bref, tout le monde ».
Ce qui amène, continue notre interlocuteur, « à des situations bien étranges : des soirées en boîtes de nuit avec des enfants, où l’alcool coule à flots, où l’enfant est témoin d’autres comportements qu’il assimile mal, car personne n’est là pour lui expliquer ou pour faire la différence ». Danny Philippe continue : « Quand on explique à ces parents que ces attitudes ne sont pas bonnes, comme quand ils demandent à leurs enfants d’aller acheter leurs boissons alcoolisées ou leurs cigarettes à la boutique, ils sont en colère. Même réaction quand on leur explique que consommer de l’alcool et fumer en présence de leurs gosses, ça a une mauvaise influence et un impact négatif sur l’enfant, ils se braquent… Ils nous disent de ne pas leur faire la morale, etc. » Or, rappelle le travailleur social, « notre propos n’est pas du tout là ». Il relève le fait que nombre de parents sont eux-mêmes mal préparés pour s’occuper de leurs enfants. « Peut-être qu’ils n’ont pas bénéficié d’un encadrement adéquat ni d’une éducation complète qui leur aurait donné les outils pour ce faire. »
Le porte-parole de LEAD explique : « Nos interventions dans les régions du pays nous prouvent qu’aucune couche sociale n’est à l’abri. Les enfants de toute l’île sont exposés et vulnérables : ils sont laissés pour compte, dans un très grand nombre de cas, sans encadrement de leurs parents, et donc sans éducation parentale comme il faut. » Ce qui inquiète davantage Danny Philippe, c’est le fait qu’« au sein de trop de foyers, on estime qu’élever son enfant est l’unique responsabilité de la maman ». De ce fait, « quand nous organisons nos clubs des parents, dans les différentes régions où nous intervenons, ce sont à 80% des mères qui viennent, et dans certaines régions, carrément 100% ! ».
Résultat, poursuit notre interlocuteur : « Les mères sont très éveillées. Au final, elles prennent conscience des manquements dans leurs quotidiens et comprennent l’importance de leur présence et leur comportement auprès de leurs enfants. » Néanmoins, relève Danny Philippe, « quand les mères commencent à appliquer ce qu’on leur a inculqué, dans nos ateliers et sessions de travail, les pères se braquent à ce moment-là, parce qu’ils sentent qu’être mis à contribution, ce n’est pas leur rôle et qu’ils doivent rester en dehors du processus ». Et c’est alors que les problèmes surgissent, explique Danny Philippe. « Certains pères, ne voulant pas être “left out” par leurs enfants, ils comblent par exemple ces derniers de cadeaux coûteux. Les mères, comprenant que cela ne va nullement aider à l’épanouissement de l’enfant, rappellent le papa à l’ordre, et là la situation se corse, car le couple s’entre-déchire… »
Danny Philippe remarque « les déviances dans les comportements, la sexualité précoce, certaines qui sont déjà mères à 16-17 ans ». Il poursuit : « L’alcoolisme arrive à un très jeune âge. Nous avons des enfants de 10 ou 12 ans qui boivent. Des adolescents de 15 ans qui expliquent que s’ils ne descendent pas trois ou quatre whiskys, ils ne peuvent s’amuser. Ajouter à tout cela des réflexes linguistiques qui donnent froid, tant il y a des jurons. Tout cela vient de ce que vit l’enfant auprès de ses parents. » Ce qui inquiète davantage notre interlocuteur, c’est quand un adolescent dit qu’il doit boire, « on réalise que c’est à la maison, donc supposément sous le contrôle de ses parents, qu’il se sert en boissons alcoolisées ».

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