Fait du jour du Question Time : le virus du Covid-19 relégué au profit de l’éducation

  • Xavier-Luc Duval croise le fer avec la VPM Dookun-Luchoomun sur le Grant aux collèges privés

Pour la tranche du Question Time d’hier à l’Assemblée nationale, le dossier de la pandémie de Covid-19 a été relégué au second plan. Toutefois, celui-ci devait être repêché lors de la séance nocturne avec le Statement du Deputy Prime Minister et ministre du Tourisme, Steven Obeegadoo, au sujet de la décision de Paris (voir texte plus loin. Par choix de l’opposition, Xavier-Luc Duval a préféré accorder priorité à une Private Notice Question (PNQ) ‘Somey Kase’ sur des directives en date du 15 octobre dernier de la Private Secondary Education Authority au sujet du Grant accordé aux collèges privés. Pendant au moins une demi-heure, il a croisé le fer avec la vice-Première ministre et ministre de l’Education Leela Devi Dookun-Luchoomun, chacune des parties campant sur ses positions et cette dernière repoussant des accusations de vouloir serrer la vis aux collèges privés.

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D’autre part, le Premier ministre et Leader of the House, Pravind Jugnauth, a exploité une lacune majeure du député travailliste Eshan Juman dans la formulation de son interpellation au sujet des incidents au Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport du dernier vol commercial d’Air Mauritius venant de Johannesburg le samedi 27 novembre dernier pour éviter d’ouvrir ce chapitre avec la fermeture des frontières en raison de la propagation du variant Omicron. D’autre part, peu avant minuit, les travaux ont été ajournés à vendredi avec l’adoption de l’Offshore Petroleum Bill et du Recreation Council Bill.

Xavier-Luc Duval s’est intéressé à la correspondance datée du 15 octobre 2021 adressée par la PSEA aux managers d’établissements secondaires privés subventionnés. Il voulait savoir la réaction de la vice-Première ministre. Il s’est également appuyé sur un communiqué subséquent en date du 29 octobre du Service diocésain de l’Éducation catholique (SeDEC) et de la conférence de presse de la Fédération des managers des collèges privés en date du 8 novembre.

Cette circulaire porte sur les estimations des revenus et dépenses pour l’année financière 2022. Leela Devi Dookun-Luchoomun a ajouté que ce document avait pour but d’attirer l’attention des directeurs sur certains règlements concernant le PSEA, stipulant que les managers doivent, trois mois avant le début de chaque année financière, soumettre aux autorités une estimation des revenus et dépenses pour l’année financière suivante.

De plus, des subsides provisoires devaient être payés « at such time and at such instalment as the authority may determine ». Poursuivant, elle fait comprendre que « les directeurs de collège ont été informés que les déboursements des subsides devaient être effectués partiellement en avance et qu’ils devraient soumettre les documents appropriés pour justifier leurs dépenses à la fin de chaque trimestre avant d’obtenir les financements nécessaires pour le trimestre suivant ». Les collèges devront également attendre l’approbation de la PSEA avant de s’engager dans tout nouveau projet, en particulier ce qui ne concerne pas les dépenses courantes.

Leela Devi Dookun-Luchoomun a également expliqué que les estimations des dépenses ne devraient pas dépasser le montant du subside prévu et la compensation pour l’utilisation des établissements scolaires, et que les managers devront éviter de s’approvisionner en équipement de commerces appartenant à leurs proches ou dans des compagnies dans lesquelles ils sont actionnaires. Et ce, afin d’éviter tout conflit d’intérêts.

La ministre de tutelle a également affirmé avoir pris connaissance du communiqué du SEDEC, qui déplore l’ingérence de la PSEA dans la gestion des écoles et que les subsides seront réduits. De plus, les auteurs du communiqué déplorent aussi les conditions imposées concernant le recrutement du personnel et l’allocation des périodes. Le fait que les collèges d’État recrutent les élèves à partir du Grade 10 a également eu un impact sur le poste de directeur adjoint et des éducateurs.

Leela Devi Dookun-Luchoomun s’est appesanti sur le fait que tous les nouveaux projets mis en œuvre par les collèges confessionnels et les collèges privés financés à partir des fonds publics doivent être approuvés par les autorités responsables « dans l’esprit de la bonne gouvernance et de la redevabilité ». Elle indique que le bureau de l’Audit a souhaité un meilleur contrôle des dépenses et du déboursement des subsides, prenant en compte les montants qui sont impliqués. Elle a aussi fait allusion à des recommandations de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC) au sujet d’un contrôle rigoureux des dépenses.

La ministre affirme que, « contrairement à ce qu’a écrit le SEDEC, les subsides n’ont pas été réduits ». Une avance de trois mois est payée à chaque collège privé sur la base de l’allocation qu’ils ont obtenue durant la même période l’année précédente, explique-t-elle ainsi. Toutefois, s’ils ne peuvent dépenser tout le montant alloué, « la différence est transférée sur le compte du trimestre suivant, à leur demande ».

Elle note également que les collèges privés ne sont pas en mesure de dépenser les fonds mis à leur disposition. « Alors que le système précédent prévoyait que le collège en question pouvait empocher tout le montant mis à sa disposition, la nouvelle formule anticipe que la balance non dépensée doit être transférée au trimestre suivant  », ajoute-t-elle.

Concernant l’aide alimentaire aux enfants dans le besoin, elle estime que cela ne tombe pas sous la responsabilité de la PSEA. « La formule de subsides prévoit une série de dépenses », dit-elle. Dans le passé, poursuit-elle, « des réclamations déraisonnables et injustifiées ont été effectuées ». Malgré cela, la PSEA « a continué à allouer des allocations pour deux mois ».

Au chapitre du personnel enseignant et des matières enseignées, elle déclare que « tout le monde doit adhérer à un National Curriculum dans la mesure où ces institutions font partie du système d’éducation nationale ». Elle poursuit : « Personne ne peut prétendre opérer comme une “island of its own in this country” ! »

Quant au time-table, la PSEA  propose des guides pour faciliter la mise en œuvre des programmes, dit-elle. « Mais chaque institution dispose d’une autonomie en fonction de sa spécificité. »

Poursuivant ses explications, la ministre a reconnu qu’il y a une réduction du nombre d’élèves, prenant en considération la situation démographique. « C’est vrai aussi pour les collèges d’État », dit-elle. La ministre a finalement donné l’assurance qu’il n’y a « jamais eu, et il n’y aura jamais, aucune atteinte de la PSEA ou du ministère aux droits constitutionnels des associations confessionnelles d’établir des écoles ou aux parents de mettre leurs enfants dans les institutions de leur choix ».

Elle ajoute que « le partenariat entre l’État et les collèges privés est vivant » rappelant que  « les représentants des collèges ont toujours été accueillis à son bureau »

Le leader de l’opposition a fait ressortir lors de sa première interpellation supplémentaire que plusieurs milliers d’élèves fréquentent les collèges privés, se disant ainsi surpris par les propos tenus par les managers des collèges privés, qui affirment subir « une humiliation pour mendier des sous, qu’on nous donne à contrecœur ».

Et ce pendant que le SEDEC, lui, parle de « menace sur les collèges privés et catholiques ». Mais alors que le leader de l’opposition parlait d’une lettre adressée au Premier ministre, le Speaker est intervenu lui demandant de formuler sa question. Xavier-Luc Duval voulait savoir si la ministre avait rencontré ces managers.

Cette dernière a affirmé que sa « porte est ouverte » à la fédération des managers et au SeDEC, tout en disant son étonnement du ton du communiqué diffusé par ce dernier. Elle a déposé sur la table l’Assemblée nationale la liste des montants de l’aide allouée à ces collèges entre 2011 à 2019. Elle estime ainsi que le montant alloué représente, aujourd’hui, « le triple de ce qu’ils avaient obtenu à cette époque ».

Elle a aussi récusé les critiques concernant la tentative de mainmise sur les collèges, estimant que la PSEA ne fait que faire son travail ». Une réponse qui a alors donné lieu à de vifs échanges entre la VPM et le leader de l’opposition, qui considère n’avoir pas obtenu la réponse qu’il recherchait.

Il a ainsi reproché à la PSEA et la ministre de « mettre les 60 collèges (profit-making) avec les 25 collèges confessionnels de toutes les communautés ».

Il a de fait voulu savoir « quel collège est en train de mentir », faisant référence aux propos de Leela Devi Dookun-Luchoomun. Avec pour effet de provoquer une vive réaction du Speaker, qui a demandé de retirer le terme « mentir ». La ministre a maintenu : « Je n’ai jamais dit mentir. » Ce à quoi Xavier-Luc Duval a rétorqué : « When you says that something is not true, what does that mean ? » Avant de retirer à son tour le terme « lying ».

La ministre a fait comprendre qu’elle est la ministre de l’Éducation au niveau national, ajoutant avoir relevé qu’un collège qui accueille 255 élèves, et qui dispose déjà d’un terrain de football, veut en avoir un second. Elle est revenue sur l’utilisation des fonds de manière éthique, avant de citer des cas où certains collèges faisaient des demandes de financement injustifiées.

Pour elle, « il n’y a rien de mal que la PSEA leur demande des comptes concernant leurs dépenses ». Elle a ensuite affirmé qu’elle est elle-même issue de collèges privés et qu’elle a travaillé dans un collège confessionnel pendant 25 ans, ajoutant que « personne ne peut (lui) donner de leçons » concernant ce qui se passe dans ces collèges.

« This is a horrible mess », devait alors lancer le leader de l’opposition concernant ce qu’il estime être « une réduction des subventions, car l’argent non utilisé pendant un trimestre est transféré sur le trimestre suivant, ce qui de facto réduit le montant prévu pour le trimestre concerné ».

Le leader de l’opposition a ensuite évoqué le cas des collèges percevant une allocation de dédommagement inférieure à la valeur de leurs biens immobiliers, alors que ces biens ont été évalués en 2014. Par conséquent, dit-il, les collèges privés n’ont pas de retour sur investissement. Mais la ministre a indiqué que la dernière évaluation a été bouclée le 30 novembre.

En outre, elle estime qu’en dehors de la location payée aux managers, tous les autres frais, « y compris le salaire des enseignants, sont payés par le gouvernement ». Par conséquent, dit-elle, « personne ne peut se plaindre de ne pas avoir de retour sur investissement ».

Finalement, les discussions ont porté sur la survie des collèges privés. La ministre de l’Education concède que « même les collèges d’Etat connaissent une réduction du nombre d’élèves, mais les parents restent libres de choisir l’institution de leur choix pour leurs enfants ».

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