DUBREUIL : Cinq familles ex-squatters attendent toujours d’être relogées

Relogées après avoir assisté à la destruction de leur longères en juillet 2010, cinq familles ex-squatters d’un terrain de l’État à Dubreuil vivent toujours dans l’ancienne usine de thé de la localité. Après avoir bénéficié d’un lopin de terre pour y bâtir leur nouvelle maison, elles se retrouvent désormais en face d’un nouvel obstacle : les frais de construction. Elles se sont tournées vers la National Empowerment Foundation (NEF) du ministère de l’intégration sociale pour bénéficier d’une aide.
Mardi après-midi, la cour de l’ancienne usine de thé de Dubreuil vibre sous les cris des enfants des familles d’ex-squatters de Dubreuil qui ont été expulsées dans des conditions difficiles en juillet 2010 alors que l’hiver battait son plein. Bien qu’ils respirent la joie de vivre, ces enfants sont conscients qu’une usine de thé n’est pas un lieu pour vivre. Mais avec le temps, ils se sont habitués à chaque pièce, chaque couloir et escalier de ce bâtiment désaffecté. Ils sont issus de familles qui étaient jugées non-éligible selon les critères de la NEF. Depuis le départ en masse des autres squatters qui ont été relogé à Résidence Dubreuil (voir hors-texte), ces cinq familles essaient tant bien que mal de survivre, les conditions de vie dans l’ancienne usine désaffectée étant loin d’être idéales. En plus de représenter un vrai danger pour les habitants, elle est affectée par le froid constant de cette région humide, située sur les hauts plateaux. « Zordi ou ena sans ena enn ti soley. Sinon ou ti pou kaye », nous lance Cindy Jouan à notre arrivée. Dans l’enceinte de l’usine, les toilettes mises à la disposition des habitants à leur arrivée en 2010 (quand plus d’une vingtaine de familles y ont été temporairement relogées en attendant que les autorités trouvent une solution à long terme à leur problème) sont toujours en fonction. Un signe de la présence humaine sur ce site, habité également par des pigeons.
Cette mère de quatre enfants habite à l’étage du bâtiment administratif de l’ancienne usine. Un espace qui petit à petit a été inspiré par le mode de vie de ses habitants. Les escaliers ont été consolidés par des “mains courantes” improvisées. « C’est une précaution pour les enfants », déclare-t-elle. Elle réside dans ce bâtiment avec la famille Loval. Si elles n’ont pas de lien de parenté, la destruction de leurs longères a contribué à créer un lien non seulement entre ces deux familles qui partagent un même espace mais également avec les autres familles présentes. « Nou na pa gagn okenn problem. O kontrer nou viv plis ki fami. Nou finn aprann konn nou kamouad ek nou finn aprann viv ansam », soutient Cindy.
Dans la convivialité, ces deux familles se partagent la cuisine et la même salle de bain. Cette partie du bâtiment a été aménagée grâce aux dons reçus par des bénévoles. Cindy indique avoir particulièrement apprécié l’aide des élèves du Collège Impérial de Curepipe, qui pendant plusieurs mois ont été très généreux en dons. C’est grâce à la générosité des Mauriciens que les cinq familles de l’usine ont pu se rebâtir une autre vie. Car, lors de la destruction de leurs longères, elles avaient tout perdu. « Ce fut un retour à la case départ pour nous ».
L’entraide est très important pour ces cinq familles. Hervé Loval, laboureur, qui réside dans l’ancien bâtiment de production de l’usine, indique que « c’est cet élément fondamental qui a permis aux familles de faire face à toutes les épreuves de cette situation ». Toutefois, nos interlocuteurs ne cachent pas leur souhait de posséder un jour leur propre maison. Mais malheureusement, les démarches administratives du côté des autorités tardent à aboutir.
« Lorsque nous avons refusé l’aide du gouvernement pour la construction des maisons, nous ne nous doutions pas encore que les prix des matériaux de construction allaient prendre l’ascenseur », laisse entendre Cindy, rejointe entretemps par Sivani Padayatchy.
Leurs familles étaient de celles qui avaient refusé l’aide du ministère de l’Intégration sociale alors que ce dernier proposait la construction de maisons pour les anciens squatters. Le logement proposé ne convenait pas à leurs familles, disent les deux femmes. Toutefois, elles ont bénéficié d’une parcelle de terrain entre l’usine de thé et le terrain de football de la localité.
Ce refus est cependant vu par certains comme une preuve de mauvaise volonté. « L’État a mis à leur disposition toutes les structures nécessaires pour qu’elles puissent éviter cette situation mais elles ont refusé. Aujourd’hui, ces familles sont toujours dans le flou alors que le ministre des Terres et du Logement Abu Kasenally était ferme à ce sujet lors de la remise des clés des maisonnettes aux autres familles. Elles étaient appelées à évacuer l’usine qui est actuellement en ruine », soutient un observateur et travailleur social.
Pour les familles, ce n’est pas une question de mauvaise volonté mais de « trouver le toit adéquat ». À Cindy d’expliquer : « J’ai quatre enfants et la maison que proposait le gouvernement était trop petite (39 m2 à Rs 329 000) pour mes enfants et moi. Nous avions pensé au , qui s’échelonne sur plus d’une dizaine d’années. Cela ne nous convenait pas mais nous nous savions pas encore ce qui nous attendait. »
Nos interlocutrices affirment cependant avoir suivi à la lettre les procédures exigées par les autorités pour obtenir un terrain à Dubreuil afin d’ériger leur propre maison.

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