EXAMENS DE CAMBRIDGE—HINDI: Un Mauricien premier au monde…

Depuis la maternelle et ce, jusqu’en Form IV, la ‘bedka’ a toujours rythmé les après-midi de Keshav Porahoo. Comme une discipline de vie. Ce n’est pas avec les petits de son âge que le jeune garçon passait son temps après les heures de classe. Mais, plutôt à l’école d’hindi du quartier, au ‘mandir’ de l’Escalier. Après plusieurs années d’apprentissage, de pratique et de rigueur, les efforts couplés à la passion pour la langue de ses ancêtres, ont porté leurs fruits ! Notre compatriote mauricien s’est illustré au niveau mondial ! À l’issue des examens du HSC (Cambridge) de 2015, il a scoré le « highest mark in the world » en hindi. Le 20 juin dernier, il a reçu son trophée à l’Université de Maurice, en présence de Jane Henry, représentante de l’Université de Cambridge. Portrait.
Depuis tout petit, Keshav mène une vie bien rangée. Très appliqué dans ses études, cela ne l’empêche toutefois pas d’être bavard en classe, surtout quand il a terminé ses devoirs. Ce qui pousse parfois ses profs à se plaindre auprès de ses parents. C’est qu’il est curieux de nature. « Je parlais beaucoup à mes amis. Je voulais obtenir des renseignements. J’aime entretenir la conversation avec les gens. Même avec mes profs, je parlais beaucoup. D’où d’ailleurs mes nombreuses participations aux débats et autres interventions au collège ».
À l’école primaire et au collège, Keshav Porahoo est presque toujours le premier de sa classe en hindi. Avec 6A+ au CPE, alors qu’il aurait pu se faire admettre au collège Royal de Curepipe, c’est le Sookdeo Bissondoyal State College de Rose-Belle que fréquentera l’habitant de L’Escalier jusqu’en Form V à cause de la distance de son domicile. « Après la Form V, toutefois, comme il n’y avait pas cette atmosphère de compétition là où j’étais, j’ai décidé d’aller au MGI. C’est une des plus belles institutions scolaires et l’atmosphère était formidable ».
Qui avait dit que ceux qui sont doués pour les langues le sont moins en maths ? Cette dernière matière est la préférée de Keshav à côté de l’hindi. D’ailleurs, comme matières principales, il avait opté pour les maths, la physique et la chimie et l’hindi et le GP comme sujets subsidiaires. « J’ai eu de très bons résultats en GP également et je lis beaucoup de magazines et des livres en hindi ».
Qu’est-ce qui l’attire tant dans la langue hindi ? « Pour moi, cette langue est profondément ancrée dans ma culture. Aussi loin que remontent mes souvenirs d’enfance, je vois mes parents se rendre au ‘mandir’ du quartier où j’y allais aussi pour faire des prières. Et, c’est là que se déroulaient les classes d’hindi. Il y avait une centaine d’élèves de différentes classes avec différents profs. C’est le Hindi Pracharini Sabha qui gère cette école. Les manuels et les questionnaires d’examens proviennent de l’Inde et sont corrigés en Inde. C’est à travers cette école que j’ai pris part à l’Uttama 3, l’équivalent du ‘diploma’ en hindi. J’ai été classé premier à l’issue de ces examens aussi. La remise des prix se fera en août ». Keshav Porahoo a par ailleurs pris part aux examens de ‘bhojpuri’ et de sanskrit en Form V d’où il a reçu le meilleur classement.
À partir de Form IV, toutefois, l’adolescent met un terme aux classes d’hindi les après-midi à L’Escalier. « J’avais d’autres leçons, j’ai dû abandonner. Mais, j’ai continué à apprendre par moi-même à la maison. J’achetais des manuels et après mes leçons de maths à Rose-Belle, je me rendais au Gébert Saraswati Sangh non loin où l’on dispensait des leçons d’hindi ». Keshav Porahoo se réjouit de parler aujourd’hui l’anglais, le français, le bhojpuri, le sanskrit, et un peu de punjabi. « La langue orientale n’est pas aussi facile qu’on le croit. Peu d’élèves parviennent à bien faire à l’écrit, même l’alphabet. Personnellement, j’ai toujours nourri le rêve d’aller étudier en Inde pour un deuxième diplôme (Master). Ainsi, l’hindi sera un plus pour moi ». Sa performance au niveau mondial lui a valu une bourse d’études en Inde. Mais, c’est à l’Université de Maurice que le jeune homme de 19 ans compte dans un premier temps entreprendre ses études en ingénierie. « Même avec la bourse, il y a les frais de logement. Je préfère garder la bourse pour ma maîtrise ».
Quel métier envisage-t-il d’embrasser à l’avenir ? « Soit ingénieur soit prof. Si je devenais prof, je serais prof de maths et chargé de cours en hindi. Avec le diplôme d’hindi que j’ai déjà, il me faudrait un an et demi seulement pour avoir une maîtrise en hindi. Mais, mon rêve est d’être ingénieur ».
Keshav Porahoo n’oublie pas les jours difficiles pendant ses années au collège. « Je prenais des leçons tous les jours. Le trajet entre Moka et L’Escalier était difficile pour moi. Je rentrais chez moi vers 19h. Je prenais une douche, faisais une sieste avant de reprendre le travail jusqu’à fort tard dans la nuit. J’étais souvent stressé, ce qui était mon point faible. Je me levais à 5h pour attraper le bus de 6h pour me rendre au collège. Pendant la période des examens, je me levais à 4h pour les révisions ». Il exprime aujourd’hui sa gratitude envers ses grands-parents, sa tante et son oncle qui l’ont aidé financièrement pendant sa scolarité de même que ses parents qui « ont travaillé dur pour me soutenir dans mes études. Mon père, qui travaille à ENL, restait jusqu’à fort tard pour corriger mes devoirs au CPE ».
Au sujet des langues orientales, Keshav dira encore : « ces langues nous ont été léguées par nos grands-parents qui ont emmené de leurs terres natales des livres dans leurs langues ». Il est d’avis que la culture éloigne les jeunes des fléaux sociaux. « Nombre de jeunes sont dans la drogue. S’ils avaient une activité culturelle, s’ils se rendaient au ‘mandir’ depuis tout petit, peut-être auraient-ils appris la discipline. Par manque de valeurs culturelles, les jeunes ne respectent pas leurs parents, les profs et s’adonnent à des crimes. D’autre part, si des étrangers sont émerveillés par nos cultures, si on les voit prendre des photos de nos lieux de culte, pourquoi ne nous en émerveillerions-nous pas ? ».
Keshav se passionne aussi pour les pièces de théâtre en hindi. « J’ai reçu le ‘Most Promising Young Actor Award en Lower VI du National Drama Festival ».
Le jeune homme vient de terminer un stage de quelques mois dans une compagnie d’import et d’export. Il attend maintenant de franchir une autre étape de sa vie : entamer ses études universitaires en août prochain.

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