À l’initiative de SME Mauritius : « Faire du cuir un des sous-secteurs les plus compétitifs »

L’industrie mondiale du cuir brasse USD 133 milliards annuellement. Les produits fabriqués sont multiples, et le potentiel pour Maurice d’en faire un sous-secteur dynamique est à l’agenda. D’ailleurs, un plan a déjà été élaboré. Maurice devrait pouvoir exporter ses produits en cuir à partir de 2025. SME Mauritius s’y attelle.

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L’inauguration du Leather Studio en début de semaine au centre de formation de SME Mauritius à Coromandel a fait remonter à la surface les trois facteurs principaux qui enfreignent le développement du secteur du cuir à Maurice. U rapport de l’All African Leather and Leather Products Institute suite à une visite des experts de la COMESA à Maurice pour une étude sur le secteur, relève que « plus de 70 % du cuir disponible à Maurice sont importés. C’est déjà un manque à gagner ». Le ministre du Développement industriel, Sunil Bholah., rappelle que la matière première de ces activités industrielles existe à Maurice.

Le rapport fait aussi mention du manque cruel de la formation professionnelle s’agissant de la fabrication de produits. L’autre point est l’absence de la technologie voulue pour soutenir cette industrie. Sunil Bholah a fait ressortir qu’une petite industrie du cuir existait à Maurice, mais qu’au fil du temps, elle a été vouée à l’échec. Il a avancé que le potentiel de cette industrie est resté inexploité en Afrique alors qu’une grande demande existe. Afin de relancer le secteur du cuir, il a dit que ce rapport a été pris au sérieux par son ministère depuis 2018. Un comité de pilotage a aussi été mis sur pied à cet égard.

Sunil Bholah a souligné que cet atelier est destiné à la formation et la conception de produits en cuir. Selon lui, le secteur du cuir à Maurice réunit 170 petites et moyennes entreprises et il faudra « sauver le peu qui reste ». Ce secteur, a-t-il dit, créé de l’emploi et a un marché. À travers les connaissances appropriées et l’utilisation d’équipements de dernier cri, le produit fini doit être de qualité pour que Maurice concurrence les autres pays qui exportent les produits en cuir. « Le secteur du cuir a un grand avenir. Il faut qu’on persévère. Notre but est d’établir l’industrie du cuir parmi les dix premiers sous-secteurs les plus compétitifs et viser l’export d’ici 2025 », a-t-il fait ressortir.

Le Chief Executive Officer (CEO) de SME Mauritius, Ravin Rampersad, concède que le secteur du cuir à Maurice a été laissé à l’abandon. À cause de cette situation, l’ouverture de cet atelier, a-t-il dit, est de relancer le secteur du cuir à Maurice. Et à travers cet atelier, ce secteur qui s’effrite davantage pourra être restauré. Il a soutenu que le secteur du cuir est « noble » et que les produits le sont aussi. « Nous voulons ajouter plus de valeur locale, créer des emplois soutenables et améliorer la richesse pour ceux qui y sont engagés et apporter le progrès social pour eux », a-t-il dit. Afin de pouvoir développer le secteur du cuir à Maurice, il a fait ressortir qu’un plan stratégique sur cette industrie a été élaboré avec l’African Leather and Leather Products Institute.

Concernant les mesures prises par SME Mauritius pour remettre le secteur du cuir sur les rails, il a dit que l’institution a aidé dans la création d’une association pour ceux qui sont dans le domaine. Du soutien a aussi été apporté à 125 entrepreneurs qui sont impliqués dans le cuir ou ceux qui veulent s’y orienter. « En créant cette base, nous avons l’échelle nécessaire pour réaliser quelque chose dans le temps », a-t-il déclaré. Ainsi, des « petits ouvriers » du secteur seront formés. Grâce à plus de compétences dans le secteur, il espère que l’industrie du cuir sera relancée dans le pays. Il y a, a-t-il ajouté, des machines « assez sophistiquées » pour permettre aux entrepreneurs d’être formés et qu’ils améliorent leur efficience et la qualité de leurs produits « pour assurer leur avenir ».

Dans les mois à venir, des « formations soutenues » seront offertes pour que les entrepreneurs puissent améliorer leurs compétences. Les cours dureront 12 semaines. Les matières premières doivent être apportées par la personne qui veut être formée. L’atelier est destiné à l’initiation, la démonstration et le développement de connaissances.

La responsable du Leather Studio, Pushpanjali Luchoo, qui était auparavant l’Officer in Charge du Fashion and Design Institute, est intervenue pour dire que cet atelier vise à promouvoir les entrepreneurs. Elle a fait ressortir que le secteur du cuir a été une préoccupation majeure s’agissant de son développement systématique et sa durabilité. Lors de cette inauguration, une vingtaine de personnes ont reçu leur certificat de formation. Elles étaient plus d’une centaine à avoir suivi ce cours.

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Catherine Malépa (directrice de Franc & Son) : « Il faut mettre plus d’accent sur les entrepreneurs locaux »

Formée par SME Mauritius sur le cuir, Catherine Malépa, directrice de Franc & Son souligne que la période du Covid-19 lui a été « très bénéfique ». Fabriquant des produits pour le marché local et réunionnais, elle vise désormais l’Australie ou l’Europe. Et pour être toujours dans la course, elle continue à faire preuve d’innovation.

Vos activités ont-elles été affectées avec le Covid-19 ?
Le Covid-19 m’a été très bénéfique. Beaucoup plus de gens se sont tournés vers le cuir local. Nous avons une grande demande sur le marché pour les produits en cuir qui viennent de l’étranger. Mais depuis que les frais portuaires ont augmenté, les gens se sont tournés vers les produits locaux. Cela a beaucoup aidé pour que je sois un peu plus sur le marché. C’est très positif. Et depuis le deuxième confinement, je n’ai fait que travailler avec le cuir.

Quels sont les produits les plus demandés en ce moment ?
Des sacs à main, ceintures, armatures de sécurité, des sacs à dos, des porte-lunettes pour les opticiens car ils n’arrivent pas à importer des pochettes de l’étranger. Tout est fait sur mesure et les pièces sont uniques. J’invente constamment car tous les produits sont uniques. Pour répondre au goût du client, je fabrique de nouveaux produits. Je suis toujours en train de relever les défis que le client me donne. Je suis dans le métier depuis mon enfance.

Vous exportez vers quels pays ?
Nous avons des représentants à La Réunion. Notre vision est d’exporter vers l’Europe ou l’Australie.

Croyez-vous que les Mauriciens sont intéressés par l’achat de produits en cuir locaux ?
Les Mauriciens ont donné de la chance aux produits locaux. Auparavant, la situation n’était pas la même car nous avions des produits importés qui étaient vendus. Mais avec le Covid-19, nous avons été favorisés et cela est positif. À travers plus d’ateliers de travail et de formation, beaucoup plus de produits pourront être confectionnés.

Nous observons que plusieurs produits en cuir venant de l’étranger sont vendus à Maurice. Comment arrivez-vous à garder votre part de marché face à cette concurrence ?
J’ai été affectée par les produits importés tout au long de la mise en place de mon entreprise. Cela date depuis plus de 40 ans. Je suis la seule ayant pris la relève du cuir de notre entreprise familiale. Le cuir est une matière difficile à avoir. Malgré cette difficulté, j’ai persévéré et j’ai créé ma propre identité à travers le temps. Le cuir mauricien est plus robuste et durable mais demande beaucoup plus de processus pour être raffiné. Mes clients reviennent vers moi car le cuir mauricien est d’une durabilité extrême et créé un lien avec la personne.

Nous observons toutefois que le “look” des produits en cuir locaux n’est pas le même que ceux de l’étranger. Êtes-vous du même avis ?
C’est vrai. Mais on ne peut pas définir un produit qui est fabriqué à la main par rapport à un produit conçu à grande échelle. Ce n’est pas la même chose. Avec le temps, j’ai dû faire comprendre à ma clientèle que le résultat ne sera jamais pareil car le cuir change. La finition demande plus de temps car le cuir mauricien est robuste et nous devons le travailler davantage. J’apporte toujours ce plus pour avoir une belle définition. Mais définitivement, cela ne sera pas pareil. Ce sera unique en son genre.

Pensez-vous que nous devons davantage vulgariser le savoir-faire mauricien dans cette industrie ?
À travers les foires organisées auparavant, j’ai pu comprendre qu’il y a des gens qui ne savent pas s’il y a des fournisseurs locaux. Je pense qu’il faut mettre plus d’accent sur les entrepreneurs locaux pour favoriser leurs produits.

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