INTERVIEW:  Je pense que les juges savent quoi faire, a déclaré Me Ben Seesaram

Me Ben Seesaram, président de la branche locale du Chartered Institute of Arbitrators, nous explique qu’il souhaite avoir des arbitres dans tous les corps de métiers pour résoudre les conflits au plus vite car ce n’est pas une formation réservée aux juristes. Selon lui le Code de Procédure civile doit être revu. Il n’a pas voulu faire de commentaire sur la question des juges dans l’arbitrage privé, en disant toutefois que « les juges savent quoi faire ».
Il y a souvent une confusion entre la médiation et l’arbitrage dans l’esprit du public… Quelle est la différence ?
Un médiateur est un compositeur à l’amiable selon le Code de procédure civile. Son travail est de réconcilier des parties. Il doit pour cela écouter les parties séparément et trouver des solutions au contentieux. Le médiateur n’impose pas de solution, ce sont les parties qui les trouvent. La médiation existe depuis longtemps. Le sage du village en était un par exemple.
Quant à l’arbitre, c’est lui qui trouve la solution qui convient dans les litiges en écoutant les deux parties. Avoir recours à l’arbitrage permet de ne pas aller en Cour. C’est une Alternative Dispute Resolution.
Vous êtes le chairman de la branche mauricienne du Chartered Institute of Arbitrators. Parlez-nous en…
L’institut existe depuis 1915. Avant, les Mauriciens devaient aller à Londres pour suivre la formation afin de devenir arbitre. Les cours sont accessibles à beaucoup plus de personnes maintenant que nous avons une branche locale. Nous avons en ce moment une quarantaine de personnes au Chartered Institute of Arbitrators. Les présidents de toutes les branches se réunissent tous les deux ans et nous élisons le président de l’organisation et notre prochaine rencontre est en novembre à Édimbourg. Nous sommes une organisation à but non lucratif
Qui peut devenir membre ?
Ce n’est pas simple de devenir membre parce qu’il y a des examens. Nous avons des branches dans plus de 90 pays avec plus de 16 000 membres. Ce n’est pas une association où on devient membre en payant une cotisation seulement… Nous formons des gens compétents qui seront sollicités pour être des arbitres afin de résoudre des litiges. La formation est ouverte à tous les professionnels de tous les secteurs.
Ce n’est donc pas réservé aux juristes ?
Par exemple s’il y a un problème dans le domaine de la construction, c’est mieux d’avoir un professionnel de ce corps de métier pour être arbitre. Donc être légiste n’est pas une obligation pour devenir arbitre mais il faut toutefois que celui-ci ait des notions en droit notamment dans la responsabilité civile (Tort Law). Il faut savoir comment écrire l’Award et il y a des procédures à suivre. C’est aussi plus facile de trouver des solutions car les travaux de construction ne peuvent pas s’arrêter pendant longtemps car cela occasionnerait des pertes. Voilà pourquoi les cours sont ouverts à tous les corps de métiers. Mais bon, un autre professionnel peut être arbitre mais il aura besoin d’assesseurs s’il n’a pas les compétences nécessaires. À un certain niveau de complexité il faut un expert.
Quel est l’intérêt d’avoir recours à l’arbitrage ?
L’arbitrage fait gagner du temps et coûte moins cher. Mais le plus important c’est que tout est privé donc l’affaire n’est pas étalée au public. Il y a aussi l’aspect de flexibilité car ce sont les parties qui décident quand l’affaire sera entendue. Mais si vous vous nouez avec un arbitre qui n’est pas souvent disponible, il est clair que cela prendra du temps…
Les compagnies mauriciennes ont accroché au concept ?
Oui. Le plus souvent c’est pour les litiges dans le bâtiment ou le transport maritime que les arbitres sont sollicités.
Les parties sont liées à la décision de l’arbitre, mais que se passe-t-il si l’une des deux parties ne veut pas respecter cette décision ?
Tout commence par la clause d’arbitrage. C’est à elles de décider dès le début si l’une des parties se réserve le droit de faire appel de la décision de l’arbitre au début même d’un contrat. Si elle décide dès le début de se réserver ce droit, ce n’est pas la peine, pour ainsi dire, d’avoir recours à l’arbitrage. L’arbitre ne peut pas exiger que sa décision soit respectée. Si celle-ci ne l’est pas, c’est à la cour d’agir. Ou alors une demande sera faite pour que la décision soit enforced par le judiciaire.
C’est le Code de procédure civile qui guide l’arbitre à Maurice. N’avons-nous pas besoin d’une loi propre à l’arbitrage ?
Nous avons cette loi mais elle doit être dépoussiérée. Il faut tout simplement la mettre à jour et l’adapter en vue de faire de Maurice un centre international d’arbitrage. Par exemple l’article 1030 de cette loi parle toujours d’« une amende, qui ne sera pas moindre de cinq francs et n’excédera pas cent francs ». Il faut mettre les choses dans leur contexte, nous sommes en 2012…
Le Bar Council travaille en ce moment sur des recommandations sur l’arbitrage privé pour les juges… Qu’en pensez-vous ?
Je ne souhaite pas parler de ce sujet. Le Bar Council y travaille déjà. Mais je pense que les juges savent ce qu’ils doivent faire ou pas…

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