Le Port-Louis (Ile Maurice) d’hier et d’aujourd’hui (LXXXIII) : Le Port-Louis qui fait honte!

Si Port-Louis pouvait attirer par une beauté bien à elle, cette Cité pouvait aussi repousser. «Lorsqu’on déambule dans certaines rues très fréquentées de Port-Louis, plus particulièrement celles qui jouxtent le front de mer, on est en droit de se demander si l’on ne nage allégrement en eaux troubles et usées. Surtout lorsqu’on voit les ruisseaux de la Cité, complètement insalubres et parfois nauséabonds, qui se sont transformés, depuis longtemps déjà, en dépotoirs ou en mini-forêt vierge. De la rue John Kennedy à La Chaussée, en passant par le Caudan, la Gare du Nord ou, plus loin au Sud, la rue Moka, c’est le même spectacle affligeant.»(1)

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Le nettoyage des ruisseaux en question

Le verdict de Monique Koenig de ‘Friends of the Environment’ est implacable. « C’est lamentable! Cela fait 150 ans qu’il n’y a aucune planification pour la restructuration des ruisseaux port-louisiens.»(Idem) La question de drainage fait débat. «S’ils remplissent tant bien que mal leur fonction première, c’est à dire le drainage des eaux, leur état est tout de même pitoyable. Pourtant, Port-Louis est une des rares villes à posséder un tel système de drainage des eaux, naturel ou artificiel, aménagé pour la première fois à l’époque de la Compagnie des Indes. Un patrimoine qui s’effrite…»

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Pourtant, la municipalité de Port-Louis ne comptait pas rester inactive face à cette catastrophe. «A la municipalité de Port-Louis, on est conscient du problème.

D’ailleurs, à partir de ce week-end, des équipes de nettoyage devraient commencer à travailler, en heures supplémentaires, au nettoyage des ruisseaux. Au moins sept catchment drains, comme on les appelle techniquement, ont été identifiés en priorité: les ruisseaux du Pouce, des Créoles, Barbeau, La Paix, Fanfaron, entre autres. Ils seront une trentaine à travailler pendant deux week-ends pour compléter le travail de la vingtaine d’hommes qui opère pendant la semaine. C’est notre préoccupation prioritaire depuis le passage du cyclone Hollanda. Il y a eu une accumulation de terre et de roches.»(Idem)
L’indiscipline légendaire des Port-Louisiens

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La part de l’indiscipline humaine dans la pollution des cours d’eau port-louisiens crève les yeux. «L’insalubrité des ruisseaux est également due aux détritus que les riverains jettent dans les cours d’eau,» indique-t-on à la municipalité. «L’indiscipline des Port-louisiens est pratiquement légendaire, surtout lorsqu’ils doivent se débarrasser de leurs ordures ménagères.»(Idem) Aussi, il faut faire comprendre que «l’entretien des ruisseaux passe également par la prise de conscience des habitants.»(Idem) Autrement dit, il s’agit, comme le souligne un technicien au Département de l’Environnement de “control pollution at source.»

Ce à quoi Monique Koenig de ‘Friends of the Environment’ ajoute : «Il faut appliquer les lois, cela empêcherait les gens de jeter leurs ordures n’importe où et contribuerait à rendre les ruisseaux plus propres et la ville plus accueillante.» En fait, le cours d’eau est une poubelle «où les marchands de gâteaux jettent tous leurs papiers et, sur les bords du canal, les drogués viennent se cacher» raconte, indigné, un représentant du garage Michelin situé sur les berges d’un ruisseau à la rue John Kennedy. A cet endroit, la chaussée s’est effrondée dans le cours d’eau. «C’est comme ça depuis deux ans et ça empire avec le passage régulier de véhicules lourds» indique le représentant de Michelin.
En fait, la tâche est lourde et on se demande par quel bout commencer…

Problèmes de ‘surface’ et problèmes ‘souterrains’

Mais les problèmes de drainage sont à la fois ‘de surface’ et ‘souterrains’. « A ces problèmes de surface (ex. l’effondrement de la chaussée dans le cours d’eau à la rue John Kennedy) il faut également ajouter d’autres problèmes souterrains.» (Idem) L’exemple d’un problème ‘souterrain’ est «le cas de cet immeuble de la rue John Kennedy dont les fondations constituent un véritable bouchon qui interdit l’écoulement des eaux.» (idem) De telles pratiques sont susceptibles de créer, comme le souligne Monique Koenig, «de graves problèmes de débordement, comme dans les années 20 où les Archives furent complètement inondées.» (Idem)

Autre problème méconnu: la montée des eaux. «Selon un rapport de la météorologie nationale, l’eau monte régulièrement chaque année dans le port, ce qui, entre autres conséquences, provoque un refoulement dans les ruisseaux. Heureusement que, grâce à un écoulement minimum, il n’y a aucune réelle stagnation des eaux, donc pas de risques de prolifération de microbes. Maigre consolation…Mais les problèmes demeurent. D’ailleurs, comme le fait ressortir un technicien de la municipalité de Port-Louis, ‘même les lits des ruisseaux sont très endommagés’. (Idem)

Quid des projets de réhabilitation ?

Y-a-t-il des projets de réhabilitation d’envergure? «Pas vraiment. Cette année , un budget spécial est prévu pour l’entretien des ruisseaux mais il est peu important.» (Idem) A la municipalité on regrette qu’on a dû abandoner toute idée d’utiliser une drague suceuse au Caudan. Trop cher. En attendant des initiatives privées.

Alors quoi faire? Les équipes de nettoyage de la municipalité, elles, continuent imperturbablement leur travail de fourmi. «La seule suggestion que nous puissions faire c’est d’aménager des rampes le long des ruisseaux pour faciliter l’accès des camions de ramassage,» explique un technicien. Du côté de ‘Friends of Environment’ on voit plus loin. «Il faudrait une nouvelle gestion des ruisseaux, à la veille du XXIe siècle, il faudrait aussi éduquer le public, lui donner des alternatives et tout cela dans le dialogue et non pas en essayant de jeter la pierre» affirme Monique Koenig. Et au journaliste de faire remarquer pour conclure: «Mais entretemps., la gangrène gagne chaque jour un peu plus les ruisseaux. Quel remède pourra guérir cette honte au quotidien?»(Idem)
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La situation n’est guère mieux du côté des rues!

Certes, « si les rues de Port-Louis ne sont plus jonchées d’ordures comme ce fut le cas il y quelques années, certaines d’entre elles font l’objet d’une absence totale d’entretien , à l’instar des rues Mère-Barthélemy et Brown Sequard.»(2) L’état des trottoirs et des drains laisse à desirer. «Les trottoirs à côté de ce qui fut le Cinéma des Familles et ceux de la rue Brown Sequard sont dans un état déplorable. Pire, le drain qui sert généralement à faciliter l’écoulement des eaux pluviales est recouvert d’une couche de ciment provenant d’un chantier de construction. Estimant que la rue est une poubelle, le contrevenant y a, en toute impunité, déversé ses ordures.»(Idem) La rue La Chaussée n’est pas épargnée. «Il n’est plus possible de marcher avec aisance à la rue La Chaussée, à hauteur d’Ireland Blyth Ltd., tant elle est encombrée de marchands ambulants.»(Idem)

Le ruisseau du Pouce est aussi pointé du doigt. «Autre spectacle qui fait honte au pays est l’état du ruisseau du Pouce, surtout au point où il passe sous la rue John Kennedy.» Ce qui est de mauvaise augure pour le beau MEDCOR qui devait s’y lever…

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