Dernie dialog avek Dev Virahsawmy (suite et fin)

Nous proposons aujourd’hui la deuxième et dernière partie de Dernie conversation avek Dev Virahsawmy. Comme dans la première partie de cette conversation à bâtons rompus, enregistrée le 6 octobre 2023, l’auteur de Li revient sur les sujets et les moments qui ont marqué son existence professionnelle et personnelle. Dev Virahsawmy s’est, en fait, livré à un bilan personnel, et forcément subjectif, de sa vie passionnante et passionnée que nous vous invitons à découvrir.

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Revenons une fois encore en arrière, à un autre moment important de ton cheminement artisique : la comédie musicale avec Zozef ek so palto larkensiel…

— La vie est vraiment extraordinaire ! Au cours de mon parcours, j’avais passé quelque temps à l’école St Enfant Jésus à Rose-Hill, où Gérard Sullivan était dans ma classe. Mais nous n’étions pas copains à l’époque. Des années plus tard, je le rencontre dans les couloirs de la MBC et il me demande si cela m’intéresserait de traduire en kreol une comédie musicale anglaise. Un rock opera d’Andrew Loyd Webber, spécialiste du genre. Je lui ai répondu de m’envoyer tout le matériel et que j’allais essayer. Une profonde amitié s’est développée entre Gérard et moi pendant cette traduction qui, une fois montée en spectacle, a permis aux Mauriciens de découvrir leur propre culture avec fierté. Ils ont découvert les richesses et les subtilités de la langue kreol, et Zozef a aidé à une transformation des mentalités sur cette langue. Gérard et moi avons continué notre collaboration avec, notamment, la version en kreol de l’opéra rock Les Misérables qui a valu une volée de bois vert à Gérard, qui osait monter Victor Hugo en kreol ! Les Eurocréoles, comme je les appelle, ont failli s’étouffer d’indignation, mais la comédie a connu un grand succès.

Peut-on dire que Zozef ek so palto larkesiel est aussi important dans ton cheminement artistique que Li ?

— Oui, mais à des niveaux différents. À part mes comédies satiriques, mon théâtre vise l’intellect. Une comédie musicale touche toutes les sensibilités de l’être humain. Avant Zozef, on était habitués à ce que le kreol ne s’exprime que par le séga. Zozef a démontré que le kreol pouvait être chanté sur des airs de rock n roll, de cha-cha-cha, de boogie-woogie. Cette comédie musicale a démontré que le kreol pouvait être utilisé, comme toutes les autres langues, dans tous les genres de la musique. C’est grâce à Zozef ek so palto larkensiel que les Mauriciens ont pris conscience de la puissance et de la beauté de leur langue nationale.

Une langue dont la reconnaissance a donné lieu à des affrontements linguistiques et politiques pendant des années. Pourquoi est-ce qu’il y a eu autant de réticence, pour ne pas dire de résistance, au kreol ?

— Pendant très longtemps, on a considéré que le kreol n’était qu’une déformation du français, que si l’on parlait le kreol on ne pouvait pas apprendre et bien parler le français et l’anglais. La résistance était tellement forte que le développement du kreol a été ralenti. Mais au fur et à mesure, on a compris la force de cette langue dans plusieurs domaines, par exemple dans la publicité et même dans la religion, où les langues sacrées traditionnelles — le sanscrit, l’arabe, le latin — ne sont pas comprises du grand public, alors que le kreol l’est de tous. Un jour, l’Évêque de Port-Louis m’a fait demander de traduire la liturgie catholique en kreol.

C’est pendant ce travail de traducteur que tu as découvert Jésus-Christ ?

— Non, je le connaissais déjà… je me suis plongé dans l’Ancien et le Nouveau Testaments pour comprendre afin de bien traduire et j’ai fini par traduire tout le texte. Après avoir terminé la traduction, j’ai rencontré Monseigneur Margéot, que j’appelais Ton Jean, et lui ait dit : « Vous vous rendez compte que vous avez demandé à un malbar, athée, marxiste-léniniste de traduire la liturgie catholique en kreol ?! » L’Évêque m’a répondu : « Celui qui a écrit Lasours ne peut pas être un athée. » J’avais écrit cette chanson en pensant au communisme, Jean Margéot l’avait lu en utilisant ses paramètres de catholique. C’est ça la beauté de la littérature : il y plusieurs niveaux de ressenti et d’interprétation pour un même texte. Après la remarque de Jean Margéot, je me suis dit « Seigneur, j’étais croyant sans le savoir ! » et j’ai commencé à me poser des questions qui m’ont permis de découvrir que je n’étais pas un athée, mais un anticléricalisme. Et après, j’ai découvert qu’on pouvait être marxiste et croyant. Comme notre Pape François.

Tu as dit « notre » Pape ?!

— Mais oui. C’est une personnalité que je respecte. Il est un marxiste qui croit, comme moi, que Jésus était un freedom fighter. On peut être marxiste et chrétien en même temps, parce que le marxisme est une science, alors que le léninisme est une idéologie.

Il me semble t’avoir entendu et t’avoir lu faire le procès des religions et de la foi qui est, selon la fameuse formule de Karl Marx, l’opium du peuple…

— À l’époque, j’étais un peu butor… tu sais, quand tu es engagé dans un combat 24 heures sur 24 et que l’on t’attaque de tous les côtés, surtout sur des détails, parfois on réagit à gauche et à droite, au même niveau des arguments que l’on t’oppose. Il faut réagir et répondre.

Revenons à la politique, à la cassure avec Paul Bérenger et à cette brouille qui dure depuis des années…

—… Paul était une bête politique et un politicien pragmatique. Moi, je suis un artiste idéaliste et rêveur. Nous avons commencé un mouvement où nos deux tempéraments et nos deux objectifs pouvaient cohabiter. Nous avons travaillé ensemble et fait de belles choses. Les deux principales clauses du premier manifeste du MMM de 1970 étaient la sécurité et l’autosuffisance alimentaire et, deuxièmement, l’importance de la langue kreol. Je dois reconnaître que sur le niveau organisationnel, sur l’activisme, Paul était extrêmement fort et nous avons travaillé ensemble en faisant une bonne paire. Puis, les divergences ont surgi, notamment sur le communalisme, et Paul a commencé à croire qu’il fallait l’utiliser pour arriver au pouvoir. Au niveau politique, il avait un peu raison, mais ça je ne pouvais l’accepter. En 1970, nous sommes entrés dans la campagne électorale de Pamplemousses/Triolet sans savoir comment l’organiser, en ignorant les réalités que nous allions découvrir sur le terrain, au fur et à mesure. Dont le fait qu’à l’époque, dans les régions rurales, on parlait bhojpuri à plus de 60%, ce qu’aucun de nous ne savait faire. Nous avions de grandes théories, de belles idées, un candidat qui parlait bien – même si on ne comprenait pas ce qu’il disait –, et surtout la conviction des jeunes, et nous avons gagné. Pas en raison de nos arguments ou de mes compétences, mais parce que l’électorat voulait donner une correction à Ramgoolam et à Duval pour leur trahison de 1969. Paul a analysé ma victoire comme un premier pas, une possibilité de remporter les prochaines élections. Je ne partageais pas cet avis parce que je savais que j’avais été élu parce que l’électorat avait voté contre Ramgoolam, mais pas pour le MMM. J’ai rapidement réalisé que Paul et moi nou pa pou kapav kontinie lasas ansam…

Et vous vous êtes séparés dans le bruit, la fureur, les insultes et les dénonciations…

— Nous n’avons pas su nous séparer. Notre séparation a cassé le parti en deux et divisé les militants. Nous nous sommes l’un et l’autre déchirés et détripés. Mais malgré cela, malgré tout ce que nous avons pu dire l’un contre l’autre, j’ai toujours gardé une place dans mon cœur pour Paul, pour cette amitié intense que nous avions partagée. Et puis, beaucoup plus tard, récemment même, les hasards de la vie ont fait que j’ai découvert que ma fille, Anuska, était copine avec Joanna, la fille de Paul. Et quand j’ai appris que j’avais un cancer et que je n’avais pas longtemps à aller, j’ai demandé à Anuska de dire à Joanna d’informer son père que j’étais gravement malade et que j’avais envie de le voir. Le message a été transmis et, il y a quelques jours, Paul est venu me voir.

Après combien d’années de brouille, pour ne pas dire d’antagonisme déclaré ?

— Presque 50 ans. Dire que jusqu’à tout récemment, j’appelais encore Paul kolom lapropriete ! Quand je l’ai vu, je lui ai dit que quand je l’ai connu, j’étais complexé à cause de mon handicap et que, consciemment ou inconsciemment, il m’a aidé à sortir de ma timidité et de mes complexes en me donnant des responsabilités qui m’ont obligé à faire face à la vie, et je l’ai remercié pour ça. J’ai dit à Paul que je reconnaissais ma part de responsabilité dans notre séparation et ce qui a suivi. Mais tu sais… il est tellement facile d’être wise after the event…

Tu lui as demandé pardon pour tout ce que tu as pu dire sur lui pendant ces 50 ans ?

— Oui, je l’ai fait.

Et il t’a demandé pardon, lui ?

— Non! Paul ne demande pas pardon, lui. Mais il pardonne.
O Est-ce que c’est la proximité de la mort qui t’a fait prendre l’initiative de demander à le rencontrer ?

— Oui, parce que je ne veux pas mourir avec de l’aigreur sur l’estomac. Il était important pour moi de faire cette démarche et je me sens heureux de l’avoir faite. C’est vrai que ma maladie m’oblige à réfléchir sur un certain nombre de choses, à revoir ma vie, à faire le bilan des réussites, mais aussi des manquements, des erreurs.

De ton point de vue, quelle aura été la plus grande erreur de ton existence ?

— Je ne pense pas qu’on puisse parler de grande erreur, mais j’ai fait beaucoup de petites erreurs. Surtout parce que j’arrivais sans balises, sans repères, sans recettes, sans références sur de nouveaux terrains.

On reste sur la politique. Comment et pourquoi, après avoir quitté la politique et dissous le MMMSP, tu t’es retrouvé allié à Anerood Jugnauth contre Paul Bérenger en 1983 ?

— Effectivement, j’avais quitté le MMM et créé le MMMSP avant de le dissoudre. Un soir de 1982, je suis devant la télévision qui diffuse une conférence de presse et je vois Paul Bérenger, ministre des Finances, arracher le micro d’Anerood Jugnauth pour faire une déclaration. J’ai été enragé par l’arrogance de Paul et je me suis dit que le gouvernement MSM-PSM n’allait pas tenir longtemps. Effectivement, la cassure est survenue quelques mois après…

Une cassure qui allait, une fois encore, diviser le pays en deux blocs…

— Les gens étaient dépassés, perdus et ne savaient qui soutenir. Moi j’ai pris position parce, de mon point de vue, Paul méritait une leçon. Je suis allé au premier meeting du nouveau parti MSM à Vacoas, ma photo a été publiée dans la presse et les militants du MMM m’ont qualifié de traître. J’avais déjà rencontré Anerood pour lui dire que j’allais lui donner un coup de main parce que Bérenger venait de lui faire ce qu’il m’avait fait, ce qu’il a toujours fait : dès que quelqu’un lève la tête, fait preuve d’indépendance ou affirme un avis contraire, il la lui coupe sa tête…

Sans vouloir défendre Bérenger, est-ce que tous les leaders politiques mauriciens d’hier et d’aujourd’hui ne font pas la même chose ?

— Il y a des leaders qui savent s’accommoder, s’adapter, d’autres non. Paul en fait partie. J’ai rejoint le camp de Jugnauth, aidé à organiser sa campagne et j’ai utilisé toutes mes compétences intellectuelles et oratoires pour qu’il remporte la victoire.

Tu n’as pas été, disons, gêné et mal à l’aise de te retrouver avec tes anciens adversaires : le PMSD, le PTr, Boodhoo, des anciens du MMM… ?

— Non, ça ne m’a pas gêné, parce qu’entre-temps, j’avais commencé à développer des relations d’amitié avec certains d’entre eux. Nous pouvions ne pas être d’accord au niveau idéologique, mais cela n’empêchait pas des liens d’amitié. Bien sûr, j’ai été insulté, traité de vander lalit et le mot traître a même été peint sur le mur de ma cour par un député MMM de l’époque !

Cela valait-il la peine de faire ça ?

— Pour moi, oui. Je crois que le cheminement politique passe par ces étapes. Il y a des choses à faire pour atteindre un objectif défini, on le fait, c’est tout. J’avais dit à Anerood que j’allais l’aider, mais qu’il fallait qu’il comprenne le sens de mon combat pour la langue kreol, contre le communalisme et pour l’unité nationale. Il m’a dit oui et, dès sa réélection, il m’a nommé conseiller et m’a posté au ministère de l’Éducation où j’ai pu faire certaines choses pour atteindre mes objectifs. En commençant par sortir la célébration de la fête nationale du Champ de Mars pour l’amener à Vacoas dans le cadre d’une célébration culturelle, un festival qui a duré une semaine. En dépit d’un mauvais temps annoncé par la météo et des nuages noirs, il n’est pas tombé une seule goutte de pluie. Et le 12 mars au Gymkhana à midi, au moment de lever le quadricolore, on a pu apercevoir un arc-en-ciel dans le ciel. Le lendemain, L’Express a publié un compte-rendu sous le titre suivant : « Même l’arc-en-ciel y était. » Dieu avait écouté la prière de l’athée qui s’était converti.

Tu t’es converti ?

— Oui, et depuis bien longtemps. Depuis un bout de temps, j’avais commencé à remettre en question certaines de mes convictions. Je suis resté un marxiste, pour des raisons déjà expliquées, mais je ne suis pas un léniniste ou un stalinien. J’ai été un peu attiré par Mao à un moment, mais je ne suis pas devenu un maoïste. Pour en revenir à 1983, après la victoire électorale, je me suis fait des ennemis au sein du nouveau gouvernement. Le fait est que je suis devenu populaire et que mon combat pour la langue kreol a tellement progressé que cela gênait certains. Harish Boodhoo a monté une cabale en m’accusant de vouloir faire disparaître le bhojpuri. Il a créé le Mauritius Bhojpuri Institute avec sa femme comme directrice. Cela n’a pas empêché la progression du kreol, qui est aujourd’hui la langue de 90% des Mauriciens. Le chariot était là, il fallait un cocher pour le conduire, c’est ce que j’ai fait.

Restons dans la politique pour une autre polémique. Après les élections de 1983, on a beaucoup parlé de la bande des quatre, ou des cinq, dont tu faisais partie et qui était une espèce de structure où se décidaient les décisions que le gouvernement devait prendre par la suite…

— Peter Craig, Dan Callikan et moi-même avions formé un groupe de travail et de réflexion pour conseiller le gouvernement, et nous avions des contacts avec beaucoup de personnes, dont Premsingh, le haut-commissaire de l’Inde à Maurice. Nous avions aussi fait appel aux ambassadeurs de Grande-Bretagne et de France, dont j’étais proche, et sur qui on n’avait rien dit. Des gens ont choisi un angle d’attaque pour tenter de me détruire en essayant de faire croire que j’étais en train de monter une cabale contre je ne sais qui. Pour moi, tout cela a été fait en réaction à l’essor que la langue kreol commençait à prendre dans le pays et que personne ne pouvait arrêter.

Est-ce qu’on peut dire que le kreol est arrivé aujourd’hui au stade auquel tu rêvais en commençant des études de linguistique à Édimbourg ?

— Il y a encore des progrès à faire. Quand nous parlons du kreol, nous en parlons comme une matière scolaire. Or, il doit devenir un médium d’enseignement, ce qui n’est pas la même chose. Puisque nous parlons d’éducation, il est temps d’arrêter de vouloir enseigner les mathématiques — les pourcentages et les ratios entre autres — aux enfants de cinq ans. Ce qu’il faut leur enseigner au primaire, c’est l’arithmétique et l’éducation bilingues créole et anglais. C’est la seule façon de faire baisser le taux d’échec aux examens, un taux qui est nettement supérieur aux statistiques que l‘on donne, puisque ces statistiques sont faussées, pour ne pas dire inversées. J’ai fait imprimer un livre, un manuel, mon dernier, qui explique pourquoi le bilingual litteracy est l’avenir de l’éducation primaire à Maurice.

Les pédagogues et les experts qui décident au ministère de l’Éducation sont-ils en faveur de cette proposition ?

— J’ai déjà eu l’occasion de dire ce que je pensais d’eux ! J’ai dit à Monseigneur Durhône, le nouvel évêque catholique, qu’il fallait qu’on utilise l’Extended Programme du ministère de l’Éducation, qui est une catastrophe, à bon escient. Aujourd’hui, ce programme est réservé à ceux qui ont échoué aux examens de grade VI à qui on fait refaire, en quatre ans, le même programme qu’ils n’ont pas pu assimiler en six ans ! J’ai formé une équipe qui peut faire la formation des enseignants, et j’espère que le nouvel évêque va introduire ce programme dans les écoles catholiques et qu’après le ministère finira par l’adopter. C’est ainsi que l’on va faire les enfants de ceux que l’on n’entend pas, de ceux qui n’ont pas de place dans le train du développement, réussir leur éducation primaire. C’est en tout cas un de mes derniers souhaits.

Nous avons parlé de tes regrets. Passons maintenant à tes satisfactions. Quelles sont les grandes satisfactions de ton existence ?

— Ma plus grande satisfaction, c’est ma famille : ma femme, mes filles, mon gendre, mes petits-enfants. Je ne suis pas sûr que Loga et moi pourrons célébrer nos 60 ans de mariage, mais nous avons formé un couple qui, chacun de son côté – et très souvent, ensemble –, a travaillé pour essayer de faire changer les choses à Maurice. Ma plus grande satisfaction, c’est d’avoir construit avec Loga une famille heureuse et unie.

J’ai appris que Pravind Jugnauth est venu te rendre visite, hier ? Tu ressens le besoin de revoir des gens pour leur dire des choses ?

— Évidemment. Il me faut dire des choses, faire des demandes pour que le travail continue et aboutisse après mon départ. Il y a des combats que j’ai commencés et qu’il faut continuer.

Par exemple ?

— Celui de la légalisation du cannabis. Un fumeur de gandia est, par définition, une personne pacifique, souvent un artiste qui crée après avoir fumé. Par contre, un buveur de rhum ou d’alcool peut être violent et, malgré cela, la loi autorise la vente d’alcool et interdit celle du cannabis. Tous les rapports scientifiques disent que les drogues dangereuses dans le monde sont l’alcool et le tabac, mais pas le cannabis. Certes, c’est une drogue, mais ce n’est pas une drogue dangereuse, alors que l’alcool et le tabac sont en vente libre ! Il existe à Maurice un commerce florissant de cannabis importé dont les gros profits vont aux trafiquants. La légalisation du cannabis et l’autorisation d’en cultiver chez soi feront chuter les prix et diminuer le trafic de drogue à Maurice.

Tu as demandé à Pravind Jugnauth de venir te voir pour lui parler de la légalisation du cannabis ?!

— J’ai exposé mon point de vue sur ce sujet à tous ceux que j’ai eu l’occasion de voir, ces derniers jours. J’ai surtout demandé au Premier ministre de passer me voir pour l’informer que j’avais légué tous mes droits d’auteur au diocèse de Port-Louis. Au départ, mon intention était de léguer mes droits à Jésus-Christ, mais légalement, ce n’est pas possible, et il fallait donc que je les lègue au diocèse de Port-Louis, qui est le représentant de Jésus-Christ à Maurice.

Mais est-ce que, quelque part, ce n’est pas restreindre la diffusion de ton œuvre de léguer tes droits uniquement aux catholiques à travers leur Église ?

— Laisse-moi terminer mon explication. J’ai demandé à Pravind Jugnauth de faire son gouvernement racheter ces droits au diocèse de Port-Louis et de les mettre dans le domaine public, au lieu d’attendre 50 ans pour que ce soit fait. Je veux que mon œuvre puisse être utilisée et reprise par tous ceux qui le voudront. C’est une manière de permettre au grand public de découvrir la beauté de la langue kreol à travers mes écrits, de lui permettre de développer sa sensibilité à travers sa langue nationale.

Jusqu’à la fin, ton énergie aura été utilisée pour la promotion du kreol, qui aura été le combat de ta vie. Beaucoup plus que la politique ?

— Oui, parce que le kreol est un outil fondamental pour le développement du cerveau des enfants mauriciens. La politique aura été un passage, un moment donné, de mon cheminement, mais elle n’a pas été fondamentale comme la nécessité d’écrire, de participer à la création d’une culture nationale à travers sa langue.

Tu as le sentiment d’être parvenu à tes fins ?

— Disons que j’ai bien avancé sur le chemin qui mène à la source.

Que souhaites-tu dire pour terminer cette conversation ?

— J’aimerais dire que notre pays est dominé par deux choses : l’ignorance et les préjugés. Nous sommes ignorants, mais nous nous croyons intelligents. Nous sommes pour et contre certaines idées, sans trop savoir pourquoi. Les Mauriciens doivent combattre l’ignorance et les préjugés pour devenir des êtres humains dignes de ce nom.

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